SILLON

PrologueGénérositéRespects humainsJoieAudaceLuttePecheurs d'hommesSouffranceHumilitéCitoyennetéSincéritéLoyautéDisciplinePersonnalitéPriereTravailFrivolitéNaturelVéracitéAmbitionHypocrisieVie intérieureOrgueilAmitiéVolontéCœurPuretéPaixL'au-delaLa langueRayonnementResponsabilitéPénitence

 «    PROLOGUE    » 

Ami lecteur, permets-moi de prendre ton âme,
pour lui faire contempler des vertus d'homme:
la grâce agit sur la nature.
Mais n'oublie pas que mes considérations, tout humaines qu'elles te paraissent,
telles que je les ai écrites (et même vécues) pour toi et pour moi,
devant Dieu, ne peuvent être que sacerdotales.
Puissent ces pages avoir pour effet
(et c'est ce que je demande à notre Seigneur)
de nous rendre meilleurs
et de nous pousser à laisser dans cette vie,
par nos œuvres, un sillon fécond!

 «    GÉNÉROSITÉ    » 

1 Nombreux sont les chrétiens qui sont convaincus que la Rédemption se réalisera dans tous les milieux du monde, et qu'il doit bien y avoir quelques âmes (ils ne savent pas lesquelles) qui contribuent, avec le Christ, à réaliser cette Rédemption. Mais ils la considèrent dans une perspective séculaire, dans des siècles et des siècles...: une éternité, s'il fallait la mener à bien au rythme de leur générosité.
C'est ainsi que tu raisonnais, jusqu'à ce que l'on vienne te "réveiller".

2 Le don de soi est la première foulée d'une course faite de sacrifice, de joie, d'amour, d'union à Dieu. – Ainsi toute la vie s'emplit d'une bienheureuse folie qui fait découvrir le bonheur là ou la logique humaine ne voit que renoncement, souffrance, douleur.

3 "Priez pour moi – disais-tu – pour que je sois généreux, que je progresse, que je parvienne à me transformer de telle sorte que je puisse un jour être utile à quelque chose."
Bien. – Mais, quels moyens mets-tu en œuvre pour que ces résolutions s'avèrent efficaces?

4 Bien souvent tu te demandes pourquoi certaines âmes qui ont eu le bonheur de connaître Jésus, le vrai Jésus, depuis leur enfance hésitent tant à répondre en donnant ce qu'elles possèdent de plus précieux: leur vie, leur famille, leurs nobles ambitions.
Ecoute: toi, justement parce que tu as tout reçu "d'un coup", tu es obligé de te montrer très reconnaissant envers Notre Seigneur; tout comme réagirait un aveugle qui recouvrerait la vue subitement, alors que les autres, parce qu'ils voient, ne songent même pas à dire merci.
Mais... cela ne suffit pas. Tu dois, jour après jour, aider ceux qui t'entourent à manifester leur reconnaissance pour le fait d'être enfants de Dieu. Sinon, ne me dis pas que tu es reconnaissant.

5 Médite ceci lentement: ce que l'on me demande est bien peu de chose en échange de tout ce que l'on me donne.

6 Pour toi qui n'en finis pas de démarrer, considère ce que m'écrivait l'un de tes frères: "cela coûte, mais une fois la "décision" prise, quel soupir de bonheur d'être en sécurité sur le chemin!".

7 Ces journées – me disais-tu – se sont écoulées, plus heureuses que jamais. – Et je t'ai répondu, sans hésiter: c'est parce que tu as "vécu" avec un peu plus de générosité que d'habitude.

8 L'appel du Seigneur (la vocation) se présente toujours de cette façon: "Si quelqu'un veut venir à ma suite, qu'il se renie lui-même, prenne sa Croix et me suive."
Oui: la vocation exige le renoncement, le sacrifice. Mais, qu'il devient savoureux ce sacrifice – "gaudium cum pace", la joie dans la paix – si ce renoncement est complet!

9 Lorsqu'on lui a proposé de s'engager personnellement, sa réaction a été la suivante: "dans ce cas, je pourrais faire ceci..., je devrais faire cela..."
– On lui a répondu: "Ici, on ne marchande pas avec le Seigneur. La loi de Dieu, l'invitation du Seigneur est à prendre ou à laisser, telle quelle. II faut se décider – en avant! – sans rien se réserver et avec beaucoup de courage, ou s'en aller. "Qui non est mecum..." – celui qui n'est pas avec Moi, est contre Moi.".

10 Du manque de générosité à la tiédeur, il n'y a qu'un pas.

11 Pour que tu ne l'imites pas, d'une lettre j'extrais pour toi cet exemple de lâcheté: "Je vous suis, bien entendu, très reconnaissant de bien vouloir vous souvenir de moi, car j'ai besoin de beaucoup de prières. Mais je vous serai également reconnaissant, lorsque vous supplierez le Seigneur de faire de moi un "apôtre", de ne pas vous évertuer à lui demander d'exiger de moi le don de ma liberté"

12 Quelqu'un que tu connais, de très intelligent, un bon bourgeois et honnête homme, disait: "accomplir la loi, mais avec mesure, sans dépasser les bornes, au plus juste".
Et il ajoutait: "pécher? non; mais se donner, non plus".
Ils font vraiment de la peine, ces hommes mesquins, calculateurs, incapables de se sacrifier, de se dévouer pour un noble idéal.

13 Il faut que l'on te demande davantage: parce que tu peux donner davantage et que tu dois donner davantage. Penses-y.

14 "C'est très difficile!" t'écries-tu, découragé.
Ecoute, si tu luttes, la grâce de Dieu est suffisante; tu feras abstraction de tes intérêts personnels, tu serviras les autres pour Dieu, et tu aideras l'Église là où se livre aujourd'hui la bataille: dans la rue, à l'usine, dans l'atelier, à l'université, au bureau, dans ton milieu, parmi les tiens.

15 Tu m'as écrit: "au fond, c'est toujours la même histoire: un grand manque de générosité Quel dommage et quelle honte de découvrir le chemin et de laisser quelques petits nuages de poussière, inévitables, en occulter le terme!"
Ne te fâche pas si je te dis que tu es le seul coupable: sois courageux pour t'attaquer à toi-même. Tu en as les moyens plus que suffisants.

16 Lorsque ton égoïsme t'éloigne du souci commun pour le bien-être (la santé et la sainteté) de tous les hommes, lorsque tu deviens calculateur et que les misères matérielles et morales du prochain ne te touchent pas, je me vois obligé de te reprocher quelque chose de très fort pour te faire réagir: si tu ne ressens pas la fraternité bienheureuse de tes frères les hommes, et si tu vis en marge de la grande famille chrétienne, tu n'es qu'un malheureux enfant trouvé.

17 Le sommet? Pour une âme qui s'est donnée, tout devient un sommet à atteindre: chaque jour elle découvre de nouveaux objectifs, parce qu'elle ne sait ni ne veut mettre des limites à l'Amour de Dieu.

18 Plus tu seras généreux pour Dieu, plus tu seras heureux.

19 Elle vient souvent, la tentation de se réserver un peu de temps pour soi...
Apprends une fois pour toutes à porter remède à tant de mesquinerie: corrige-toi tout de suite.

20 Tu étais du parti du "tout ou rien". Et comme tu ne pouvais rien... Quel dommage! Commence une humble lutte, pour que ta générosité si pauvre, si pingre, s'enflamme jusqu'à devenir "pleinement" effective.

21 Nous qui nous sommes donnés à Dieu, nous n'avons rien perdu.

22 J'aimerais crier aux oreilles de beaucoup d'entre elles et d'entre eux: ce n'est pas un sacrifice que de donner ses enfants au service de Dieu; c'est un honneur et une joie!

23 Le moment de la dure épreuve est arrivé pour lui, et il est venu te chercher tout affligé.
– Tu te souviens? Pour lui, l'ami qui te donnait des conseils "prudents", ta façon d'agir n'était qu'utopie, le fruit d'une déformation des idées, d'un détournement des volontés, et... autres "subtilités" de ce genre.
– "Ce don de soi à Dieu, pontifiait-il, est une exacerbation anormale du sentiment religieux." Et, suivant sa pauvre logique, il s'imaginait que, entre ta famille et toi, s'était glissé un étranger: le Christ.
A présent il a compris ce que tu lui répétais si souvent: le Christ ne sépare jamais les âmes.

24 Une tâche urgente: remuer la conscience des croyants et des non croyants – mobiliser les hommes de bonne volonté – pour qu'ils coopèrent et fournissent les instruments matériels nécessaires au travail pour les âmes.

25 Il fait montre de beaucoup d'enthousiasme et de compréhension. Mais lorsqu'il voit que c'est "lui" qui est en question, que c'est "lui" qui doit collaborer sérieusement, lâche, il se retire.
Il me rappelle ceux qui, à l'heure de graves dangers, criaient pleins d'une fausse vaillance: aux armes! aux armes! Mais ils ne voulaient pas donner d'argent, ni s'enrôler pour défendre leur patrie.

26 Quelle peine de constater comment certains comprennent l'aumône: quelques sous ou de vieux vêtements. On dirait qu'ils n'ont pas lu l'Evangile.
N'y allez pas par quatre chemins: aidez les gens à se former avec la foi et la force suffisantes pour que de leur vivant, généreux, ils se détachent du nécessaire.
Expliquez aux mollassons qu'il est peu noble, peu élégant (même d'un point de vue purement humain) d'attendre la fin, c'est-à-dire le moment où, par la force des choses, ils ne peuvent désormais plus rien emporter avec eux.

27 "Qui prête, ne récupère pas; s'il récupère, il ne recouvre pas tout; s'il recouvre tout, ce n'est pas tel quel; et si c'est tel quel, on devient ennemi mortel."
Alors?... Donne! Sans calcul, et toujours pour Dieu. Ainsi, jusque sur le plan humain, tu vivras plus près des hommes et tu contribueras à ce qu'il y ait moins d'ingrats.

28 J'ai vu rougir le visage de cet homme simple, et il m'a semblé que des larmes voilaient ses yeux: il apportait généreusement son concours à de bonnes œuvres, avec l'argent qu'il avait honnêtement gagné; or, il venait d'apprendre que "les bons" jugeaient que ses actions n'étaient pas droites.
Avec la naïveté du néophyte dans ces combats de Dieu, il murmurait: "Ils voient que je me sacrifie... et en plus, ils me sacrifient!"
Je lui ai parlé lentement: il a embrassé mon Crucifix, et son indignation, bien naturelle, s'est transformée en paix et en joie.

29 Ne ressens-tu pas une envie folle de rendre plus complet, plus "irrémédiable" le don que tu fais de toi-même?

30 Qu'elle est ridicule l'attitude des pauvres hommes que nous sommes, lorsque nous refusons, une fois et une autre, de petites choses à Notre Seigneur! Le temps passe, les choses apparaissent progressivement avec leur véritable relief,... et c'est alors que naissent la honte et la douleur.

31 "Aure audietis, et non intelligetis: et videntes videbitis, et non perspicietis." Comme elles sont claires ces paroles du Saint-Esprit: ils entendent de leurs propres oreilles et ils ne comprennent pas; ils regardent de leurs yeux, mais ils n'aperçoivent pas.
Pourquoi t'inquiètes-tu si certains, tout en "voyant" ton apostolat et en en mesurant la grandeur, ne se donnent pas? Prie dans le calme et persévère sur ton chemin: si ceux-là ne se décident pas, d'autres viendront!

32 Depuis que tu lui as dit "oui", le temps a fait changer la couleur de l'horizon, plus beau chaque jour, un horizon qui brille avec plus d'ampleur et de luminosité. Mais tu dois continuer de dire "OUI".

33 La Sainte Vierge Marie, Maîtresse du don de soi qui ne connaît pas de limite. – Te souviens-tu? c'est en la louant, Elle, que Jésus affirme: "Celui qui accomplit la volonté de mon Père, celui-ci (celle-ci!) est ma Mère!..."
Prie cette bonne Mère pour que se renforce dans ton âme – d'une force d'amour et de libération – la réponse, généreuse, exemplaire, qui fut la sienne: "ecce ancilla Domini!" – Voici la servante du Seigneur.

 «    RESPECTS HUMAINS    » 

34 Lorsque la défense de la vérité est en jeu, comment peut-on souhaiter ne pas déplaire à Dieu et, en même temps, ne pas se heurter à son milieu? Il y a bien là un antagonisme: c'est l'un ou l'autre! Il faut que le sacrifice devienne holocauste: il faut tout brûler,... y compris le "qu'en dira-t-on", y compris ce que l'on appelle la bonne réputation.

35 A présent il est clair, si clair pour moi que la "sainte effronterie" s'enracine très profondément dans l'Evangile! Accomplis la volonté de Dieu..., et souviens-toi de Jésus diffamé, de Jésus couvert de crachats et souffleté, de Jésus traîné devant les tribunaux des pauvres hommes..., et de Jésus qui se tait! – Une résolution: baisser la tête devant les outrages et, tout en comptant aussi avec les humiliations qui sans doute viendront, poursuivre la tâche divine que l'Amour Miséricordieux de Notre Seigneur a voulu nous confier.

36 Quel mal effrayant nous pouvons causer si nous nous laissons entraîner par la peur ou par la honte de montrer, dans la vie ordinaire, que nous sommes chrétiens!

37 Il y a des gens qui, pour parler de Dieu, ou de l'apostolat, semblent éprouver le besoin de se défendre. Peut-être parce qu'ils n'ont pas découvert la valeur des vertus humaines et qu'en revanche ils n'ont que trop de déformation spirituelle et de lâcheté.

38 Il est inutile de prétendre plaire à tout le monde. Des mécontents, des gens qui protestent, il y en aura toujours. Vois ce que dit, en résumé, la sagesse populaire: "Le bonheur des agneaux fait le malheur des loups."

39 Ne te conduis pas comme ces personnes qui s'effraient devant un ennemi dont la seule force est "l'agressivité de sa voix"

40 Tu comprends le travail que l'on fait..., cela te semble bon... Mais tu te gardes bien d'y collaborer; pire encore de faire en sorte que les autres voient ou s'imaginent que tu y collabores.
– Tu as peur – m'as-tu dit – que l'on te prenne pour meilleur que tu n'es! – Ne serait-ce pas plutôt que tu as peur que Dieu et les hommes exigent de toi davantage de cohérence?

41 Il semblait tout à fait décidé...; mais, au moment de prendre la plume pour rompre avec sa fiancée, l'indécision a pris le dessus, le courage lui a manqué: c'est très humain et compréhensible, ont commenté d'autres gens. A ce qu'il paraît, aux dires de certains, les amours de la terre ne sont pas de ces choses qu'il faut abandonner pour suivre pleinement Jésus-Christ lorsqu'Il le demande

42 Il en est qui s'égarent par faiblesse, en raison de la fragilité de l'argile dont nous sommes faits, mais ils demeurent intègres dans la doctrine.
Ce sont ceux-là mêmes qui, la grâce de Dieu aidant, manifestent leur courage et leur humilité héroïques pour avouer leur égarement, et pour défendre, avec acharnement, la vérité.

43 Certains appellent imprudence et hardiesse la foi et la confiance en Dieu.

44 C'est une folie d'avoir confiance en Dieu! Et n'est-ce pas une folie plus grande que d'avoir confiance en soi-même, ou dans les autres hommes?

45 Tu m'écris que tu t'es rendu, enfin, au confessionnal, et que tu as éprouvé l'humiliation de devoir ouvrir le cloaque de ta vie (c'est ainsi que tu t'exprimes) devant "un homme".
– Quand donc extirperas-tu cette vaine estime que tu ressens pour toi-même? Alors, tu te rendras à la confession joyeux de te montrer tel que tu es, devant "cet homme" qui a reçu l'onction (cet autre Christ, le Christ lui-même!) qui te donne l'absolution, le pardon de Dieu.

46 Ayons le courage de vivre, de façon publique et constante, en conformité avec notre sainte foi.

47 Nous ne pouvons être sectaires, me disaient-ils d'un air serein, en considérant la fermeté de la doctrine de l'Église.
Par la suite, lorsque je leur ai fait voir que celui qui détient la Vérité n'est pas sectaire, ils ont compris qu'ils s'étaient trompés.

48 Le ridicule de prendre la mode pour ligne de conduite... pour s'en convaincre il suffit de regarder quelques vieux portraits.

49 Je me réjouis que tu aimes les processions, toutes les manifestations extérieures de notre Mère la Sainte Église; rendre à Dieu le culte qui lui est dû...; et que tu y participes!

50 "Ego palam locutus sum mundo": j'ai prêché au monde ouvertement, répond Jésus à Caïphe, lorsqu'approche le moment de donner sa Vie pour nous.
– Et, cependant, il y a des chrétiens honteux de manifester "palam" (en public) leur vénération pour Notre Seigneur.

51 Alors que s'est produite la débandade apostolique et que le peuple enragé crie à tue-tête sa haine de Jésus-Christ, Sainte Marie suit de près son Fils à travers les rues de Jérusalem. La clameur de la foule ne la fait pas reculer, et elle ne cesse d'accompagner le Rédempteur tandis que tous ceux du cortège, dans l'anonymat, montrent une lâche hardiesse pour maltraiter le Christ.
Invoque-la avec force: "Virgo fidelis!" – Vierge fidèle! et supplie-la pour que nous, qui nous disons amis de Dieu, nous le soyons en vérité et à toute heure.

 «    JOIE    » 

52 Personne n'est heureux sur terre tant qu'il ne se décide pas à ne pas l'être. Ainsi va le chemin: douleur, en langage chrétien veut dire Croix; Volonté de Dieu, Amour, le bonheur pour ici-bas et, ensuite, pour l'éternité.

53 "Servite Domino in laetitia!" Je servirai Dieu avec joie! Une joie qui sera la conséquence de ma Foi, de mon Espérance et de mon Amour..., une joie qui doit durer toujours; l'Apôtre lui-même l'assure: "Dominus prope est!..." – le Seigneur me suit de près. Je marcherai donc avec Lui, en toute sécurité puisque le Seigneur est mon Père..., et avec son aide, je ferai jusqu'au bout son aimable Volonté, même s'il m'en coûte.

54 Un conseil que je vous ai rabâché à dessein: soyez joyeux, toujours joyeux! – La tristesse pour ceux qui ne se considèrent pas comme des enfants de Dieu.

55 Pour que mes frères plus jeunes "marchent avec aisance", je tâche d'y laisser ma peau, comme vous nous le dites. Il y a tant de joie à en voir de toutes les couleurs.

56 Un autre homme de foi m'écrivait: "lorsque, par nécessité, on se trouve isolé, on remarque parfaitement l'aide de ses frères. En considérant que je dois à présent tout supporter "tout seul", je pense bien souvent que, sans cette "compagnie que nous nous tenons malgré la distance" (la bienheureuse Communion des saints!), je ne pourrais garder cet optimisme qui me comble".

57 N'oublie pas qu'il est parfois nécessaire d'avoir des visages souriants à ses côtés.

58 "Vous êtes tous si joyeux! On ne s'y attendait pas", ai-je entendu commenter.
Il vient de loin, ce zèle diabolique des ennemis du Christ, qui ne se lassent pas de murmurer que les personnes qui se sont données à Dieu sont du côté des tristes mines. Et, malheureusement, parmi ceux qui se veulent "bons", certains leur font écho, avec leurs "vertus tristes".
– Nous te rendons grâces, Seigneur, parce que tu as voulu compter sur nos vies, joyeuses, heureusement, pour effacer cette fausse caricature.
Je te demande aussi que nous ne l'oubliions pas.

59 Que personne ne lise ni tristesse ni douleur sur ton visage, lorsque tu répands de par le monde le parfum de ton sacrifice: les enfants de Dieu doivent toujours être des semeurs de paix et de joie.

60 La joie d'un homme de Dieu, d'une femme de Dieu, doit être débordante: sereine, contagieuse, attirante... Bref, elle doit être si surnaturelle, si expansive et si naturelle qu'elle en entraîne d'autres sur les chemins du christianisme.

61 "Content?" – Cette question m'a laissé songeur.
– On n'a pas encore inventé les mots pour exprimer tout ce que l'on ressent, dans son cœur et dans sa volonté, lorsqu'on se sait enfant de Dieu.

62 Noël. Tu m'écris: "au long de cette sainte attente de Marie et de Joseph, moi aussi j'attends l'Enfant, avec impatience. Comme je vais être heu-eux à Bethléem! Je pressens que j'éclaterai d'une joie sans limite. Et avec Lui je veux aussi naître de nouveau..."
– Puisse-t-il être réel ce désir qui est le tien!

63 Une résolution sincère: rendre notre chemin facile, aimable pour les autres, car la vie comporte en elle-même suffisamment d'amertume.

64 Quelle merveille de convertir des infidèles, de gagner des âmes!...
– Eh bien, il est tout aussi agréable aux yeux de Dieu, et plus encore, d'éviter qu'elles ne se perdent.

65 Les revoilà tes vieilles folies!... Et ensuite, quand tu reviens à toi, tu remarques ton peu de joie: il te manque l'humilité.
On dirait que tu t'obstines à méconnaître la seconde partie de la parabole de l'Enfant prodigue et que tu restes attaché au pauvre bonheur que te procurent les glands que tu manges. Ton orgueil est blessé par ta fragilité, tu ne te décides pas à demander pardon: tu ne considères pas que, si tu t'humilies, c'est le joyeux accueil de Dieu ton père qui t'attend, la fête pour ton retour et pour ton recommencement.

66 C'est vrai: nous ne valons rien, nous ne sommes rien, nous ne pouvons rien, nous n'avons rien. Et, en même temps, au cœur de la lutte quotidienne, les obstacles, les tentations ne nous font pas défaut... Mais la "joie" de tes frères dissipera toutes les difficultés, dès que tu les auras rejoints, tu auras vu qu'ils s'appuient fermement sur Lui, "quia Tu es Deus fortitudo mea" – parce que Tu es, Seigneur, notre force.

67 La scène se répète, tout comme avec les invités de la parabole. Pour les uns la peur, pour les autres les occupations; pour plus d'un... des histoires, de sottes excuses.
Ils résistent. Et voilà ce qu'ils deviennent: écœurés, compliqués, abouliques, las, amers. Alors qu'il est si facile d'accepter J'invitation divine dc chaque instant et d'en vivre tout joyeux tout heureux!

68 Il est très commode de dire: "je suis inutile; je fais (nous faisons) tout de travers" –Outre que ce n'est pas vrai, ce pessimisme recèle une bien grande paresse... Il y a des choses que tu fais bien et il y a des choses que tu fais mal. Que les premières te remplissent de joie et d'espérance; et fais face sans te décourager aux secondes, afin de te corriger: et alors, elles marcheront.

69 "Père, comme vous me l'avez conseillé, je ris de mes misères (sans oublier pour autant que je ne dois pas transiger avec); et alors je me sens beaucoup plus joyeux.
"En revanche, lorsque je commets la bêtise de m'attrister, j'ai l'impression de m'égarer.".

70 Tu me demandes si je porte une croix. Et je t'ai répondu que oui, que nous, nous portons toujours une Croix. – Mais une Croix glorieuse, un sceau divin, la garantie authentique que nous sommes des enfants de Dieu. C'est pourquoi nous marchons toujours heureux quand nous avons cette Croix.

71 Tu éprouves davantage de joie. Mais il s'agit, cette fois-ci, d'une joie nerveuse, un peu impatiente, mêlée à la nette sensation que quelque chose en toi se déchire comme un sacrifice. Ecoute-moi bien: ici-bas, sur terre, le bonheur complet n'existe pas. Alors, maintenant, sur-le-champ, sans dire un mot, sans avoir l'air d'une victime, fais de toi une offrande à Dieu, dans un don total et absolu.

72 Tu passes par des jours de liesse, l'âme comblée de soleil et de couleur. Et, curieusement, les motifs de ta joie sont précisément ceux qui, en d'autres occasions, te décourageaient! C'est l'éternelle histoire: tout dépend du point de mire. – "Laetetur cor quaerentium Dominum!" – lorsque l'on cherche le Seigneur, le cœur déborde toujours de joie.

73 Entre ces hommes sans foi, rendus tristes et hésitants par leur existence vide, exposés, comme des girouettes, aux "fluctuations" des circonstances, et notre vie de chrétiens, confiante, joyeuse, ferme, dense, quelle différence! quelle grâce que la connaissance et la certitude absolue de notre destinée surnaturelle!

74 Tu n'es pas heureux parce que tu tournes et retournes tout comme si tu étais toujours au centre: parce que tu as des douleurs d'estomac, parce que tu es fatigué, parce que l'on t'a dit ceci ou cela...
As-tu essayé de penser à Lui et aux autres en passant par Lui?

75 "Miles" – soldat: c'est ainsi que l'Apôtre appelle le chrétien.
Eh bien, dans ce bienheureux combat du chrétien, un combat d'amour et de paix, pour le bonheur de toutes les âmes, il se trouve, parmi les rangs de Dieu, des soldats fatigués, affamés, déchirés par les blessures..., mais joyeux: ils portent dans leur cœur les lumières éclatantes de la victoire.

76 "Père, je vous fais part de ma résolution: être toujours souriant; avoir le sourire au cœur, même si on me le transperce."
– Cette résolution me paraît opportune. Je prie pour que tu la mettes en pratique.

77 A certains moments un début de découragement t'oppresse, qui tue tout enthousiasme en toi; c'est tout juste si tu parviens à le vaincre à force d'actes d'espérance.
– Peu importe: c'est une bonne occasion pour demander plus de grâce à Dieu. En avant! Renouvelle la joie de lutter, même si tu perds une escarmouche.

78 De gros nuages – manque d'envie, perte d'enthousiasme – se sont amoncelés. Il est tombé des averses de tristesse: tu as la sensation que mille liens t'attachent. Et, pour couronner le tout, tu as eu des tentations de découragement, issues d'une réalité plus ou moins objective: tant d'années de lutte... et tu es encore tellement en arrière, tellement loin.
Tout cela est nécessaire, et Dieu compte là-dessus: pour atteindre le "gaudium cum pace" – la joie et la paix véritables nous devons ajouter à la conviction de notre filiation divine, qui nous comble d'optimisme, la reconnaissance de notre propre faiblesse.

79 Tu as rajeuni! En effet, tu remarques que la fréquentation de Dieu t'a ramené en peu de temps à l'époque simple et heureuse de ta jeunesse, et même à l'assurance et à la joie sans mièvreries de l'enfance spirituelle... Tu regardes autour de toi et tu constates qu'il arrive la même chose aux autres: les années s'écoulent depuis leur rencontre avec Notre Seigneur et, la maturité venue, en eux se fortifient une jeunesse et une joie ineffaçables. Ils ne se trouvent pas jeunes: ils sont jeunes et joyeux! Cette réalité de la vie intérieure attire, confirme et subjugue les âmes. Remercie chaque jour "Deum qui laetificat juventutem" – ce Dieu qui comble de joie ta jeunesse..

80 La grâce de Dieu ne te manque pas. Par conséquent, si tu lui réponds, tu dois être sûr de toi.
Le succès ne tient qu'à toi: unis à cette grâce, ta force et ton entrain sont un motif plus que suffisant pour te donner l'optimisme de qui est sûr de la victoire.

81 Peut-être étais-tu hier l'une de ces personnes aux espoirs remplis d'amertume, déçues dans leurs ambitions humaines. Aujourd'hui, depuis qu'Il s'est introduit dans ta vie – merci, mon Dieu! – tu ris et tu chantes, et tu apportes le sourire, l'Amour et le bonheur partout où tu vas.

82 Beaucoup se sentent malheureux précisément parce qu'ils ont de tout en trop. – Les chrétiens, s'ils se conduisent véritablement en enfants de Dieu, auront à supporter l'inconfort, la chaleur, la fatigue, le froid... Mais la joie ne leur fera jamais défaut, parce que tout cela – tout! – c'est Lui qui le dispose ou le permet, Lui qui est la source du vrai bonheur.

83 Face au panorama qu'offrent des hommes sans foi, sans espérance; face aux cerveaux qui s'agitent, au bord de l'angoisse, tout en cherchant une raison d'être à la vie, toi tu as trouvé un but: Lui! Et cette découverte introduira en permanence dans ton existence une joie nouvelle: elle te transformera, et te fera découvrir chaque jour une foule de belles choses, qui t'étaient inconnues jusqu'alors, et qui sont le signe de l'ampleur de la joie qu'offre ce chemin très large qui te mène à Dieu.

84 Ton bonheur sur la terre s'identifie à ta fidélité à la foi, à la pureté, et au chemin que le Seigneur a tracé pour toi.

85 Rends grâce à Dieu pour être content, plein d'une joie profonde qui n'a pas besoin de s'exprimer de manière bruyante.

86 Avec Dieu, pensais-je, chaque journée me semble plus attrayante.
Je vis "au goutte à goutte". Un jour je trouve tel détail magnifique; un autre, je découvre un panorama que je n'avais pas remarqué auparavant... Si cela continue, je me demande ce qui arrivera avec le passage du temps.
Ensuite, j'ai constaté que Dieu lui-même m'assurait: eh bien, chaque jour ta joie grandira parce que tu plongeras de plus en plus profondément dans cette aventure divine, cette très grande "histoire" dans laquelle Je t'ai embarqué. Et tu constateras que Je ne t'abandonne pas.

87 La joie est une conséquence du don de soi. Chaque tour donné à la noria la rend plus forte.

88 Tu t'es donné à Dieu et cela te procure une joie inaltérable!... Et quelle inquiétude, quels désirs dois-tu avoir pour que tous participent à ta joie!

89 Tout ce qui te préoccupe à présent tient dans un sourire esquissé pour l'amour de Dieu.

90 De l'optimisme? toujours! Et même quand les choses ont l'air d'aller mal: peut-être l'heure est-elle venue de commencer à chanter un Gloria, parce que tu t'es réfugié en Lui, et, de Lui, il ne peut te venir que du bien.

91 Espérer n'implique pas commencer à voir la lumière, mais être sûr, les yeux fermés, que le Seigneur, Lui, la possède pleinement et qu'Il vit dans cette clarté. La Lumière c'est Lui.

92 Le devoir de tout chrétien: apporter la paix et le bonheur dans les divers milieux du monde, par une croisade de force et de joie, qui émeuve même les cœurs fanés et pourris, et les élève vers Lui.

93 Si tu coupes à la racine le moindre soupçon d'envie, et si tu te réjouis sincèrement des succès des autres, tu ne perdras pas la joie.

94 Cet ami m'a abordé: "on m'a dit que tu étais amoureux". – J'en ai été très étonné, et la seule chose qui me soit venue à l'esprit a été de lui demander l'origine de cette nouvelle.
Il m'a avoué qu'il le lisait dans mes yeux, brillants de joie.

95 Quelle joie dans le regard joyeux de Jésus! la même qui luit dans les yeux de sa Mère, et qu'elle ne peut contenir – "Magnificat anima mea Dominum!" – son âme glorifie le Seigneur, depuis l'instant où elle le porte en elle et à ses côtés.
O Mère! que notre joie soit comme la tienne: la joie d'être avec Lui et de L'avoir avec nous.

 «    AUDACE    » 

96 Ne soyez pas des âmes "à œillères", des hommes ou des femmes mineurs, myopes, incapables d'embrasser l'ensemble de notre horizon surnaturel et chrétien d'enfants de Dieu. Dieu et Audace!

97 L'audace n'est ni imprudence, ni témérité irréfléchie, ni simple hardiesse.
L'audace c'est la force, vertu cardinale, nécessaire à la vie de l'âme.

98 Tu t'es décidé, plus par réflexion que par fougue et enthousiasme. Bien que tu en aies éprouvé le désir, il n'y a pas eu de place en toi pour le sentiment: tu t'es donné, après t'être convaincu que Dieu le voulait.
Et, à partir de cet instant, tu n'as plus "ressenti" aucun doute sérieux; mais, tout au contraire, une joie tranquille, sereine, débordante par moments. C'est ainsi que Dieu paye les audaces de l'Amour.

99 J'ai lu un proverbe très populaire dans certains pays: "Le monde est à Dieu, mais Dieu le loue aux courageux", voilà qui m'a fait réfléchir.
– Qu'attends-tu?

100 Je ne suis pas l'apôtre que je devrais être. Je suis... un timide.
– Ne serais-tu pas timoré, parce que ton amour est étriqué? – Réagis!

101 Les difficultés t'ont rendu craintif, et tu es devenu "prudent, modéré et objectif".
– Souviens-toi que tu as toujours méprisé ces termes, lorsqu'ils sont synonymes de lâcheté, pusillanimité et confort.

102 Avoir peur? c'est le propre de ceux qui savent qu'ils agissent mal. Toi, jamais!

103 Un si grand nombre de chrétiens seraient des apôtres..., s'ils n'avaient pas peur.
Ce sont les mêmes qui se plaignent ensuite, parce que le Seigneur – disent-ils! – les abandonne: comment agissent-ils, eux, envers Dieu?

104 Nous sommes nombreux; avec l'aide de Dieu, nous pouvons arriver partout, commentent-ils, pleins d'enthousiasme.
– Pourquoi alors te démoralises-tu? Avec la grâce divine, tu peux arriver à la sainteté, et c'est ce qui importe.

105 Quand le remords ronge la conscience,
c'est le signe que le Seigneur voulait que nous ne la négligions pas.
– En effet. De plus, sois assuré que tu aurais "pu" la faire, avec la grâce de Dieu.

106 A ne pas oublier: pour accomplir la volonté divine, les difficultés on passe par-dessus..., ou par-dessous..., ou on les contourne. Mais..., on les surmonte!

107 Lorsque vous travaillez à l'expansion d'une entreprise apostolique, un "non" ne doit jamais être considéré comme une réponse définitive: revenez à la charge!

108 Tu es trop "prévoyant" ou trop peu "surnaturel"; c'est pourquoi, tu veux être trop malin: ne t'invente pas toi-même les "objections", et n'essaie pas de toutes les "balayer".
– Peut-être que celui qui t'écoute est moins "malin" ou plus "généreux" que toi et comme il compte sur Dieu, il ne t'opposera sans doute pas autant de "mais".

109 Il y a des façons d'agir si précautionneuses qu'elles équivalent à la pusillanimité.

110 Il faut t'en convaincre: lorsqu'on travaille pour Dieu, il n'y a pas de difficultés qu'on ne puisse surmonter, ni de découragements qui fassent abandonner la tâche, ni d'échecs dignes de ce nom, aussi infructueux qu'apparaissent les résultats.

111 Ta foi est trop peu opérante: on dirait celle d'un bigot plus que celle d'un homme qui lutte pour être saint.

112 Sérénité! audace! Avec ces vertus, tu mettras en déroute la cinquième colonne des tièdes, des poltrons, des traîtres.

113 Tu m'as assuré que tu voulais lutter sans trêve. Et maintenant tu me reviens abattu.
Tu vois, même d'un point de vue humain, il ne te convient pas de recevoir les choses toutes faites, sans rien qui accroche. Il faut bien que tu y mettes un peu (beaucoup!) du tien. Sinon, comment vas-tu devenir saint?

114 Tu ne te décides pas à travailler dans cette entreprise surnaturelle, parce que, prétends-tu, tu as peur de ne pas savoir t'y prendre, d'échouer dans une démarche. – Si tu pensais plus à Dieu, ces fausses raisons disparaîtraient.

115 Parfois je considère que certains ennemis de Dieu et de son Église ne vivent que grâce à la peur d'une foule de "bons"; voilà qui me fait honte.

116 Tandis que nous parlions, il affirmait qu'il préférait ne jamais sortir de la baraque où il vivait, parce qu'il aimait mieux compter les poutres de "son" étable que les étoiles du ciel.
– Beaucoup d'hommes sont ainsi: incapables de faire abstraction de leurs petites affaires, pour lever les yeux vers le ciel; il est grand temps qu'ils aient de plus hautes visées!

117 Je comprends la joie surnaturelle et humaine de quelqu'un qui avait la chance de se trouver aux avancées des semailles divines.
"Qu'il est beau d'être seul à remuer toute une ville et ses alentours", se répétait-il, plein de conviction.
– Ne t'attends pas à pouvoir compter sur d'autres moyens ou sur l'aide apportée par d'autres: les âmes ont besoin de toi aujourd'hui, maintenant.

118 Sois audacieux dans ta prière et Notre Seigneur, de pessimiste te changera en optimiste, de timide en audacieux, d'homme à l'esprit timoré en homme de foi, en apôtre!

119 Les problèmes qui, auparavant, t'angoissaient – qui t'apparaissaient comme de hautes chaînes de montagnes – ont complètement disparu: ils se sont résolus d'une manière divine, tout comme le Seigneur commanda aux vents et à la mer de se calmer.
– Quand je pense que tu doutais encore!

120 "N'aidez pas tant le Saint-Esprit!" me disait un ami, pour plaisanter, tout en ayant très peur.
– Je lui ai répondu: je pense que "nous l'aidons" peu.

121 Quand je vois tant de lâchetés, tant de fausses prudences..., chez les uns et chez les autres, je brûle du désir de leur demander: alors, la foi et la confiance sont seulement bonnes à être prêchées; non pas à être mises en pratique?

122 Tu te trouves dans une situation qui te paraît assez bizarre: inhibé, d'une part, quand tu regardes à l'intérieur de toi; et, de l'autre, sûr et plein de courage quand tu regardes vers le ciel.
– Ne t'inquiète pas: c'est le signe que tu es en voie de mieux te connaître et (c'est cela qui compte!) que tu es en voie de mieux Le connaître, Lui.

123 Tu vois? avec Lui, tu y es arrivé! De quoi t'étonnes-tu donc? – II faut t'en convaincre: il n'y a là rien de surprenant. Si l'on a confiance en Dieu – une confiance véritable! – les choses deviennent si faciles. Et, en plus, on dépasse toujours la limite de ce que l'on avait imaginé.

124 Veux-tu la vivre, cette sainte audace, pour obtenir que Dieu agisse à travers toi? – Aie recours à Marie, et Elle t'accompagnera sur le chemin de l'humilité, pour que, devant ce qui est impossible à l'esprit humain, tu saches répondre par un "fiat!" (que cela s'accomplisse) pour que la terre s'unisse au Ciel.

 «    LUTTE    » 

125 Tous ne peuvent pas devenir riches, savants, célèbres... En revanche, nous tous (je dis bien, "tous") nous sommes appelés à devenir saints.

126 Etre fidèle à Dieu suppose qu'on lutte, d'une lutte corps à corps, d'homme à homme – le vieil homme contre l'homme de Dieu – au coup par coup, sans plier.

127 Je ne le nie pas, cette épreuve devient trop dure: tu dois avancer péniblement, comme à "rebrousse-poil".
– Ce que je te conseille? – Répète ces paroles: "omnia in bonum!", tout ce qui arrive, "tout ce qui m'arrive", est pour mon bien... Par conséquent – et telle est la bonne conclusion – accepte ce qui te paraît si coûteux comme une douce réalité.

128 L'Église n'a que faire de femmes bonnes ou d'hommes bons. – De plus, celui qui se contente d'être presque... bon, ne l'est jamais suffisamment: ce qu'il faut, c'est être "révolutionnaire".
Face à l'hédonisme, face à la charge de paganisme et de matérialisme qui nous est offerte, le Christ a besoin d'anticonformistes, de rebelles de l'Amour!

129 La sainteté, ou du moins l'effort authentique pour y tendre, ne s'accorde ni pauses, ni vacances.

130 Tout au long de leur vie quelques-uns se comportent comme si le Seigneur n'avait parlé de don de soi et de conduite droite qu'aux gens à qui il n'en coûte pas (or ils n'existent pas!) ou aux gens qui n'auraient pas besoin de lutter.
Ils oublient une chose: c'est pour tous que Jésus a dit que l'on conquiert le Royaume des Cieux par la violence, par une sainte bataille de chaque instant.

131 Quels ardents désirs de réformes chez tant de gens! Ne vaudrait-il pas mieux que nous tous, chacun d'entre nous, nous nous réformions pour accomplir fidèlement notre devoir?

132 Tu patauges dans les tentations, tu te mets en danger, tu joues avec la vue et avec l'imagination, tes conversations portent sur. des sottises – Et ensuite tu t'effraies que les doutes, les scrupules, les troubles, la tristesse et le découragement te harcèlent.
– Accorde-moi que tu es peu conséquent avec toi-même.

133 Après l'enthousiasme du début, les hésitations sont venues, et les atermoiements, les craintes. – Ce sont tes études, ta famille, les questions financières qui te préoccupent et, surtout, l'idée que tu n'y arrives pas, que tu n'es peut-être pas l'homme qu'il faut, qu'il te manque l'expérience de la vie.
Je vais te donner un moyen infaillible pour surmonter ces craintes (les tentations qui viennent du diable ou de ton manque de générosité!): "méprise-les", gomme de ta mémoire ces souvenirs. Voici vingt siècles que le Maître a tranché: "ne regarde pas en arrière!"

134 Nous devons cultiver dans notre âme une véritable horreur du péché. Seigneur! – répète-le d'un cœur contrit – que je ne t'offense plus! Mais ne t'effraie pas si tu ressens le poids de ce pauvre corps et des passions humaines: il serait sot et naïvement puéril de te rendre compte maintenant que "cela" existe. Ta misère ne doit pas être un obstacle, mais bien un stimulant qui te pousse à t'unir davantage à Dieu, à mettre toute ta constance à le rechercher, parce que c'est Lui qui nous purifie.

135 Si ton imagination bouillonne, si elle te centre sur toi-même, elle engendre des situations illusoires, des situations qui, d'ordinaire, ne sont pas compatibles avec ton chemin, qui te distraient stupidement, te refroidissent et t'écartent de la présence de Dieu. – Vanité! Si ton imagination revient sur les autres, tu tombes facilement dans la tentation de juger, alors que ce n'est pas ton rôle, et tu interprètes de façon terre à terre et peu objective leur comportement: jugements téméraires! Si ton imagination papillonne autour de tes propres talents et de tes manières de dire, ou sur le climat d'admiration que tu éveilles chez les autres, tu t'exposes à perdre ta droiture d'intention et à donner prise à l'orgueil.
D'ordinaire, on perd son temps quand on laisse courir son imagination. Mais, en outre, quand on ne la domine pas, elle ouvre la voie à toute une kyrielle de tentations volontaires.
– N'abandonne pas un seul jour ta mortification intérieure!

136 Ecarte cette sotte naïveté qui te fait croire que tu dois subir des tentations pour te sentir plus ferme sur ton chemin. Ce serait comme si tu désirais qu'on arrête ton cœur pour te prouver que tu veux vivre.

137 Ne dialogue pas avec la tentation. Laisse-moi te le redire: aie le courage de fuir, aie la force de ne pas jouer avec ta faiblesse, en te demandant jusqu'où tu pourrais tenir. Tranche, sans concession!

138 Tu n'as aucune excuse. C'est uniquement de ta faute. Si tu sais que sur ce sentier (et tu te connais suffisamment) avec ces lectures, avec ces fréquentations... tu peux finir dans le précipice, pourquoi t'obstines-tu à penser que c'est peut-être là un raccourci qui aide à ta formation ou qui fait mûrir ta personnalité? Change radicalement tes plans, même si cela suppose pour toi plus d'effort, moins de plaisirs à la portée de la main. Il est temps que tu te comportes en personne responsable.

139 Comme elle fait souffrir le Seigneur l'inconscience de cette foule d'hommes et de femmes, qui ne s'efforcent pas d'éviter les péchés véniels délibérés. C'est normal, pensent-ils pour se justifier, car nous tombons tous dans ces travers.
Ecoute-moi bien: la plus grande partie de cette populace qui a condamné le Christ et lui a donné la mort, elle a aussi commençé seulement par crier (comme les autres!) pour monter au Jardin des Oliviers, avec les autres!...
A la fin, poussés eux aussi par ce que "tous" faisaient, ils n'ont pas su ou n'ont pas voulu faire marche arrière..., et ils ont crucifié Jésus! – Maintenant, vingt siècles après, nous n'en avons toujours rien appris

140 Des hauts et des bas. Tu en as beaucoup, trop, des hauts et des bas! La raison en est claire: jusqu'ici, tu as mené une vie facile, et tu ne veux pas te rendre compte que du "désir" au "don de soi" il y a une distance considérable.

141 Comme tu dois te heurter nécessairement, tôt ou tard, à l'évidence de ta propre misère, je veux te prévenir contre quelques tentations que le diable te soufflera alors, et que tu devras rejeter immédiatement: la pensée que Dieu t'a oublié, que ton appel à l'apostolat est vain, ou que le poids de la douleur et des péchés du monde est supérieur à tes forces d'apôtre...
Dans cela, rien n'est vrai!

142 Si tu luttes vraiment, tu as besoin de faire ton examen de conscience.
Soigne cet examen quotidien: vois si tu ressens vraiment une douleur d'Amour, parce que tu ne traites pas Notre Seigneur comme tu le devrais.

143 De même que beaucoup de gens se rendent à la pose de "premières pierres" sans se soucier de l'achèvement futur de l'ouvrage commencé, de même les pécheurs se trompent eux-mêmes avec leurs "dernières fois".

144 Ne l'oublie pas, quand il s'agit de "couper" la "dernière fois" doit être la précédente, celle qui a déjà eu lieu.

145 Je te conseille d'essayer de revenir parfois... aux débuts de ta "première conversion": il ne s'agit pas de redevenir enfant, mais cela y ressemble beaucoup. Dans la vie spirituelle, il faut se laisser mener avec une entière confiance, sans peur ni duplicité; il faut parler avec une clarté absolue de ce que l'on a dans sa tête et dans son âme.

146 Comment vas-tu sortir de cet état de tiédeur, de langueur lamentable, si tu n'y mets pas les moyens? Tu luttes très peu et, quand tu fais un effort, tu le fais comme par colère et par malaise, presque avec le désir que tes faibles efforts ne produisent pas d'effet, pour t'autojustifier. Pour ne pas exiger plus de toi-même et pour que l'on n'exige pas davantage de toi.
– Tu es en train de faire ta volonté: et non pas celle de Dieu. Tant que tu ne changeras pas sérieusement, tu ne seras pas heureux et tu n'obtiendras pas la paix qui te manque maintenant.
– Humilie-toi devant Dieu, et essaie de vouloir pour de bon.

147 Quelle perte de temps et quelle vision trop humaine, lorsque l'on réduit tout à des tactiques, comme si c'était là le secret de l'efficacité! – C'est oublier que la "tactique" de Dieu est la charité, l'Amour sans limites: c'est ainsi qu'Il a comblé la distance infranchissable que l'homme interpose, par le péché, entre le Ciel et la terre.

148 Sois d'une sincérité "sauvage" dans ton examen de conscience. Il y faut du courage: tout comme tu te regardes dans la glace, pour savoir où tu t'es blessé, où tu t'es taché, où sont les défauts que tu dois éliminer.

149 Il me faut te prévenir contre une argutie de "satan" (oui, avec une minuscule, parce qu'il ne mérite pas plus) qui cherche à se servir des circonstances les plus normales pour nous faire dévier un peu ou beaucoup du chemin qui nous mène vers Dieu.
Si tu luttes, et plus encore si tu luttes vraiment, tu ne dois pas t'étonner de la fatigue ou de ce sentiment "d'avancer à rebrousse-poil", sans aucune consolation spirituelle ou humaine. Ecoute ce que l'on m'écrivait il y a longtemps, et que j'ai gardé en pensant à certains qui considèrent naïvement que la grâce fait abstraction de la nature: "Père, depuis quelques jours je me trouve dans un état de paresse et d'apathie terribles pour accomplir mon plan de vie; je fais tout en me forçant et en y mettant très peu de cœur. Priez pour moi, pour que cette crise passe vite, car elle me fait beaucoup souffrir quand je pense qu'elle peut m'écarter de mon chemin."
– Je me suis borné à te répondre: ne savais-tu pas que l'Amour exige le sacrifice? Lis lentement les paroles du Maître: "qui ne prend pas sa Croix "quotidie" – chaque jour – n'est pas digne de Moi". Et plus loin: "je ne vous laisserai pas orphelins...". Si Notre Seigneur permet que tu connaisses une telle aridité, et qui te pèse tant, c'est pour que tu L'aimes davantage, pour que tu n'aies confiance qu'en Lui, pour que, avec la Croix, tu sois corédempteur, pour que tu Le trouves.

150 Comme le diable semble peu intelligent! me commentais-tu. Je ne comprends pas sa stupidité: toujours les mêmes leurres, les mêmes embrouilles...
– Tu as parfaitement raison. Mais nous, les hommes, nous sommes moins intelligents, et nous n'apprenons pas à tirer profit de l'expérience d'autrui... Et satan compte sur tout cela pour nous tenter.

151 J'ai entendu dire, en certaine occasion, qu'un curieux phénomène se reproduit dans les grandes batailles. Bien que la victoire soit assurée d'avance grâce à la supériorité en nombre et en moyens, le moment vient, au plus fort du combat, où la défaite menace à cause de la faiblesse d'un secteur. Viennent alors les ordres impératifs du haut commandement, et l'on colmate les brèches sur le flanc en difficulté.
– J'ai pensé à toi et à moi. Avec Dieu, qui ne perd pas de batailles, nous serons toujours vainqueurs. C'est pourquoi, dans la lutte pour la sainteté, si tu te sens sans forces, écoute les ordres, prêtes-y attention, laisse-toi aider,... parce que Lui, Il ne se trompe pas.

152 Tu as ouvert sincèrement ton cœur à ton Directeur, tu lui as parlé en la présence de Dieu..., et quel bonheur que le tien de te voir trouver tout seul une réponse appropriée à tes tentatives d'évasion.
Aimons la direction spirituelle!

153 Je te l'accorde: ton comportement est droit... Mais laisse-moi être sincère envers toi – si tu continues d'aller au ralenti, d'une part tu n'es pas totalement heureux (reconnais-le) et puis tu restes encore très loin de la sainteté.
C'est pourquoi je te demande: ta conduite est-elle vraiment si droite? N'aurais-tu pas une fausse idée de la dignité?

154 En papillonnant ainsi: frivolité intérieure et extérieure, hésitations devant la tentation, et cette volonté qui ne veut pas, il est impossible que tu progresses dans la vie intérieure.

155 J'ai toujours pensé que ce que beaucoup baptisent "demain", "après", n'est autre que la résistance à la grâce.

156 Autre paradoxe du chemin spirituel: c'est l'âme qui a le moins besoin de réforme dans sa conduite qui s'efforce le plus de l'obtenir, qui ne s'arrête pas tant qu'elle n'y est pas parvenue. Et vice versa.

157 Parfois tu t'inventes des "problèmes" parce que tu ne vas pas à la racine de ton comportement.
– La seule chose dont tu aies besoin, c'est de changer résolument de front: accomplir loyalement ton devoir et suivre fidèlement les indications qui t'ont été données dans la direction spirituelle.

158 Tu as ressenti avec davantage de force l'urgence, "l'idée fixe" d'être saint; et tu as assumé ta lutte quotidienne sans hésitation, persuadé que tu dois extirper avec courage tout symptôme d'embourgeoisement.
Ensuite, tandis que tu parlais à Notre Seigneur dans ta prière, tu as compris avec tellement plus de clarté que lutte est synonyme d'Amour, et tu Lui as demandé un Amour plus grand, sans craindre le combat qui t'attend, parce que tu te battras pour Lui, avec Lui et en Lui.

159 Des complications? Sois sincère et reconnais que tu préfères être l'esclave de ton égoïsme à toi plutôt que de servir Dieu ou telle âme. – Cède!

160 "Beatus vir qui suffert tentationem..." – bienheureux l'homme qui subit l'épreuve car, après avoir été éprouvé, il recevra la couronne de Vie.
Quelle joie en toi, n'est-ce pas, quand tu vois ce sport intérieur devenir une source de paix qui ne se tarit jamais!

161 "Nunc cœpi!" En cet instant, je commence! tel est le cri de l'âme éprise qui, à chaque instant, qu'elle se soit montrée fidèle ou qu'elle ait manqué de générosité, renouvelle son désir de servir, son désir d'aimer notre Dieu dans une entière loyauté.

162 Tu as reçu un coup au cœur lorsque l'on t'a dit: toi, ce que tu cherches, ce n'est pas la conversion, mais un abri à tes misères..., pour continuer de traîner à ton aise cette triste charge, mais avec quel goût de fiel!

163 Tu ne sais pas si ce qui s'est emparé de toi est de l'épuisement physique ou une espèce de lassitude intérieure, ou les deux à la fois...; tu luttes sans lutter, sans le désir d'un authentique changement, pour transmettre la joie et l'amour du Christ aux âmes.
Je veux te rappeler les paroles claires du Saint-Esprit: seul sera couronné celui qui aura combattu, "legitime" – vraiment, malgré les "malgré".

164 Je pourrais mieux me comporter, agir avec plus de décision, répandre plus d'enthousiasme autour de moi... Pourquoi ne le fais-je pas? Pardonne ma franchise: parce que tu es un sot; le diable ne sait que trop qu'une des portes de l'âme les plus mal gardées est celle de la bêtise humaine: la vanité. C'est par là qu'il attaque de toutes ses forces: souvenirs pseudo-sentimentaux, complexe de la brebis galeuse qui te fait voir les choses de façon hystérique, impression d'un hypothétique manque de liberté...
Qu'attends-tu pour pénétrer les paroles du Maître: veillez et priez, car vous ne savez ni le jour ni l'heure?

165 Tu m'as fait ce commentaire d'un air fanfaron et peu assuré: les uns montent et les autres descendent... Et d'autres – comme moi! – sont affalés sur le chemin.
Ta nonchalance m'a rendu triste et j'ai ajouté: les fainéants sont traînés par ceux qui montent; et, d'ordinaire, ils sont remorqués avec plus de force par ceux qui descendent. Songe au pénible égarement dans lequel tu es en train de sombrer! Le saint évêque d'Hippone l'avait déjà signalé: ne pas avancer, c'est reculer.

166 Il y a dans ta vie deux pièces qui ne s'emboîtent pas: la tête et le sentiment.
A la lumière de la foi, ton intelligence te montre pleinement non seulement le chemin, mais la différence entre les parcours, héroïque ou stupide, que l'on peut y faire. Surtout, elle te place devant la grandeur et la beauté divine des entreprises que la Trinité confie à nos mains.
Le sentiment, en revanche, s'attache à tout ce que tu méprises, et même quand tu le considères comme méprisable. C'est comme si mille bêtises guettaient la moindre occasion. Et aussitôt que, par fatigue physique ou par perte de la vision surnaturelle, ta pauvre volonté s'affaiblit, ces petitesses s'accumulent, s'agitent dans ton imagination jusqu'à former une montagne qui t'opprime et te décourage: les difficultés du travail; la résistance à obéir; le manque de moyens; les feux de bengale d'une vie facile; de petites et de grandes tentations répugnantes; des poussées de sensiblerie; la fatigue; le goût amer de la médiocrité spirituelle... Et, parfois aussi, la peur: la peur, parce que tu sais que Dieu veut que tu sois saint et que tu ne l'es pas.
Permets-moi de te parler crûment. Tu n'as que trop de "raisons" pour regarder en arrière, et il te manque l'audace pour répondre à la grâce qu'Il t'accorde, parce qu'Il t'a appelé pour être un autre Christ, "ipse Christus!" (le Christ lui-même). Tu as oublié l'avertissement de Notre Seigneur à l'Apôtre: "ma grâce te suffit!" c'est une confirmation que: si tu le veux, tu le peux.

167 Rattrape le temps que tu as perdu pour t'être reposé sur les lauriers de ta propre complaisance, te croyant un honnête homme, comme s'il suffisait d'avancer à ton rythme, sans voler ni tuer.
Accélère le rythme de ta piété et de ton travail: il te reste encore tant de chemin à parcourir! entends-toi bien avec tous, également avec ceux qui te gênent; et efforce-toi d'aimer (pour les servir!) ceux que tu méprisais auparavant.

168 Dans la confession, tu as montré tes misères passées, pleines de pus. Et le prêtre a agi dans ton âme comme un bon médecin, comme un médecin honnête: il a coupé là où c'était nécessaire, et il n'a pas permis que la blessure se referme tant que tout n'était pas nettoyé. – Alors, remercie-le.

169 Quels excellents résultats, quand l'on se lance dans des choses sérieuses, avec un esprit sportif... J'ai raté plusieurs coups? – D'accord, mais, si je persévère, à la fin je gagnerai.

170 Convertis-toi maintenant, quand tu te sens encore jeune... Qu'il est difficile de se corriger lorsque l'âme a vieilli!

171 "Felix culpa", chante l'Église... bénie soit ton erreur – je te le redis à l'oreille – si elle t'a servi à ne pas tomber de nouveau et si elle t'a servi à mieux comprendre, à mieux aider ton prochain, qui n'est pas d'une plus mauvaise graine que toi

172 Est-il possible, me demandes-tu après avoir repoussé cette tentation, est-il possible, Seigneur, que je sois moi... cet autre-là?

173 Je vais te résumer ton histoire clinique: là je tombe et ici je me relève... C'est ce dernier point qui est important. – Eh bien, poursuis cette lutte intérieure, même si tu avances à pas de tortue. En avant! – Tu vois bien, mon enfant, jusqu'où tu peux arriver si tu ne luttes pas; l'abîme attire d'autres abîmes.

174 Tu es tout honteux devant Dieu et devant les autres. Tu as découvert en toi une pourriture ancienne et renouvelée: il n'y a pas d'instinct ni de mauvaise tendance que tu n'éprouves à fleur de peau... et tu discernes dans ton cœur le nuage de l'incertitude. En plus, la tentation apparaît quand tu le veux ou t'y attends le moins, quand ta volonté faiblit à cause de la fatigue.
– Tu ne sais plus si cela t'humilie, bien que tu souffres de te voir ainsi... Mais souffre pour Lui, par Amour pour Lui. Cette amoureuse contrition t'aidera à demeurer vigilant, parce que la lutte durera tant que nous vivrons.

175 Tu brûles du grand désir de sceller de nouveau le don de toi que tu as fait en son temps: te savoir enfant de Dieu et vivre comme tel! – Mets dans les mains du Seigneur tes nombreuses misères et infidélités. C'est d'ailleurs la seule façon d'en alléger le poids.

176 Renouvellement n'est pas relâchement.

177 Jours de retraite. Recueillement pour connaître Dieu, pour te connaître et ainsi progresser. Un temps nécessaire pour découvrir en quoi et comment il faut changer: que dois-je faire? que dois-je éviter?

178 Que ce qui est arrivé l'an dernier ne se renouvelle pas.
– "Comment s'est passée la retraite?"> t'a-t-on demandé. Et tu as répondu: "Nous nous sommes fort bien reposés."

179 Jours de silence et de grâce intense... Prière face à face avec Dieu...
J'ai exulté en actions de grâce, en voyant ces personnes, graves en raison de leur âge et de leur expérience, s'ouvrir aux touches divines et y répondre comme des enfants. Quel enthousiasme que le leur, à l'idée de pouvoir encore faire de leur vie quelque chose d'utile..., qui efface tous leurs égarements et tous leurs oublis.
– En me rappelant cette scène, je t'ai recommandé instamment: ne néglige pas ta lutte dans la vie de piété.

180 "Auxilium christianorum!" – Secours des chrétiens, disent avec assurance les litanies de la Sainte Vierge. As-tu essayé de répéter cette oraison jaculatoire dans les moments difficiles? Si tu le fais plein de foi, et avec la tendresse d'une fille ou d'un fils, tu constateras l'efficacité de l'intercession de ta Mère Sainte Marie, qui te mènera à la victoire.

 «    PECHEURS D'HOMMES    » 

181 Tout en parlant, nous apercevions les terres de ce continent. – Tes yeux se sont inondés de lumière, ton âme s'est remplie d'impatience et, songeant à ces peuples, tu m'as dit: "est-il possible que, de l'autre côté de ces mers, la grâce de Dieu se montre inefficace?"
Puis tu t'es donné toi-même la réponse: Il veut, dans sa bonté infinie, se servir d'instruments dociles.

182 Quelle compassion ils t'inspirent!... Tu voudrais leur crier qu'ils sont en train de perdre leur temps... Pourquoi sont-ils aussi aveugles et ne perçoivent-ils pas ce que toi, un misérable, tu as vu? Pourquoi ne préféreraient-ils pas ce qu'il y a de mieux? – Prie, mortifie-toi, et ensuite (tu en as l'obligation!) réveille-les un à un, en leur expliquant (également un à un) que, tout comme toi, ils peuvent découvrir un chemin divin, sans abandonner la place qu'ils occupent dans la société.

183 Tu as commencé avec beaucoup d'entrain. Mais, peu à peu, tu as flanché... et tu finiras par t'enfermer dans ta pauvre carapace si tu continues à rétrécir ton horizon.
– Tu dois élargir de plus en plus ton cœur grâce à tes désirs apostoliques: sur cent âmes, cent nous intéressent!

184 Remercie Notre Seigneur pour la délicatesse continuelle, paternelle et maternelle, avec laquelle Il te conduit.
Toi, qui as toujours rêvé de grandes aventures, tu t'es engagé dans une entreprise formidable..., qui te mène à la sainteté.
J'insiste: remercie Dieu par une vie d'apostolat.

185 Lorsque tu te lances dans l'apostolat, sois convaincu qu'il s'agit toujours de rendre les gens heureux, très heureux: la Vérité est inséparable de la joie authentique.

186 Des personnes de diverses nations, de différentes races, de milieux et de professions extrêmement variés... Lorsque tu leur parles de Dieu, tu touches du doigt la valeur humaine et surnaturelle de ta vocation d'apôtre. C'est comme si tu revivais, dans toute sa réalité, le miracle de la première prédication des disciples du Seigneur: des phrases prononcées en une langue étrangère, indiquant un chemin nouveau, ont été entendues par chacun au fond de son cœur, dans sa propre langue. Et dans ta tête revit, avec une vigueur nouvelle, la scène où "Parthes, Mèdes et Elamites..." heureux, très heureux, se sont approchés de Dieu.

187 Ecoute-moi bien et fais écho à ma voix: le christianisme est Amour; le commerce avec Dieu est un dialogue éminemment positif; se préoccuper des autres (l'apostolat) n'est pas un luxe, ou une occupation réservée à un petit nombre.
– Maintenant que tu le sais, remplis-toi de joie, parce que ta vie a acquis un sens complètement différent, et montre-toi conséquent.

188 Naturel, sincérité, joie: voilà des conditions indispensables à un apôtre, pour qu'il attire les gens.

189 La façon dont Jésus a appelé les douze premiers ne pouvait être plus simple: "viens et suis-moi".
Toi, qui cherches tant d'excuses pour ne pas poursuivre ce travail, voici une considération qui te va comme un gant: le savoir de ces douze premiers était tout à fait dérisoire; et pourtant, comme ils ont remué ceux qui les écoutaient! – N'oublie pas ceci: le travail, c'est Lui qui continue de le faire, en se servant de chacun de nous.

190 Les vocations d'apôtres, c'est Dieu qui les envoie. Mais tu ne dois pas négliger pour autant les moyens: la prière, la mortification, l'étude ou le travail, l'amitié, la vision surnaturelle...! la vie intérieure!

191 Quand je te parle "d'apostolat d'amitié", je me réfère à une amitié "personnelle", sacrifiée, sincère: être à tu et à toi, parler à cœur ouvert.

192 Dans l'apostolat d'amitié et de confidence, le premier pas c'est la compréhension, l'esprit de service,... et la sainte intransigeance dans la doctrine.

193 Ceux qui ont trouvé le Christ ne peuvent pas s'enfermer dans leur milieu: ce rétrécissement serait une triste chose! Ils doivent s'ouvrir en éventail pour parvenir à toutes les âmes. Chacun doit se créer, et élargir un cercle d'amis, sur lequel il puisse avoir une influence grâce à son prestige professionnel, à sa conduite, à son amitié, pour que le Christ ait une influence à travers ce prestige professionnel, cette conduite, cette amitié.

194 Tu dois être une braise ardente qui, partout, propage le feu. Et quand un milieu ne peut pas brûler, tu dois en élever la température spirituelle.
– Sinon, tu perds pitoyablement ton temps et tu le fais perdre à ceux qui t'entourent.

195 Lorsqu'on a du zèle pour les âmes, on trouve toujours des gens bien disposés, on découvre toujours un terrain fertile. Il n'y a pas d'excuse!

196 Sois-en convaincu: là aussi, il y en a beaucoup qui peuvent comprendre ton chemin, des âmes qui (consciemment ou inconsciemment) cherchent le Christ et ne le trouvent pas. Mais "comment entendront-ils parler de Lui, si personne ne leur en parle"?

197 Ne me fais pas croire que tu prends soin de ta vie intérieure, si tu ne fais pas un apostolat intense, ininterrompu: Notre Seigneur (et tu m'assures que tu Le fréquentes) veut que tous les hommes soient sauvés.

198 Ce chemin est très difficile, t'a-t-il dit. Et, en l'écoutant, plein de fierté, tu as acquiescé en te rappelant que la Croix est le signe certain du véritable chemin... Mais ton ami n'a fait attention qu'à la partie ingrate du sentier, sans tenir compte de la promesse de Jésus: "mon joug est doux".
Rappelle-le-lui, car il se donnera peut-être à Dieu lorsqu'il le saura

199 Il n'a pas de temps?... Eh bien, tant mieux. Ce sont précisément ceux qui n'ont pas de temps qui intéressent le Christ

200 En considérant le nombre élevé de ceux qui ratent la grande occasion, et laissent passer Jésus au loin, réfléchis: d'où me vient cet appel si clair, si providentiel, qui m'a montré mon chemin? – Médite ceci chaque jour: l'apôtre doit être toujours un autre Christ, le Christ lui-même.

201 Ne t'étonne pas, ne te décourage pas si celui-là t'a reproché que tu l'aies, toi, confronté au Christ, et s'il a ajouté, indigné: "je ne peux plus vivre tranquille sans prendre une décision..."
Prie pour lui... Il est inutile de chercher à le tranquilliser: peut-être une vieille inquiétude est-elle revenue au premier plan: la voix de sa conscience.

202 Ils se scandalisent parce que tu parles de don de soi à ceux qui n'avaient jamais songé à ce problème?...
– Bon! et alors? ta vocation n'est-elle pas d'être un apôtre d'apôtres?

203 Tu ne touches pas les gens, parce que tu parles une "langue" différente. Je te conseille le naturel.
Ta formation est si artificielle!

204 Tu hésites à te lancer à parler de Dieu, de la vie chrétienne, de la vocation... parce que tu ne veux pas faire souffrir? Tu oublies que ce n'est pas toi qui appelles les gens, mais Lui: "ego scio quos elegerim" – je connais bien ceux que j'ai choisis.
En outre, j'aurai de la peine si ces faux respects cachaient la facilité ou la tiédeur: au point où nous en sommes, tu préfères une pauvre amitié humaine à l'amitié de Dieu?

205 Tu as eu une conversation avec celui-ci, celui-là, et aussi cet autre, parce que le zèle pour les âmes te dévore.
Celui-là a pris peur; cet autre a demandé l'avis d'un "prudent" qui l'a mal orienté... – Persévère: par la suite que nul ne puisse s'excuser en affirmant "quia nemo nos conduxit" – personne ne nous a appelés.

206 Je comprends ta sainte impatience, mais en même temps tu dois considérer que certains ont besoin de réfléchir beaucoup, que d'autres répondront, le temps aidant... Attends-les les bras ouverts: joins à ta sainte impatience une prière et une mortification abondantes. – Ils viendront, plus jeunes et plus généreux; ils se seront débarrassés de leur embourgeoisement et ils seront plus courageux.
Dieu: comme Il les attend!

207 La foi est une condition indispensable à l'apostolat: bien souvent, elle se manifeste dans la constance pour parler de Dieu, même si les fruits tardent à venir.
Si nous persévérons, si nous insistons, bien convaincus que le Seigneur le veut, on remarquera aussi autour de toi, de tous côtés, les symptômes d'une révolution chrétienne: les uns se donneront, d'autres prendront au sérieux leur vie intérieure, et d'autres (les plus faibles) seront au moins prévenus.

208 Jours de véritable allégresse: trois de plus! Ces paroles de Jésus s'accomplissent: "La gloire de mon Père est que vous portiez beaucoup de fruits et que vous soyez mes disciples."

209 Tu m'as fait sourire, parce que je te comprends très bien, quand tu m'as dit: je m'enthousiasme à l'idée d'aller dans de nouveaux pays, pour ouvrir une brèche, très loin peut-être... Je devrais même me renseigner pour savoir s'il y a des hommes sur la lune.
– Demande au Seigneur d'augmenter en toi ce zèle apostolique.

210 Parfois, en présence de ces âmes endormies, il naît en nous le désir fou de crier, de les secouer, de les faire réagir, pour qu'elles émergent de cette terrible torpeur dans laquelle elles se trouvent plongées. Il est si triste de les voir marcher à l'aveuglette, sans trouver leur chemin! – Comme je comprends les pleurs de Jésus sur Jérusalem, fruit de sa charité parfaite..

211 Creuse chaque jour davantage la profondeur apostolique de ta vocation chrétienne. Pour que toi et moi nous proclamions ceci à l'oreille des hommes: voici vingt siècles qu'Il a institué un bureau de recrutement, ouvert à tous ceux qui ont un cœur sincère et la capacité d'aimer... Voudrais-tu des appels plus clairs que le "ignem veni mittere in terram" (je suis venu apporter le feu sur la terre), et la considération de ces deux milliards cinq-cents millions d'âmes qui ne connaissent pas encore le Christ?

212 "Hominem non habeo" – je n'ai personne qui m'aide. – C'est ce que pourraient affirmer malheureusement bien des malades et des paralytiques de l'esprit, qui peuvent servir... et doivent servir.
Seigneur, que jamais je ne demeure indifférent devant les âmes.

213 Aide-moi à réclamer une nouvelle Pentecôte qui embrase encore une fois la terre.

214 "Si l'un de ceux qui me suivent ne hait pas son père, sa mère, sa femme, ses enfants, ses frères et sœurs, et jusqu'à sa propre vie, il ne peut être mon disciple."
Je vois de plus en plus clairement, Seigneur, que les liens du sang, s'ils ne passent pas par ton Cœur très aimable, sont, pour les uns un motif permanent de croix; pour d'autres encore, une source de tentations, plus ou moins directes, contre leur persévérance; pour d'autres, la cause d'une inefficacité totale; et, pour tous, un poids qui leste le don total de soi.

215 Le soc, qui laboure et ouvre le sillon, ne voit ni la semence ni le fruit.

216 Depuis que tu as pris ta décision, tu fais chaque jour une nouvelle découverte. Tu te souviens de naguère, lorsque tu te demandais constamment: "et ceci, comment le ferai-je?"... pour garder ensuite tes doutes ou tes déceptions...
A présent tu trouves toujours la réponse exacte, raisonnée et claire. Et, en entendant la façon dont on répond à tes questions, parfois puériles, il t'arrive de penser: "c'est ainsi que Jésus a dû s'occuper des Douze premiers".

217 Des vocations, Seigneur, davantage de vocations! Peu m'importe que la graine ait été jetée par moi ou par un autre; c'est Toi, Jésus, qui as semé par nos mains! je sais seulement que Tu nous as promis la maturité du fruit: "et fructus vester maneat!" – et votre fruit restera.

218 Sois clair. S'ils te disent que tu vas "les pêcher", réponds-leur que oui, que c'est ce que tu désires Mais..., qu'ils ne se tracassent pas! Parce que s'ils n'ont pas la vocation (si Lui ne les appelle pas) ils ne viendront pas; et s'ils l'ont, quelle honte de finir comme le jeune homme riche de l'Evangile: seuls et tristes.

219 Comme il est grand et beau, ton travail d'apôtre! Tu te trouves au confluent de la grâce et de la liberté des âmes; et tu assistes au moment très solennel de la vie de certains hommes: leur rencontre avec le Christ.

220 Il semble que l'on vous a choisis un à un..., disait-il.
– Et c'est bien cela!

221 Sois-en convaincu: tu as besoin de bien te former, en pensant à l'avalanche de gens qui viendront à nous, avec cette question précise et exigeante: "Bon; que faut-il faire?"

222 Une recette efficace pour ton esprit apostolique: faire des plans précis, non pas d'une semaine sur l'autre, mais aujourd'hui pour demain; et maintenant pour tout à l'heure.

223 Le Christ attend beaucoup de ton travail. Mais tu dois aller à la recherche des âmes, tout comme le Bon Pasteur s'en est allé chercher la centième brebis: sans attendre qu'on t'appelle. Ensuite, sers-toi de tes amis pour faire du bien à d'autres: personne ne peut se contenter (dis-le à chacun d'entre eux) d'une vie spirituelle qui, l'ayant comblé, ne déborderait pas en zèle apostolique.

224 Il n'est pas tolérable que tu perdes ton temps avec "tes sottises", alors que tellement d'âmes t'attendent.

225 Apostolat de la doctrine: ce sera toujours ton apostolat.

226 Voilà la merveille de la Pentecôte: la consécration de tous les chemins, qui ne peut jamais être interprétée comme un monopole, comme la mise en valeur d'un seul, au détriment des autres.
La Pentecôte, c'est une infinie variété de langues, de méthodes, de façons de rencontrer Dieu: et non pas une violente uniformité

227 Tu m'écrivais: un jeune homme s'est joint à notre groupe; il faisait route vers le nord. Il était mineur de fond. Il chantait très bien, et il s'est mêlé à notre chœur. J'ai prié pour lui jusqu'au moment où il est arrivé à la gare où il devait descendre. Lorsqu'il a pris congé de nous, il a fait ce commentaire: "comme j'aimerais poursuivre le voyage avec vous".
– Je me suis souvenu aussitôt du "mane nobiscum!" – "reste avec nous, Seigneur!" et, plein de foi, je Lui ai demandé de nouveau que les autres "Le voient" en chacun de nous, qui sommes des compagnons sur "leur chemin".

228 C'est par "le sentier d'un mécontentement juste" que les masses sont parties et qu'elles sont en train de partir.
Comme cela fait mal!... mais combien de gens déçus avons-nous fabriqués, parmi ceux qui se trouvent spirituellement ou matériellement dans le besoin! – Il faut introduire de nouveau le Christ parmi les pauvres et les humbles: c'est précisément chez eux qu'Il se trouve le plus à l'aise.

229 Professeur: aie à cœur de faire comprendre à tes élèves, en peu de temps, ce qui t'a demandé des heures d'étude pour arriver à y voir clair.

230 Le désir d'"enseigner", et d'"enseigner" de tout son cœur, suscite chez les élèves une reconnaissance qui constitue un bon terrain pour l'apostolat.

231 J'aime cette devise: "que chaque voyageur suive son chemin", celui que Dieu lui a tracé, avec fidélité, avec amour, même s'il lui en coûte.

232 Quelle leçon extraordinaire dans chaque enseignement du Nouveau Testament! Après que le Maître – tandis qu'Il monte à la droite de Dieu le Père – leur eût dit: "Allez, enseignez toutes les nations", les disciples ont trouvé la paix. Mais ils ont encore des doutes: ils ne savent que faire et ils se réunissent autour de Marie, la Reine des Apôtres, pour devenir les hérauts pleins de zèle de la Vérité qui sauvera le monde.

 «    SOUFFRANCE    » 

233 Tu me disais que certaines scènes de la vie de Jésus te touchent particulièrement: lorsqu'Il rencontre des hommes qui sont à vif..., lorsqu'Il apporte la paix et la santé à ceux dont l'âme et le corps sont brisés de douleur... Tu t'enthousiasmes, insistais-tu, en Le voyant guérir la lèpre, faire recouvrer la vue, rendre la santé au paralytique de la piscine: ce pauvre homme dont nul ne se souvient. Tu Le contemples alors: si profondément humain tellement à ta portée! – Eh bien..., Il est toujours le Jésus d'alors.

234 Tu as demandé à Notre Seigneur de te laisser souffrir un peu pour Lui. Mais ensuite, quand est venue l'épreuve, sous une forme si humaine, si normale (difficultés et problèmes familiaux..., ou encore ces mille petitesses de la vie courante) il t'en a coûté de voir le Christ derrière tout cela. – Ouvre docilement tes mains à ces clous..., et ta douleur deviendra ta joie.

235 Ne te plains pas si tu souffres. On polit la pierre que l'on estime, celle qui a de la valeur.
Cela te fait mal? – Laisse-toi tailler, et sois reconnaissant parce que Dieu t'a pris dans ses doigts comme un diamant... Ce n'est pas un vulgaire caillou que l'on travaille ainsi.

236 Ceux qui fuient lâchement la souffrance ont matière à méditer quand ils voient avec quel enthousiasme d'autres âmes embrassent la douleur.
Les hommes et les femmes qui savent souffrir chrétiennement ne sont pas en si petit nombre. Suivons leur exemple.

237 Tu te plains?... et tu m'expliques comme si tu avais raison: une piqûre!... Une autre! – Mais ne te rends-tu pas compte qu'il est stupide de s'étonner qu'il y ait des épines parmi les roses?

238 Permets-moi de te dire encore, comme je l'ai fait jusqu'à présent, en confidence: il me suffit d'avoir devant moi un Crucifix, pour ne pas oser parler de mes souffrances... Et il ne me gêne pas d'ajouter que j'ai beaucoup souffert, toujours joyeusement souffert.

239 Ils ne te comprennent pas? Lui, Il était la Vérité et la Lumière, mais les siens ne L'ont pas non plus compris. – Comme je te l'ai fait considérer si souvent, rappelle-toi ces paroles de Notre Seigneur: "le disciple n'est pas au-dessus de son Maître".

240 Pour un enfant de Dieu, les contradictions et les calomnies sont, comme pour un soldat, des blessures reçues sur le champ de bataille.

241 On te malmène... Ta réputation? Quelle importance?
De toute façon, n'éprouve ni honte ni peine pour toi, mais pour eux: pour ceux qui te maltraitent.

242 Parfois ils ne veulent pas comprendre: ils sont comme aveuglés... Mais, d'autres fois, c'est toi qui n'as pas réussi à te faire comprendre: corrige-toi!

243 Il ne suffit pas d'avoir raison. Il faut aussi le faire valoir... et que les autres veuillent bien le reconnaître.
Toutefois, sois ferme à soutenir la vérité chaque fois qu'il le faut, sans t'arrêter au "qu'en dira-t-on?"

244 Si tu fréquentes l'école du Maître, tu ne seras pas étonné de devoir également te battre contre l'incompréhension de tant et tant de personnes qui pourraient énormément t'aider, rien qu'en faisant un tout petit effort de compréhension.

245 Tu ne l'as pas maltraité au sens physique du terme... Mais tu l'as bien souvent ignoré; tu l'as considéré avec indifférence, comme on regarde un étranger.
– Est-ce que cela te semble peu?

246 Sans le vouloir, ceux qui persécutent sanctifient... – Mais, malheur à ces "sanctificateurs-là!"

247 Sur cette terre, on vous paie très souvent avec des calomnies.

248 Il est des âmes qui semblent s'obstiner à s'inventer des souffrances, en se tourmentant par l'imagination.
Ensuite, quand surviennent des peines et des contradictions objectives, elles ne savent pas demeurer, telle la Sainte Vierge, au pied de la Croix, le regard fixé sur son Fils.

249 Sacrifice! Sacrifice! – Il est vrai que suivre Jésus-Christ (et c'est Lui-même qui l'a dit) veut dire porter sa Croix. Mais je n'aime pas entendre les âmes qui se sont éprises de Notre Seigneur parler à ce point de croix et de renoncements: lorsqu'il y a l'Amour, le sacrifice est joyeux, même s'il en coûte, et la croix, c'est la Sainte Croix.
– L'âme qui sait aimer et se donner ainsi, se remplit de joie et de paix. Alors à quoi bon insister sur le "sacrifice", comme pour y chercher une consolation, puisque la Croix du Christ – qui est ta vie – te rend heureux?

250 Que de neurasthénie et d'hystérie l'on ferait disparaître si, grâce à la doctrine catholique, on apprenait véritablement aux gens à vivre en chrétiens: aimer Dieu et savoir accepter les contrariétés comme une bénédiction venue de sa main!

251 Ne passe pas indifférent devant la douleur d'autrui. Cette personne (un parent, un ami, un collègue..., cette autre que tu ne connais pas) est ton frère.
Souviens-toi de l'Evangile où si souvent tu as lu avec tristesse que même les proches de Jésus n'avaient pas confiance en Lui. Veilles-y: que cette scène ne se reproduise pas.

252 Imagine qu'il n'existe que Dieu et toi sur terre.
– Il te sera ainsi plus facile de supporter les mortifications, les humiliations... Et, en définitive, tu feras les choses que Dieu veut et telles qu'Il les veut.

253 Ce malade dévoré de zèle pour les âmes faisait ce commentaire: le corps proteste un peu, se plaint. Mais j'essaie aussi de transformer "ces plaintes" en sourires, parce qu'alors, elles deviennent très efficaces.

254 Une maladie incurable limitait son action. Et pourtant, plein de joie, il me donnait cette assurance: "ma maladie se conduit bien à mon égard et je l'aime de plus en plus; si on m'en laissait le choix, je renaîtrais cent fois de la sorte!"

255 Jésus est parvenu à la Croix après s'y être préparé trente-trois années durant, toute sa vie! – Ses disciples, s'ils désirent vraiment l'imiter doivent transformer leur existence en co-rédemption d'Amour, par leur renoncement personnel, actif et passif.

256 La Croix est partout présente et elle survient quand on s'y attend le moins. – Mais n'oublie pas que, d'ordinaire, le commencement de la Croix et le commencement de l'efficacité vont de pair.

257 Le Seigneur, Prêtre Eternel, bénit toujours au moyen de la Croix.

258 "Cor Mariae perdolentis, miserere nobis!" Invoque sans crainte le Cœur de Sainte Marie, décidé à t'unir à sa douleur, en réparation pour tes péchés et pour ceux des hommes de tous les temps.
– Et, pour chaque âme, demande-lui que sa douleur augmente en nous l'aversion du péché, que nous sachions aimer, à titre d'expiation, les contrariétés physiques ou morales de chaque jour.

 «    HUMILITÉ    » 

259 "La prière" est l'humilité de l'homme qui reconnaît en même temps sa profonde misère et la grandeur de Dieu, à qui il s'adresse et qu'il adore, de sorte qu'il attend tout de Lui et rien de lui-même.
"La foi" est l'humilité de la raison, qui renonce à son propre critère et qui se prosterne devant les jugements et l'autorité de l'Église.
"L'obéissance" est l'humilité de la volonté, qui s'assujettit à la volonté d'autrui, pour Dieu.
"La chasteté" est l'humilité de la chair, qui se soumet à l'esprit.
"La mortification" extérieure est l'humilité des sens.
"La pénitence" est l'humilité de toutes les passions, immolées au Seigneur.
– L'humilité, c'est la vérité sur le chemin de la lutte ascétique.

260 Quelle grande chose que de savoir que l'on n'est rien devant Dieu, puisqu'il en est ainsi!

261 "Apprenez de moi, qui suis doux et humble de cœur..." Humilité de Jésus!... Quelle leçon pour toi, qui es un pauvre instrument d'argile! Lui, toujours miséricordieux, Il t'a relevé, faisant briller dans ta bassesse, gratuitement exaltée, les feux du soleil de la grâce. Et toi, combien de fois as-tu déguisé ton orgueil sous des apparences de dignité, de justice...! Et combien d'occasions n'as-tu pas gaspillées d'apprendre du Maître, pour ne pas avoir su les surnaturaliser!

262 Ces abattements, parce que tu vois ou parce qu'on découvre tes défauts, n'ont pas de raison d'être...
– Demande la véritable humilité.

263 Laisse-moi te rappeler quelques signes évidents, entre autres, du manque d'humilité:
– penser que ce que tu fais ou dis vaut plus que ce que disent ou font les autres;
– vouloir toujours avoir gain de cause;
– discuter sans raison ou, quand tu as raison, insister avec entêtement et de manière désagréable;
– donner ton avis sans qu'on te le demande et sans que la charité l'exige;
– mépriser le point de vue des autres;
– ne pas considérer que tes dons et qualités te sont prêtés;
– ne pas reconnaître que tu es indigne de tout honneur et estime, même ceux qui viennent de la terre que tu foules et des choses que tu possèdes;
– te citer comme exemple dans les conversations;
– parler mal de toi-même, pour que l'on se fasse une bonne idée de toi ou que l'on te contredise;
– t'excuser lorsqu'on te réprimande;
– cacher à ton Directeur quelques fautes humiliantes, pour qu'il ne modifie pas la bonne opinion qu'il a de toi;
– écouter avec complaisance ceux qui te louent, ou te réjouir que l'on ait bien parlé de toi;
– t'attrister que d'autres soient plus estimés que toi;
– te refuser à réaliser des tâches subalternes;
– chercher à te singulariser ou désirer le faire;
– glisser dans la conversation des paroles élogieuses à ton égard ou qui laissent entrevoir ton intégrité, ton intelligence ou ton adresse, ta réputation professionnelle...;
– avoir honte parce que tu manques de certains biens...

264 Etre humble, ce n'est pas ressentir l'angoisse ou la crainte.

265 Fuyons cette fausse humilité qui n'est que facilité.

266 Pierre lui dit: Toi, Seigneur, me laver les pieds à moi! Jésus répondit: ce que je fais, moi, tu ne le comprends pas pour le moment; tu le comprendras par la suite. Pierre insiste: jamais tu ne me laveras les pieds! Jésus répliqua: si je ne te lave pas, tu n'auras pas de part avec moi. Simon Pierre se rend: alors, Seigneur, non seulement les pieds, mais aussi les mains et la tête.
En présence d'un appel à un don total, complet, sans hésitations, nous opposons bien souvent une fausse modestie, comme celle de Pierre... Ah si nous étions, nous aussi des hommes de cœur, comme l'Apôtre! Pierre ne permet à personne d'aimer Jésus plus que lui. Cet amour le pousse à réagir ainsi: me voici! lave-moi les mains, la tête, les pieds! purifie-moi tout entier! car je veux me livrer à Toi sans réserve.

267 A ton intention, je transcris ce passage d'une lettre: "l'humilité évangélique m'enchante. Mais elle me révolte, la timidité moutonnière et inconsciente de certains chrétiens, qui ainsi discréditent l'Église. C'est sans doute en pensant à eux que tel écrivain athée disait que la morale chrétienne est une morale d'esclaves..." En réalité, nous sommes des serviteurs: des serviteurs élevés au rang d'enfants de Dieu, qui ne veulent pas se conduire en esclaves de leurs passions.

268 La conviction que tu es pétri d'une "mauvaise pâte" (c'est-à-dire la connaissance que tu as de toi-même) te donnera cette réaction surnaturelle qui, face à l'humiliation, au mépris, à la calomnie fera que la joie et la paix s'enracineront de plus en plus dans ton âme...
Après le "fiat" (Seigneur, ce que Tu voudras) ton raisonnement dans ces cas-là devra être: "c'est tout ce qu'il a dit? On voit qu'il ne me connaît pas; sinon, il n'en serait certainement pas resté là."
Convaincu de mériter un plus mauvais traitement, tu éprouveras de la gratitude envers cette personne, et tu te réjouiras de ce qui ferait souffrir un autre.

269 Plus la statue s'élève, plus dur et dangereux sera le choc lors de sa chute.

270 Aie recours à la direction spirituelle avec toujours plus d'humilité. Et sois ponctuel, ce qui est aussi de l'humilité.
Penses-y – c'est par là que Dieu te parle, donc tu ne te trompes pas – que tu es comme un petit enfant, sincère, à qui l'on apprend progressivement à parler, à lire, à connaître les fleurs et les oiseaux, à vivre les joies et les peines, à faire attention à l'endroit où il marche.

271 "Je suis toujours une pauvre créature", me dis-tu. Mais auparavant, quand tu le constatais, quel mauvais moment tu passais! A présent, sans pour autant t'y habituer, ni céder, tu t'accoutumes à sourire et à recommencer à lutter avec une joie grandissante.

272 Si tu es sensé, si tu es humble, tu as dû remarquer que l'on n'en finit jamais d'apprendre... Il en va pareillement dans la vie; même les gens les plus savants ont quelque chose à apprendre jusqu'à la fin de leur vie; sinon, ils cessent d'être savants.

273 Mon bon Jésus, puisque je dois être apôtre, il est nécessaire que tu me rendes très humble.
Le soleil enveloppe de lumière tout ce qu'il touche: Seigneur, remplis-moi de ta clarté, divinise-moi; que je m'identifie à ton adorable Volonté, pour me transformer en l'instrument que tu désires... Donne-moi ta folie d'humiliation: celle qui t'a conduit à naître dans la pauvreté, à faire un travail sans éclat, à mourir dans l'infamie, cloué sur un morceau de bois, à t'anéantir dans le Tabernacle.
– Que je me connaisse: que je me connaisse et que je te connaisse. Ainsi jamais je ne perdrai de vue mon néant.

274 Seuls les sots sont têtus, et les grands sots, très têtus.

275 N'oublie pas que, dans les affaires humaines, les autres aussi peuvent avoir raison: ils voient la même affaire que toi, mais d'un point de vue différent, sous une autre lumière, une autre ombre, un autre contour.
– Ce n'est qu'en matière de foi et de morale qu'il existe un critère indiscutable: celui de notre Mère l'Église.

276 Qu'il est bon de savoir se corriger!... Et qu'ils sont peu nombreux ceux qui acquièrent cette science-là!

277 Plutôt que de manquer à la charité, cède: dans la mesure du possible, évite de tenir tête... Aie l'humilité de l'herbe qui s'écrase sans s'apercevoir du pied qui la foule.

278 La conversion, on y monte par l'humilité, par des sentiers où l'on s'abaisse.

279 Tu me disais: "il faut décapiter le 'moi'!..." – Mais, comme il en coûte, n'est-ce pas?

280 Bien souvent il faut se faire violence, pour s'humilier et pour redire vraiment au Seigneur: "serviam!" – je te servirai.

281 "Memento, homo, quia pulvis es..." – Souviens-toi, homme, que tu es poussière... – Si tu es poussière, pourquoi devrais-tu être gêné qu'on te foule aux pieds?

282 Le sentier de l'humilité mène partout..., et essentiellement au Ciel.

283 Un chemin sûr d'humilité: méditer comment, tout en manquant de talent, de renom et de fortune, nous pouvons être des instruments efficaces, si nous avons recours à l'Esprit Saint pour qu'il nous dispense ses dons.
Bien qu'ils aient été instruits pas Jésus lui-même, trois années durant, les Apôtres ont pris la fuite, épouvantés devant les ennemis du Christ. Néanmoins, après la Pentecôte, ils se sont laissés fouetter et emprisonner, et ils ont fini par donner leur vie en témoignage de leur foi.

284 Il est vrai que nul ne peut être sûr de sa propre persévérance... Mais cette incertitude est un motif supplémentaire d'humilité, et une preuve évidente de notre liberté.

285 Bien que tu sois si peu de chose, Dieu s'est servi de toi. Et il te fait toujours servir de façon féconde à sa gloire.
– N'en sois pas orgueilleux pour autant. Pense: que dirait-il de lui-même, l'instrument d'acier ou de fer qu'utilise l'artiste pour sertir des joyaux d'or et de pierres précieuses?

286 Qu'est-ce qui a plus de valeur, un kilo d'or ou un kilo de cuivre?... Et pourtant, en bien des cas, le cuivre rend plus de services, et de meilleurs services, que l'or.

287 Cet appel de Dieu qu'est ta vocation consiste à diriger les autres, à les entraîner, à les servir, et donc à être un chef. Si toi, en vertu d'une humilité fausse ou mal comprise, tu t'isoles, en t'enfermant dans ton coin, tu manques à ton devoir d'instrument divin.

288 Lorsque le Seigneur se sert de toi pour répandre sa grâce dans les âmes, rappelle-toi que tu n'es que l'emballage du cadeau: un papier que l'on déchire et que l'on jette.

289 "Quia respexit humilitatem ancillae suae" – parce qu'il a vu l'humilité de sa servante...
– Chaque jour, je suis davantage convaincu que l'humilité authentique est le fondement surnaturel de toutes les vertus! Parles-en à Notre Dame, pour qu'elle nous entraîne à marcher sur ce sentier.

 «    CITOYENNETÉ    » 

290 Le monde nous attend. Oui! Nous aimons passionnément ce monde parce que c'est ce que Dieu nous a appris: "sic Deus dilexit mundum..." (c'est ainsi que Dieu a aimé le monde) et parce que c'est le cadre de notre champ de bataille – une merveilleuse guerre de charité – afin que nous atteignions tous à cette paix que le Christ est venu instaurer.

291 Le Seigneur a eu pour nous cette attention fine et pleine d'Amour: nous permettre de Lui conquérir la terre.
Et Lui, toujours si humble, Il a voulu se borner à rendre cette tâche possible... A nous, Il a laissé la part la plus facile et la plus agréable: celle de l'action et du triomphe.

292 Le monde... – "C'est notre affaire!"... – Tu l'affirmes après avoir tourné ton regard et ta tête vers le ciel, avec l'assurance du laboureur qui parcourt en roi sa propre moisson: "regnare Christum volumus!" – Nous voulons qu'Il règne sur cette terre qui Lui appartient!

293 "C'est un temps d'espérance, et je vis de ce trésor. Ce n'est pas une phrase, Père, me dis-tu, c'est une réalité."
Eh bien..., le monde entier, toutes les valeurs humaines qui t'attirent avec une si grande force (l'amitié, l'art, la science, la philosophie, la théologie, le sport, la nature, la culture, les âmes...) place tout cela dans l'espérance: dans l'espérance du Christ.

294 Ce charme flou et séduisant du monde..., il est si tenace! Les fleurs du chemin t'attirent avec leurs couleurs et leurs parfums,... et les oiseaux du ciel, toutes les créatures...
– Mon pauvre enfant! ce n'est que raisonnable. S'il en allait autrement, si tout cela ne te fascinait pas, quel sacrifice offrirais-tu à Notre Seigneur?

295 Ta vocation de chrétien te demande d'être tout à Dieu, et, en même temps, de t'occuper des choses de la terre, en les utilisant objectivement comme ce qu'elles sont: pour les Lui rendre.

296 Il est incroyable que l'on puisse être si heureux en ce monde où beaucoup s'entêtent à vivre tristement, car ils poursuivent leur égoïsme, comme si tout s'achevait ici-bas! – Ne sois pas de ceux-là..., corrige-toi à chaque instant!

297 Le monde est froid, il donne l'impression d'être endormi. – Bien souvent, de ton poste d'observation, tu le contemples d'un regard incendiaire. Qu'il se réveille, Seigneur!
– Canalise ton impatience avec la certitude que, si nous savons bien brûler notre vie, nous propagerons le feu dans tous les coins..., et le panorama changera.

298 La fidélité – le service de Dieu et des âmes – que je te demande toujours, ce n'est pas l'enthousiasme facile, mais l'autre: celui que l'on gagne dans la rue en voyant qu'il y a beaucoup à faire de tous côtés.

299 Un bon enfant de Dieu se doit d'être très humain. Mais pas au point d'être mal élevé et de devenir vulgaire.

300 Certes il est difficile de crier aux oreilles de chacun, par un travail silencieux, grâce à l'accomplissement consciencieux de nos obligations de citoyens, et de réclamer ensuite nos droits pour les mettre au service de l'Église et de la société.
C'est difficile..., mais c'est très efficace.

301 Il n'est pas vrai qu'il y ait opposition entre le fait d'être un bon catholique et celui de servir fidèlement la société civile. Tout comme il n'y a pas de raison pour que l'Église et l'Etat entrent en conflit dans l'exercice légitime de leur autorité respective, en vue de la mission que Dieu leur a confiée.
Ils mentent (c'est bien cela: ils mentent!) ceux qui affirment le contraire. Ce sont les mêmes qui, au nom d'une fausse liberté, voudraient "gentiment" que les catholiques retournent aux catacombes.

302 Voilà ton devoir de citoyen chrétien: contribuer à ce que l'amour et la liberté du Christ président toutes les manifestations de la vie moderne: la culture et l'économie, le travail et le repos, la vie de famille et la vie en société.

303 Un enfant de Dieu ne peut pas être "classiste", parce que les problèmes de tous les hommes l'intéressent... Et il s'efforce de contribuer à les résoudre avec la justice et la charité de notre Rédempteur.
L'Apôtre l'a indiqué, quand il nous écrivait que pour le Seigneur il n'y a pas d'acception de personnes; et je n'ai pas hésité à traduire cela ainsi: il n'y a qu'une race, la race des enfants de Dieu!

304 Les mondains s'évertuent, dès que possible, à faire perdre Dieu aux âmes; et, ensuite, à leur faire perdre le monde... Ils n'aiment pas ce monde qui est le nôtre. Ils l'exploitent, en piétinant les autres! – Ne sois pas, toi aussi, victime de cette double escroquerie.

305 Certaines gens vivent toute la journée dans l'amertume. Tout leur est cause d'inquiétude. Ils dorment avec une obsession physique: cette évasion, la seule possible, durera si peu! Ils se réveillent avec l'impression hostile et décourageante qu'ils ont une autre journée devant eux.
Beaucoup ont oublié que le Seigneur nous a mis en route, dans ce monde, vers le bonheur éternel; et ils ne pensent pas que seuls pourront l'atteindre ceux qui marchent sur la terre avec la joie des enfants de Dieu.

306 Par ta conduite de citoyen chrétien, montre aux gens la différence qu'il y a entre une vie triste et une vie joyeuse; entre l'état des timides et celui des gens audacieux; entre la conduite précautionneuse, double..., hypocrite, et celle des hommes simples, tout d'une pièce. – En un mot, entre l'état mondain et celui des enfants de Dieu.

307 Une erreur fondamentale dont tu dois te garder: penser que les mœurs et les exigences, nobles et légitimes, de ton temps ou de ton milieu ne peuvent être ordonnées et accordées à la sainteté de la doctrine morale de Jésus-Christ.
Remarque bien que j'ai précisé: celles qui sont nobles et légitimes. Les autres n'ont pas droit de cité.

308 On ne peut séparer la religion de la vie, dans la pensée, ni dans la réalité quotidienne.

309 De loin, là-bas, à l'horizon, il semble que le ciel rejoigne la terre. N'oublie pas que c'est dans ton cœur d'enfant de Dieu que la terre et le ciel se rejoignent vraiment.

310 Nous ne pouvons pas nous croiser les bras, alors qu'une subtile persécution condamne l'Église à mourir d'inanition: on la relègue hors de la vie publique et, surtout, on l'empêche d'intervenir dans l'éducation, dans la culture, dans la vie familiale.
Ces droits ne nous appartiennent pas: ils appartiennent à Dieu et c'est à nous, les catholiques, qu'Il les a confiés... pour que nous les exercions!

311 Bien des réalités matérielles, techniques, économiques, sociales, politiques, culturelles..., livrées à elles-mêmes, ou aux mains de ceux qui n'ont pas la lumière de notre foi, deviennent des obstacles formidables pour la vie surnaturelle: elles constituent une sorte de chasse gardée, fermée, hostile à l'Église.
Toi (chercheur, homme de lettres, homme de science, homme politique, travailleur...) parce que tu es chrétien, tu as le devoir de sanctifier ces réalités. Rappelle-toi que l'univers entier, écrit l'Apôtre, gémit comme dans les douleurs de l'enfantement, attendant la délivrance des enfants de Dieu.

312 Ne cherche pas à faire du monde un couvent; ce serait là un désordre... Mais ne cherche pas non plus à faire de l'Église une faction terrestre: cela reviendrait à une trahison.

313 C'est une triste chose que d'avoir une mentalité à la César et de ne pas comprendre la liberté des autres citoyens, dans les affaires que Dieu a laissées au jugement des hommes.

314 "Qui a dit que pour parvenir à la sainteté, il est nécessaire de se réfugier dans une cellule ou dans la solitude d'une montagne?" se demandait, étonné, un bon père de famille; et il ajoutait "alors, ce ne sont pas les personnes mais la cellule, ou bien la montagne qui seraient saintes. Il semble que l'on ait oublié ce que le Seigneur nous a dit expressément, à tous et à chacun: soyez saints, comme mon Père du ciel est saint."
– Je lui ai simplement fait ce commentaire: "Notre Seigneur, non seulement veut que nous soyons saints: mais il accorde en plus à chacun les grâces opportunes."

315 Aime ta patrie: le patriotisme est une vertu chrétienne. Mais si le patriotisme se transforme en un nationalisme qui porte sur d'autres peuples, sur d'autres nations un regard détaché et méprisant, dénué de charité chrétienne et de justice, c'est un péché.

316 Ce n'est pas du patriotisme que de justifier des crimes... et de méconnaître les droits des autres peuples.

317 L'Apôtre a également écrit: "il n'y a pas de distinction entre gentil et Juif, circoncis et incirconcis, barbare et Scythe, esclave et homme libre, mais le Christ est tout et se trouve en tous".
Ces paroles ont aujourd'hui la même valeur qu'hier: devant le Seigneur il n'existe pas de différence de nation, de race, de classe, d'état... Chacun d'entre nous est né de nouveau dans le Christ, pour devenir une nouvelle créature, un enfant de Dieu: nous sommes tous frères et c'est en toute fraternité que nous devons nous conduire!

318 Il y a bien des années, j'ai découvert très clairement un critère qui sera toujours valable: l'atmosphère de la société, son éloignement de la foi et de la morale chrétienne, requièrent une nouvelle façon de vivre et de propager la vérité éternelle de l'Evangile. Au beau milieu de la société, du monde, les enfants de Dieu doivent rayonner par leurs vertus, comme des lampes dans l'obscurité – "quasi lucernae lucentes in caliginoso loco."

319 La vitalité perpétuelle de l'Église catholique donne l'assurance que la vérité et l'esprit du Christ ne s'écartent nullement des divers besoins de l'époque.

320 Pour suivre les traces du Christ, l'apôtre d'aujourd'hui ne vient pas réformer quoi que ce soit; et il se désintéresse moins encore de la réalité historique qui l'environne... – Il lui suffit d'agir comme les premiers chrétiens, en vivifiant son milieu.

321 Toi qui vis au milieu du monde, et qui es un citoyen courant, en contact avec des hommes qui se disent bons ou mauvais...; toi, tu dois éprouver le désir constant de donner aux gens la joie dont tu jouis, du fait d'être chrétien.

322 Un édit de César Auguste a été promulgué, qui ordonne à tous les habitants d'Israël de se faire recenser. Marie et Joseph font route vers Bethléem. – N'y as-tu pas pensé? Le Seigneur s'est servi de l'obéissance fidèle à une loi pour que sa prophétie s'accomplisse.
Aime et respecte les normes d'une vie sociale honnête. Sois assuré que ta soumission loyale à ton devoir sera également un moyen pour que d'autres découvrent l'honnêteté chrétienne, fruit de l'amour divin, et pour qu'ils rencontrent Dieu.

 «    SINCÉRITÉ    » 

323 Celui qui cache une tentation à son Directeur partage un secret avec le diable. – Il est devenu l'ami de l'ennemi.

324 La poussière et l'aveuglement d'une certaine chute engendrent en toi le trouble, en même temps que des pensées qui veulent te priver de ta paix.
As-tu cherché à te consoler en pleurant auprès de Notre Seigneur, et dans la conversation pleine de confiance avec l'un de tes frères?

325 Sincérité: avec Dieu, avec ton Directeur, avec tes frères les hommes. – Ainsi je suis sûr de ta persévérance.

326 Un moyen pour être franc et simple?... Ecoute et médite ces paroles de Pierre: "Domine, Tu omnia nosti..." – Seigneur, Tu sais tout!

327 Que vais-je dire? me demandes-tu alors que tu commences à ouvrir ton âme. Et, en toute conscience, je te réponds: en premier lieu, ce que tu ne voudrais pas que l'on sache.

328 Les défauts que tu vois chez les autres sont peut-être les tiens. "Si oculus tuus fuerit simplex..." Si ton œil était transparent, tout ton corps serait dans la lumière; mais s'il y a de la malice dans ton œil, tout ton corps sera dans les ténèbres.
Plus encore: "Pourquoi vas-tu regarder la paille dans l'œil de ton frère, et ne fais-tu pas attention à la poutre qui est dans le tien?" – Examine-toi!

329 Nous avons tous besoin d'être mis en garde contre le manque d'objectivité, chaque fois qu'il s'agit de juger notre propre conduite... – Toi aussi.

330 Je te l'accorde, tu dis la vérité "presque" entièrement... Donc tu n'es pas véridique.

331 Tu te plains... et je poursuis, saintement inflexible: tu te plains..., parce que, cette fois-ci, j'ai mis le doigt sur la plaie.

332 Tu as compris en quoi consiste la sincérité quand tu m'écris: "J'essaye de m'habituer à appeler les choses par leur nom et, surtout, à ne pas chercher des mots pour ce qui n'existe pas."

333 Penses-y bien: être transparent consiste plus à ne pas cacher qu'à vouloir montrer... Il faut permettre de distinguer ce qu'il y a au fond du verre, et non pas s'efforcer de rendre l'air visible.

334 Agissons toujours, en présence de Dieu, de telle manière que nous n'ayons rien à cacher aux hommes.

335 Les angoisses ont cessé... Tu as découvert que la sincérité envers ton Directeur arrange les problèmes avec une facilité étonnante.

336 Comme ils se trompent ces parents, ces maîtres, ces directeurs... qui exigent une sincérité absolue et qui s'effraient quand on leur montre toute la vérité!

337 Tu lisais dans ce dictionnaire les synonymes d'insincère: "ambigu, sournois, cachottier, fourbe, rusé..." Tu as refermé le livre, tout en demandant au Seigneur que jamais on ne puisse t'appliquer ces qualificatifs; et tu t'es proposé d'être encore plus délicat dans cette vertu surnaturelle et humaine de la sincérité.

338 "Abyssus, abyssum invocat..." – L'abîme attire un autre abîme, t'ai-je rappelé. C'est la description exacte du comportement des menteurs, des hypocrites, des renégats, des traîtres: leur propre conduite les met mal à l'aise; aussi cachent-ils aux autres leurs supercheries pour aller de mal en pis et créent-ils un précipice entre eux et le prochain.

339 "Tota pulchra es Maria, et macula originalis non est in Te!" – Tu es toute belle, Marie, et il n'y a pas en toi de tache originelle! chante la liturgie, si joyeuse. Il n'y a pas en Elle la moindre trace de duplicité: chaque jour, je prie notre Mère pour que nous sachions ouvrir notre âme dans la direction spirituelle, et la lumière de la grâce éclairera toute notre conduite! Si nous l'en supplions, Marie nous obtiendra le courage de la sincérité, pour que nous nous rapprochions davantage de la Très Sainte Trinité.

 «    LOYAUTÉ    » 

340 Conséquences de la loyauté: l'assurance de marcher sur un chemin droit sans aléas ni perturbations; et une certitude renforcée que le bon sens et le bonheur existent.
– Vois si cela se réalise dans ta vie de chaque instant.

341 Tu me confiais que, par moments, Dieu te remplit de lumière; mais en d'autres moments, pas du tout.
– Très ferme, je t'ai rappelé que le Seigneur est toujours infiniment bon. C'est pourquoi, pour aller de l'avant, ces moments de lumière te suffisent; bien que les autres aussi te soient profitables, pour te rendre plus fidèle.

342 Le sel de la terre. – Notre Seigneur a dit que ses disciples (et donc aussi toi et moi) sont le sel de la terre: pour immuniser, pour éviter la corruption, pour donner de la saveur au monde.
– Mais il a également ajouté "quod si sal evanuerit..." – si le sel perd de sa saveur il sera jeté et foulé aux pieds par les gens...
– Maintenant, face à beaucoup d'événements que nous déplorons, commenceras-tu à t'expliquer ce que tu ne t'expliquais pas?

343 Je tremble de peur quand je lis certain passage de la seconde épître à Timothée: l'Apôtre se plaint que Démas se soit enfui à Thessalonique, attiré par les charmes de ce monde... Pour une bagatelle, et par peur des persécutions, un homme que saint Paul mentionne dans d'autres épîtres parmi les saints a trahi l'entreprise divine.
J'en tremble de peur, quand je pense à ma petitesse; et tout cela m'incite à vouloir être fidèle au Seigneur jusque dans les événements qui peuvent paraître indifférents; parce que, s'ils ne me permettent pas de m'unir davantage à Lui, je n'en veux pas!

344 Cette considération que tu m'écrivais sur la loyauté me semblait bien adaptée à nombre de situations historiques, que le diable se charge de renouveler: "toute la journée, j'ai dans mon cœur, dans ma tête et sur mes lèvres une oraison jaculatoire: Rome!"

345 Une grande découverte! quelque chose que tu ne comprenais qu'à moitié t'est apparu dans toute sa clarté quand tu as dû l'expliquer à d'autres.
Tu as dû parler très doucement à quelqu'un de découragé: il se sentait inutile et il ne voulait être à charge de personne... Alors tu as compris mieux que jamais pourquoi je te dis constamment d'être comme de petits ânes d'une "noria": être fidèles, et avoir des œillères très grandes pour ne pas regarder ni savourer personnellement les fleurs, les fruits, la fraîcheur du potager – les résultats – tout à fait certains de notre efficace fidélité.

346 La loyauté implique le désir réel de se former: mû par un amour sincère, tu ne souhaites pas courir le risque de répandre ou de défendre, par ignorance, des principes et des attitudes qui sont très loin de concorder avec la vérité.

347 "Je voudrais – m'écris-tu – que ma loyauté et ma persévérance soient si solides et si éternelles, et mon service si vigilant, si amoureux que je puisse être pour vous une cause de joie, que je vous sois un lieu de repos."
Et moi de te répondre: que Dieu te confirme dans ta résolution, afin que, pour Lui, nous soyons aide et repos.

348 Il est sûr que parmi ceux qui s'enthousiasment, quelques-uns par la suite s'en vont... Ne t'inquiète pas: c'est l'aiguille dont Dieu se sert pour faire passer le fil.
– Ah! et prie pour eux! parfois, on peut faire en sorte qu'ils en poussent d'autres encore.

349 Pour toi, qui hésites, je recopie ceci d'une lettre: "A l'avenir je resterai sans doute l'instrument inepte de toujours. Malgré tout, la manière de poser le problème de ma vie et de le résoudre aura changé: en moi il y a un ferme désir de persévérer... à tout jamais!"
– Sois toujours certain que Lui, Il ne faiblit jamais.

350 Ta vie est service, mais garde toujours une loyauté entière, sans conditions; c'est seulement ainsi que nous aurons le rendement que le Seigneur attend de nous.

351 Je ne partagerai jamais, ni dans le domaine ascétique ni dans le domaine juridique l'idée de ceux qui pensent et vivent comme si le service de l'Église équivalait à une promotion dans le monde.

352 Tu souffres de voir que quelques-uns n'utilisent la technique de parler de la Croix du Christ que pour se hisser et atteindre certains postes... Ce sont les mêmes qui ne jugent et ne voient rien de droit, si cela ne va pas selon leurs principes.
– Raison de plus pour que tu persévères dans la droiture de tes intentions, et pour que tu demandes au Maître de t'accorder la force de redire: "non mea voluntas, sed tua fiat!" – Seigneur, que j'accomplisse avec amour ta Sainte Volonté!

353 Chaque jour, fais grandir ta loyauté envers l'Église, le Pape, le Saint-Siège... Et avec un amour de plus en plus théologique!

354 Il est grand ton désir d'aimer l'Église, d'autant plus grand qu'ils s'agitent davantage ceux qui cherchent à l'enlaidir. – Et cela me semble très cohérent: l'Église n'est-elle pas ta Mère?

355 Ceux qui ne veulent pas comprendre que la foi exige que l'on serve l'Église et les âmes intervertissent tôt ou tard les termes: pour leurs fins personnelles, ils en viennent à se servir de l'Église et des âmes.

356 Pourvu que tu ne tombes jamais dans l'erreur d'identifier le Corps Mystique du Christ avec un certain comportement, personnel ou public, de n'importe lequel de ses membres.
Et que tu ne donnes pas toi-même, à des gens peu formés, l'occasion de tomber dans cette erreur.
– Mesure donc toute l'importance de ta cohérence et de ta loyauté!

357 Je ne te comprends pas lorsqu'à propos de questions de morale et de foi, tu me dis que tu es un catholique indépendant...
– Indépendant de qui? Cette fausse indépendance équivaut à sortir du chemin du Christ.

358 Ne cède jamais sur la doctrine de l'Église. – Lorsqu'on fait un alliage, c'est le meilleur métal qui y perd.
En outre, ce trésor ne t'appartient pas, et, comme le rapporte l'Evangile, le Maître peut te demander des comptes au moment où tu t'y attends le moins.

359 J'en conviens avec toi: certains catholiques, pratiquants et même pieux aux yeux des autres, et sans doute sincères dans leurs convictions, servent naïvement les ennemis de l'Église...
Le pire adversaire qui soit, l'ignorance, s'est faufilé dans leur propre maison, sous différents noms employés à tort et à travers: œcuménisme, pluralisme, démocratie.

360 Bien que cela paraisse paradoxal, il n'est pas rare que ceux qui se qualifient eux-mêmes de fils de l'Église, soient précisément ceux qui sèment la plus grande confusion.

361 Tu es fatigué de lutter. Par le manque de loyauté qui le caractérise, ce milieu t'a écœuré... Tous se précipitent sur celui qui est tombé, pour le piétiner! Je ne sais pas pourquoi tu t'étonnes. La même chose est arrivée à Jésus-Christ, mais Lui, Il n'a pas reculé, parce qu'Il était venu justement pour sauver les malades et ceux qui ne le comprenaient pas.

362 Que les personnes loyales n'agissent pas: voilà le désir des personnes déloyales!

363 Fuis les sectarismes: ils s'opposent à une collaboration loyale.

364 On ne peut pas promouvoir la véritable unité à force de créer de nouvelles divisions... Et moins encore, lorsque les "promoteurs" aspirent à s'emparer du commandement, en évinçant l'autorité légitime.

365 Tu es demeuré très pensif en m'entendant faire ce commentaire: je veux avoir le sang de ma Mère l'Église; et non pas celui d'Alexandre ou celui de Charlemagne, ou celui des sept sages de la Grèce.

366 Persévérer, c'est persister dans l'amour, "per Ipsum et cum Ipso et in Ipso...", ce que nous pouvons réellement interpréter aussi bien de la sorte: Lui, avec moi, par moi et en moi.

367 Il peut arriver que, parmi les catholiques, il y en ait quelques-uns qui aient peu d'esprit chrétien; ou qui en donnent l'impression à ceux qui les fréquentent à un moment donné.
Toi, si tu te scandalisais de cette réalité, tu montrerais par là que tu connais peu la misère humaine et... ta propre misère. De plus, il n'est ni juste ni loyal de profiter des faiblesses de quelques-uns pour diffamer le Christ et son Église.

368 Il est vrai que nous, les enfants de Dieu nous ne devons pas servir Notre Seigneur pour que l'on nous voie..., mais, si l'on nous voit, n'en ayons aucune gêne: nous ne pouvons surtout pas cesser de faire notre devoir parce qu'on nous voit!

369 Vingt siècles se sont écoulés, et la scène se répète chaque jour: ils continuent de juger, de flageller et de crucifier le Maître... Et beaucoup de catholiques, par leur comportement et par leurs paroles, continuent de crier: celui-là, moi je ne le connais pas! Je désirerais aller partout, pour rappeler en confidence à beaucoup que Dieu est Miséricordieux, et qu'Il est aussi très juste! C'est pourquoi en toute clarté, Il a déclaré: "Moi non plus, je ne reconnaîtrai pas ceux qui ne m'ont pas reconnu devant les hommes."

370 J'ai toujours pensé qu'un manque de loyauté, par respect humain, est un manque d'amour..., et un manque de personnalité.

371 Tourne les yeux vers la Sainte Vierge et contemple comment elle exerce la vertu de la loyauté. Quand Elisabeth a besoin d'elle, l'Evangile dit qu'elle accourt "cum festinatione", dans une hâte joyeuse. Apprends!

 «    DISCIPLINE    » 

372 Obéir dans la docilité. – Mais aussi avec intelligence, avec amour et avec le sens de ses responsabilités. Ce qui n'a rien à voir avec le fait de juger celui qui gouverne.

373 Dans l'apostolat, obéis sans t'arrêter à la manière d'être de celui qui commande ni à la manière dont il commande. Le contraire n'est pas vertu.
Des croix, il y en a beaucoup: des croix de brillants, de perles, d'émeraudes, d'émaux, d'ivoire..., des croix en bois aussi, comme celle de Notre Seigneur. Toutes méritent une égale vénération, puisque la Croix nous parle du sacrifice de Dieu fait Homme. – Applique cette considération à ton obéissance, sans oublier que Lui, Il a embrassé ce Bois amoureusement, sans hésiter, et que c'est là qu'Il a gagné notre Rédemption.
Obéis d'abord, ce qui est un signe de droiture d'intention, et fais ensuite la correction fraternelle, selon les conditions requises; tu renforceras l'unité par l'accomplissement de ce devoir.

374 On obéit avec les lèvres, avec le cœur et avec l'intelligence. – On obéit non à un homme mais à Dieu.

375 Tu n'aimes pas l'obéissance si tu n'aimes pas vraiment l'ordre que l'on te donne, si tu n'aimes pas vraiment ce qu'on t'a commandé.

376 Beaucoup de difficultés se résolvent dans l'immédiat. D'autres, pas tout de suite. Mais toutes s'arrangeront si nous sommes fidèles: si nous obéissons, si nous accomplissons ce qui nous est indiqué.

377 Le Seigneur attend de toi un apostolat précis, comme cette pêche des cent-cinquante-trois grands poissons – pas un de plus – pris à la droite de la barque.
Et tu me demandes: comment se fait-il que, me sachant pêcheur d'hommes, étant au contact de beaucoup de camarades et pouvant discerner à qui doit s'adresser mon apostolat spécifique, je ne pêche rien du tout?... Est-ce que je manque d'Amour?... Est-ce je manque de vie intérieure? Ecoute la réponse de la bouche de Pierre, au cours de cette autre pêche miraculeuse: – "Maître, toute la nuit nous nous sommes fatigués et nous n'avons rien pris; cependant, sur ta parole, je jetterai les filets."
Au nom de Jésus-Christ, recommence. – Et, fortifié, chasse cette langueur paresseuse!

378 Obéis sans toutes ces "cogitations" inutiles... Manifester de la tristesse ou un manque d'envie devant ce qui est commandé est une faute de taille. Mais le ressentir, sans plus, non seulement ce n'est pas une faute mais ce peut être l'occasion d'une grande victoire, le couronnement d'un acte de vertu héroïque.
Ce n'est pas moi qui l'invente. Tu te rappelles? L'Evangile raconte qu'un père de famille donna la même charge à ses deux fils... Et malgré les difficultés qu'il avait lui-même soulevées, celui des deux qui l'accomplit remplit Jésus de joie! Et il le réjouit parce que la discipline est le fruit de l'Amour.

379 La cause de la plupart des désobéissances est que l'on n'a pas su "écouter" l'ordre; ce qui révèle au fond, un manque d'humilité ou un manque d'intérêt pour servir.

380 Tu veux que ton obéissance soit une obéissance accomplie?... Alors sois très attentif pour comprendre la portée et l'esprit de ce qu'on t'indique; et, si tu ne comprends pas quelque chose, pose des questions.

381 Voyons, quand seras-tu convaincu que tu dois obéir!... Et tu désobéis si, au lieu d'accomplir ton plan de vie, tu perds ton temps. Toutes tes minutes doivent être remplies: travail, étude, prosélytisme, vie intérieure.

382 Par le soin qu'elle apporte à la liturgie, l'Église nous fait entrevoir la beauté des mystères de la religion, et elle nous pousse à mieux les aimer. De la même manière nous devons manifester, sans mise en scène, une certaine attitude, apparemment mondaine, de respect profond, même extérieur, à l'égard du Directeur qui nous communique, par sa bouche, la Volonté de Dieu.

383 Quand on gouverne, il faut d'abord penser au bien commun, et aussi tenir compte du fait que, dans le domaine spirituel ou profane, une norme peut difficilement ne pas plaire à certains.
– Il ne pleut jamais au goût de tout le monde! dit la sagesse populaire. Ce n'est pas là un défaut de la loi, sois-en sûr, mais c'est la révolte injustifiée de l'orgueil ou de l'égoïsme d'un petit nombre.

384 Ordre, autorité, discipline... – Ils écoutent, s'ils écoutent! et ils sourient avec cynisme, en prétextant, les uns et les autres, qu'ils défendent leur liberté.
Ce sont les mêmes qui prétendent ensuite que nous respections leurs égarements ou que nous nous en accommodions. Ils ne comprennent pas (et quelle vulgarité dans leurs protestations!) que leurs façons de faire ne soient pas (car elles ne peuvent pas l'être) acceptées par l'authentique liberté des autres.

385 Ceux qui dirigent des activités spirituelles doivent s'intéresser à tout ce qui est humain, pour l'élever à l'ordre surnaturel et pour le diviniser.
Ce qui ne peut être divinisé, ne t'y trompe pas, n'a rien d'humain, mais c'est quelque chose d'"animal", d'impropre à la créature rationnelle.

386 Autorité. – Elle ne consiste pas à ce que celui d'en haut "crie" à celui d'en bas, puis celui-ci à qui est encore en dessous.
Un tel principe, qui est une caricature de l'autorité, manifeste d'abord un manque évident de charité et de correction humaine; il aboutit surtout à l'éloignement progressif de celui qui est à la tête et de ceux qu'il gouverne: il ne les sert pas, tout au plus, il les use!

387 Ne sois pas de ceux qui, ne sachant pas diriger leur propre maison, cherchent à se mêler de la direction de la maison d'autrui.

388 Mais... penses-tu vraiment que tu sais tout, pour avoir été établi en autorité? – Ecoute-moi bien: le bon gouvernant "sait" qu'il peut, qu'il doit même apprendre des autres.

389 La liberté de conscience: non! – Combien de maux a entraîné pour les peuples et les personnes cette lamentable erreur, qui permet d'agir à l'encontre des préceptes de son for intérieur.
La liberté "des consciences", oui: elle exprime le devoir de suivre cet impératif intérieur... mais à la condition d'avoir reçu une sérieuse formation!

390 Gouverner, ce n'est pas mortifier.

391 Pour toi qui occupes cette charge de gouvernement, médite bien ceci: les instruments les plus forts et les plus efficaces, si on les maltraite, s'ébrèchent, s'usent et deviennent inutilisables.

392 Les décisions de gouvernement, quand elles sont prises à la légère par une seule personne, sont toujours, ou presque toujours, marquées par une vision unilatérale des problèmes.
– Aussi grands que soient ton esprit de réparation et ton talent, tu dois écouter ceux qui partagent avec toi cette charge de direction.

393 Ne prête jamais l'oreille à la délation anonyme: c'est le procédé des infâmes.

394 Un critère de bon gouvernement: il faut prendre le matériau humain tel qu'il est, et l'aider à devenir meilleur, sans jamais le mépriser.

395 Il me semble très bon que, chaque jour, tu essaies d'augmenter cette préoccupation profonde pour ceux qui dépendent de toi; les personnes que tu dois servir par ton travail de direction ont peut-être surtout besoin de ce remède: se sentir entourées et protégées par la compréhension affectueuse du supérieur.

396 Qu'ils font de la peine ceux qui ont été constitués en autorité mais qui jugent et parlent à la légère de personnes ou de sujets qu'il ne connaissent pas, sans avoir étudié l'affaire mais avec des affirmations tranchantes... voire avec des "préjugés" qui sont le fruit de leur déloyauté.

397 Si l'autorité se transforme en un autoritarisme dictatorial et que cette situation se prolonge dans le temps, on perd la continuité historique, les personnes qui gouvernent meurent ou vieillissent, des gens sans expérience de direction arrivent à l'âge mûr, et la jeunesse, inexpérimentée et agitée, veut prendre les rênes: combien de maux! et combien d'offenses à Dieu (celles que l'on fait siennes et celles d'autrui) retombent sur celui qui fait un si mauvais usage de l'autorité!

398 Lorsque celui qui commande est négatif et méfiant, il tombe facilement dans la tyrannie.

399 Essaie d'être droit et objectif dans ton travail de gouvernement. Evite le travers de ceux qui ont tendance à voir plutôt (et parfois, uniquement) ce qui ne marche pas, les erreurs.
Remplis-toi de joie, certain que le Seigneur a accordé à tous la capacité de devenir saints, précisément en luttant contre leurs défauts personnels.

400 Le désir de nouveauté peut conduire au désordre.
– Il faut de nouveaux règlements, dis-tu... – Crois-tu que le corps humain serait meilleur s'il avait un autre système nerveux ou artériel?

401 Certains, quels efforts ils font pour tout "massifier"! Ils transforment l'unité en uniformité inerte, et ils étouffent la liberté.
Ils semblent ignorer l'impressionnante unité du corps humain, et la diversification divine des membres qui (chacun avec sa fonction) contribuent à la santé générale.
– Dieu n'a pas voulu que tous soient égaux, ni que nous marchions tous de la même manière sur un seul chemin.

402 Il faut apprendre aux gens à travailler (n'exagérons pas non plus l'importance de leur préparation: "faire", c'est aussi se former!) et à accepter d'avance les imperfections inévitables Le mieux est l'ennemi du bien.

403 Ne t'en remets jamais uniquement à l'organisation.

404 Le bon pasteur n'a pas besoin d'effrayer ses brebis: un tel comportement est propre aux mauvais gouvernants. C'est pourquoi personne ne s'étonne qu'ils finissent seuls et détestés.

405 Bien souvent, gouverner consiste à savoir "tirer" les gens, avec patience et affection.

406 Le bon gouvernement n'ignore pas une souplesse nécessaire; il ne tombe pas non plus dans le manque d'exigence.

407 "Tant qu'ils ne me font pas commettre de péché!" – Vigoureux commentaire de cette pauvre créature, presque anéantie, dans sa vie personnelle et dans ses aspirations d'homme et de chrétien, par des ennemis puissants.
– Médite et apprends: tant qu'ils ne te font pas commettre de péché!

408 Tous les citoyens ne font pas partie de l'armée de métier. Mais, à l'heure de la guerre, tous participent... Et le Seigneur a dit: "Je ne suis pas venu apporter la paix, mais la guerre."

409 "J'étais un guérillero, écrit-il, et je me déplaçais dans la montagne, ouvrant le feu quand tel était mon devoir. Mais j'ai voulu m'engager comme soldat, parce que j'ai compris que les guerres, ce sont des armées organisées et disciplinées qui les gagnent plus facilement. Un pauvre guérillero isolé ne peut pas enlever des villes entières, ni occuper le monde. J'ai raccroché mon vieux fusil (si démodé!) et maintenant je me sens mieux armé. En même temps, je sais que je ne peux m'allonger par terre, en montagne, à l'ombre d'un arbre, et rêver que je gagnerai la guerre à moi tout seul."
Bienheureuses discipline et unité de notre Mère la Sainte Église!

410 A tant de catholiques rebelles, je dirais qu'ils manquent à leur devoir: ceux qui, au lieu de s'en tenir à la discipline et à l'obéissance envers l'autorité légitime, se transforment en parti; en petite faction; en occasions de discorde; en conjuration et commérages; fauteurs de stupides luttes personnelles; fomenteurs de complots de jalousies et de crises.

411 Une brise n'est pas un ouragan. N'importe qui résiste à la première: c'est un jeu d'enfant, la parodie d'une lutte.
– Petites contrariétés, pénurie, petites difficultés... Tu les supportais joyeusement et, rempli de joie intérieure, tu pensais: c'est maintenant que je travaille pour Dieu, parce que nous avons la Croix?...
Mais, mon pauvre enfant: l'ouragan est arrivé, et tu sens des secousses, des chocs qui déracineraient des arbres centenaires. Et cela..., à l'intérieur comme à l'extérieur. Aie confiance! Il ne pourra pas déraciner ta Foi et ton Amour; ni te faire dévier de ton chemin..., si tu ne t'éloignes pas de la "tête", si ton unité est "sentie".

412 Quelle facilité pour ne pas accomplir ton plan de vie, ou faire ce que tu fais plus mal que si tu l'omettais!... – Est-ce ainsi que tu veux t'éprendre chaque fois davantage de ton chemin, et ensuite transmettre à d'autres cet amour?

413 N'ambitionne qu'un seul droit: celui d'accomplir ton devoir.

414 Ta charge est lourde? – Non, et mille fois non! Ces obligations que tu as acceptées librement sont des ailes qui t'élèvent au-dessus de la fange des passions.
Est-ce que les oiseaux sentent le poids de leurs ailes? Coupe-les, mets-les sur le plateau d'une balance: il est vrai qu'elles pèsent! Et pourtant, l'oiseau peut-il voler si on les lui arrache? Il a besoin de ces ailes; et il ne se rend pas compte de leur poids. car elles l'élèvent au-dessus du niveau des autres créatures.
Tes "ailes" pèsent elles aussi! Mais, si elles venaient à te manquer, tu tomberais dans les bourbiers les plus sales.

415 "Marie gardait toutes ces choses dans son Cœur..."
Lorsque l'on vit d'un amour pur et sincère, la discipline, même s'il en coûte, ne se fait pas sentir, parce qu'elle unit à l'Aimé.

 «    PERSONNALITÉ    » 

416 Notre Seigneur a besoin d'âmes fortes et audacieuses qui ne pactisent pas avec la médiocrité et qui pénètrent d'un pas sûr dans tous les milieux.

417 Sérénité, équilibre, volonté inflexible, foi profonde et piété ardente: voilà les qualités indispensables à un enfant de Dieu.

418 Même des pierres le Seigneur peut tirer des enfants d'Abraham... Toutefois, nous devons veiller à ce que la pierre ne soit pas friable. Dans un bloc solide, même informe, on peut façonner plus facilement une merveilleuse pierre de taille.

419 L'apôtre ne doit pas en rester au niveau médiocre de la créature. Dieu l'appelle à agir, comme porteur d'humanité, propagateur d'une nouveauté éternelle. – C'est pourquoi l'apôtre doit être une âme longuement, patiemment, héroïquement formée.

420 Chaque jour, je découvre des choses nouvelles en moi, me dis-tu... Et je te réponds: maintenant tu commences à te connaître.
Lorsqu'on aime vraiment..., on trouve toujours des occasions pour aimer encore plus.

421 Il serait lamentable que quelqu'un conclue, en voyant les catholiques se comporter dans la vie sociale, qu'ils agissent en gens pusillanimes, comme inhibés.
Il n'y a pas lieu d'oublier que notre Maître était – qu'il est – "perfectus homo", un Homme parfait.

422 Si le Seigneur t'a doté d'une bonne qualité, ou d'une capacité, ce n'est pas seulement pour que tu t'en réjouisses ou pour que tu te pavanes, mais pour que tu l'emploies avec charité au service du prochain.
– Or, quand trouveras-tu une meilleure occasion pour servir que maintenant, alors que tu vis avec tant d'âmes qui partagent le même idéal que toi?

423 Confrontés à la pression et à l'impact d'un monde matérialisé, hédoniste, sans foi... comment peut-on exiger et justifier la liberté de ne pas penser comme "eux", de ne pas agir comme "eux"?...
– Un enfant de Dieu n'a pas besoin de demander cette liberté, parce que le Christ nous l'a désormais gagnée à tout jamais: il doit néanmoins la défendre et la manifester dans n'importe quel milieu. C'est seulement ainsi qu' "ils" comprendront que notre liberté n'est pas liée à l'environnement.

424 Tes parents, tes collègues, tes amis remarquent peu à peu le changement, et se rendent compte que ce qui t'arrive n'est pas une mutation éphémère, que désormais tu n'es plus le même.
Ne t'en préoccupe pas. Continue d'aller de l'avant! Le "vivit vero in me Christus" s'accomplit. Maintenant c'est le Christ qui vit en toi.

425 Estime ceux qui savent te dire non. Et, en outre, demande-leur d'argumenter leur réponse négative afin d'apprendre... ou de corriger.

426 Aupararavant, tu étais pessimiste, indécis et apathique. A présent, te voilà totalement transformé: tu te sens audacieux, optimiste, sûr de toi..., parce que tu t'es enfin décidé à ne chercher ton appui qu'en Dieu.

427 Quelle triste situation pour quelqu'un que d'avoir de magnifiques vertus humaines tout en étant totalement dépourvu de vision surnaturelle! Car ces vertus, il les appliquera facilement à ses fins particulières. – A méditer!

428 Pour toi qui désires acquérir une mentalité catholique, universelle, en voici quelques caractéristiques:
– la largeur de vues et l'approfondissement énergique de ce qui est sans cesse vivant dans l'orthodoxie catholique;
– le souci droit et sain (qui n'est jamais frivolité) de renouveler les doctrines caractéristiques de la pensée traditionnelle, en matière de philosophie et d'interprétation de l'histoire...;
– une attention vigilante aux orientations de la science et de la pensée contemporaines;
– et une attitude positive et ouverte face à la transformation actuelle des structures sociales et des formes de vie.

429 Tu dois apprendre à ne pas être d'accord avec les autres, quand cela s'avère nécessaire; mais sois charitable, ne te rends pas antipathique!

430 Avec la grâce de Dieu et une bonne formation tu peux te faire comprendre dans un milieu de rustres... – Quant à eux, ils te suivront difficilement si tu n'as pas le "don des langues": la capacité et l'effort pour toucher leur intelligence.

431 De la courtoisie, toujours et à l'égard de tous. – Mais surtout à l'égard de ceux qui se présentent en adversaires (toi, n'aie pas d'ennemis!) lorsque tu cherches à les tirer de leur erreur.

432 N'est-il pas vrai que cet enfant gâté t'a fait pitié? – Alors?... Ne te ménage pas tant! Ne comprends-tu pas que tu vas devenir mollasson? – De plus, ne sais-tu pas que les fleurs dont le parfum est le meilleur sont les fleurs des bois, celles qui sont exposées aux intempéries et à la sécheresse?

433 Il montera très haut, dit-on, et l'on a peur de ses futures responsabilités. – Personne ne lui connaît un travail désintéressé, ni une phrase opportune, ni un écrit fécond. – C'est un homme à la vie négative. – Il donne toujours l'impression d'être plongé dans de profondes réflexions, bien qu'il soit notoire qu'il n'a jamais cultivé d'idées qui donnent à penser. Il a, sur son visage et dans ses manières, la gravité du mulet, ce qui lui confère une réputation de prudence...
– Il montera très haut – mais je me pose cette question: que pourra-t-il apprendre aux autres? comment et en quoi leur rendra-t-il service si nous ne l'aidons pas à changer?

434 Le pédant interprète comme de l'ignorance la simplicité et l'humilité du savant.

435 Ne sois pas de ceux qui, lorsqu'ils reçoivent un ordre, pensent aussitôt à la façon de le modifier... – On dirait qu'ils ont trop de "personnalité"! Et ils sont cause de désunion, voire de destruction.

436 Ton expérience, le fait de si bien connaître le monde, de savoir lire entre les lignes, une perspicacité excessive, l'esprit critique... Tout cela qui, dans tes relations et tes affaires t'a mené trop loin au point de te rendre un peu cynique; tout ce "réalisme excessif" (qui est un manque d'esprit surnaturel) a envahi jusqu'à ta vie intérieure. – Parce que tu n'es pas simple, tu es devenu par moments froid et cruel.

437 Au fond, tu es bon garçon, mais tu te prends pour Machiavel. – Rappelle-toi que l'on entre au Ciel si l'on est un homme honnête et bon et non pas un ennuyeux petit intrigant.

438 Ta bonne humeur est admirable... mais tout prendre, absolument tout... sur le ton de la plaisanterie – accorde-le-moi! – c'est dépasser les bornes. La réalité est tout autre: comme tu manques de volonté pour prendre au sérieux ce qui te concerne, tu te justifies en te moquant des autres qui sont meilleurs que toi.

439 Je ne nie pas que tu sois intelligent. Mais la passion désordonnée te fait agir comme un sot.

440 Tu es d'une instabilité de caractère! Ton clavier est endommagé: tu rends bien les notes les plus hautes et les plus basses..., mais celles du milieu ne résonnent pas, celles de la vie courante, celles que les autres écoutent d'ordinaire.

441 Pour ta gouverne: En une occasion mémorable, j'avais fait remarquer à cet homme noble, savant et fort, qu'il mettait en jeu un poste important dans son monde (il allait le perdre) pour défendre une cause sainte que les "bons" combattaient. – D'une voix empreinte de gravité humaine et surnaturelle, qui méprisait les honneurs de la terre, il me répondit: "c'est mon âme qui est en jeu".

442 C'est le diamant qui polit le diamant..., et les âmes, les âmes.

443 "Un grand signe est apparu dans le Ciel: une femme couronnée de douze étoiles; vêtue de soleil; la lune à ses pieds." Afin que toi et moi, et tous, nous ayons la certitude que rien ne porte aussi bien une personnalité à sa plénitude que de répondre à la grâce.
– Cherche à imiter la Sainte Vierge et tu seras pleinement homme – ou pleinement femme –, tout d'une pièce.

 «    PRIERE    » 

444 Conscients de nos devoirs, allons-nous passer un jour entier sans nous rappeler que nous avons une âme? De notre méditation quotidienne doivent fuser, sans cesse, des corrections, qui nous empêcheront de nous écarter du chemin.

445 Si l'on abandonne la prière, on vit tout d'abord de ses réserves spirituelles... et ensuite, de tricheries.

446 Méditation. – Tout le temps fixé, et à heure fixe. – Sinon, elle s'adaptera à nos convenances: ce qui est un manque de mortification. Et la prière sans mortification est peu efficace.

447 Tu manques de vie intérieure: parce que, pendant ta prière, tu ne considères pas les préoccupations des tiens, ni le prosélytisme– parce que tu ne t'efforces pas d'y voir clair de prendre des résolutions précises et de les mettre en pratique parce que tu n'as pas de vision surnaturelle dans ton étude, dans ton travail, dans tes conversations, dans tes rapports avec les autres...
– Comment va cette présence de Dieu, qui est la conséquence et la manifestation de ta prière?

448 Non?... Parce que tu n'en as pas eu le temps?... – Le temps, tu l'as! De plus que vont devenir tes activités si elles n'ont pas fait l'objet d'un mise en ordre quand tu les as méditées en présence du Seigneur? Sans cette conversation avec Dieu, comment achèveras-tu à la perfection le travail de la journée?... – Ecoute, c'est comme si tu alléguais un manque de temps pour ne pas étudier, tant les cours que tu donnes t'absorbent... Si l'on n'étudie pas, l'on ne peut donner de bons cours.
La prière passe avant tout le reste. Si tu le comprends et que tu ne le mets pas en pratique, ne me dis pas que tu manques de temps: tu ne veux pas la faire, tout simplement!

449 Prière, davantage de prière! – Cela peut paraître une incohérence maintenant, en période d'examens, de travail plus intense... Si, tu en as besoin: et pas seulement de cette prière qui est une pratique de piété habituelle; mais besoin aussi de prier à tes moments perdus; de prier entre deux occupations, au lieu de laisser ton esprit musarder sottement.
Peu importe si, malgré tes efforts, tu ne parviens pas à te concentrer et à te recueillir. Cette méditation peut avoir beaucoup plus de valeur que cette autre que tu as faite, en tout confort, dans l'oratoire.

450 Une coutume efficace pour parvenir à la présence de Dieu: chaque jour, la première audience est pour Jésus-Christ.

451 La prière n'est pas une prérogative des religieux: c'est le devoir des chrétiens, hommes et femmes du monde, qui se savent enfants de Dieu.

452 Bien sûr, tu dois suivre ton chemin: celui d'un homme d'action... à vocation contemplative.

453 Un catholique sans prière?... C'est comme un soldat sans armes.

454 Remercie le Seigneur du bien énorme qu'Il t'a octroyé en te faisant comprendre qu'"une seule chose est nécessaire". – Et que ta gratitude soit accompagnée de ta prière journalière, insistante pour ceux qui ne Le connaissent pas encore ou qui ne L'ont pas compris.

455 Lorsqu'ils cherchaient à te "pêcher", tu te demandais d'où ils pouvaient bien tirer cette force et ce feu qui enflamme tout. Depuis que tu t'exerces à la prière, tu as constaté qu'elle est la source qui jaillit près des vrais enfants de Dieu.

456 Tu négliges la méditation... Ne serait-ce pas par peur, parce que tu recherches l'anonymat, sans oser parler au Christ face à face? – Tu vois bien qu'il existe plus d'une façon de "négliger" ce moyen, même si l'on affirme y avoir recours.

457 Prière: c'est l'heure des intimités saintes et des résolutions fermes.

458 Que de bon sens dans la prière de cette âme qui disait: Seigneur, ne m'abandonne pas; tu ne vois donc pas qu'il y a "quelqu'un d'autre" qui me tire par les pieds?

459 Le Seigneur va-t-il de nouveau enflammer mon âme? – Il y a dans ta tête et dans la force profonde d'un désir lointain, qui est peut-être de l'espérance, l'assurance d'un oui... – En revanche, ton cœur et ta volonté – tu n'as que trop de l'un et trop peu de l'autre – teintent tout d'une mélancolie paralysante et crispée, comme une grimace, comme une moquerie amère.
Ecoute cette promesse du Saint-Esprit: "Dans peu de temps viendra Celui qui doit venir et Il ne tardera pas. En attendant le juste vivra de la foi."

460 La véritable prière, celle qui absorbe l'individu tout entier, ce n'est pas tant la solitude du désert qui la favorise que le recueillement intérieur.

461 Nous avions fait notre prière de l'après-midi en pleine campagne, à l'approche de la tombée de la nuit. Nous devions avoir une attitude un peu curieuse, pour un spectateur non averti: assis par terre, dans un silence qu'interrompait seulement la lecture de quelques points de méditation.
Cette prière faite dans un champ – "on y mettait du sien" – pour tous ceux qui venaient avec nous, pour l'Église, pour les âmes, s'est montrée agréable au Ciel et féconde: n'importe quel endroit est propice à une telle rencontre de Dieu.

462 Il me plaît que, dans ta prière, tu te laisses volontiers aller à parcourir beaucoup de kilomètres: tu contemples des terres différentes de celles que tu foules; sous tes yeux défilent des gens d'autres races; tu entends diverses langues... C'est comme un écho de ce commandement de Jésus: "euntes docete omnes gentes". – Allez, et enseignez le monde entier.
Pour arriver loin, toujours plus loin, allume ce feu d'amour chez ceux qui t'entourent; et tes rêves et tes désirs deviendront réalité: plus tôt, davantage et mieux!

463 Ta prière se déroulera parfois de façon discursive; d'autres fois, peu nombreuses sans doute, elle sera pleine de ferveur; et souvent peut-être, sèche, très, très sèche... Mais ce qui compte, c'est que toi, avec l'aide de Dieu, tu ne te décourages pas.
Songe à la sentinelle à son poste de garde: elle ignore si le Roi ou le chef d'Etat se trouve dans le palais; elle n'est pas au courant de ce qu'il fait et, la plupart du temps, la personnalité en question ne sait qui le garde.
– Rien de tout cela n'arrive avec notre Dieu. Il vit là où tu vis; Il s'occupe de toi; Il te connaît et Il connaît tes pensées les plus intimes...: n'abandonne pas le poste de garde de la prière!

464 Vois quel ensemble de raisons sans raison te présente l'ennemi, pour que tu abandonnes la prière: "je n'en ai pas le temps" – alors que tu es toujours en train de le perdre – "ce n'est pas pour moi", "j'ai le cœur sec".
Le problème de la prière n'est pas de parler ou de ressentir, mais d'aimer. Et l'on aime en s'efforçant de dire quelque chose au Seigneur, même si on ne Lui dit rien.

465 "Une minute de prière intense; et cela suffit." – Celui qui le disait ne priait jamais.
– Quel amoureux admettra qu'il suffise de contempler intensément pendant une minute la personne aimée?

466 Cet idéal de guerroyer et de vaincre dans les batailles du Christ ne deviendra réalité que par la prière et le sacrifice, par la Foi et l'Amour. – Donc... prions, croyons, souffrons, et Aimons!

467 La mortification est le pont-levis qui nous permet d'accéder facilement au château de la prière.

468 Ne faiblis pas: quelque indigne que soit la personne, quelque imparfaite que semble la prière, si celle-ci s'élève, humble et persévérante Dieu l'écoute toujours.

469 Seigneur, je ne mérite pas que tu m'écoutes, parce que je suis méchant, disait dans sa prière une âme pénitente. Et elle ajoutait: maintenant écoute-moi, "quoniam bonus" – parce que Tu es bon.

470 Après avoir envoyé ses disciples prêcher le Seigneur les réunit, à leur retour et les invite à aller avec Lui dans un endroit solitaire pour qu'ils se reposent... Jésus! qu'a-t-il pu alors leur demander, et leur dire? Eh bien... l'Evangile est toujours actuel.

471 Je te comprends parfaitement lorsque tu m'écris à propos de ton apostolat: "je vais faire trois heures de prière avec de la physique. Ce sera un bombardement pour que "tombe" une autre position, qui se trouve à l'autre bout de la table de la bibliothèque..., et dont vous avez déjà fait la connaissance lors de votre passage."
Je me souviens de ta joie, quand tu m'entendais dire qu'entre la prière et le travail il ne doit pas y avoir de solution de continuité.

472 Communion des saints: il en a bien fait l'expérience ce jeune ingénieur lorsqu'il affirmait: "Père, tel jour, à telle heure, vous étiez en train de prier pour moi."
Telle est et telle sera toujours la première aide de fond que nous devons apporter aux âmes: la prière.

473 Habitue-toi à réciter des prières vocales le matin, quand tu t'habilles, comme les petits enfants. – Et tu auras davantage de présence de Dieu ensuite, tout au long de la journée.

474 Le Rosaire est très efficace pour ceux qui ont pour armes l'intelligence et l'étude: lorsqu'ils implorent Notre Dame, l'apparente monotonie de ces enfants qui supplient leur Mère détruit en eux tout germe de vaine gloire et d'orgueil.

475 "Vierge Immaculée, je sais bien que je suis un pauvre misérable, que je ne fais qu'augmenter tous les jours le nombre de mes péchés..." Tu m'as dit que c'est ainsi que tu parlais à Notre Dame, l'autre jour.
Et je t'ai conseillé, en toute certitude, de réciter le Saint Rosaire: merveilleuse monotonie des "Je vous salue" qui purifie la monotonie de tes péchés!

476 Voici une triste manière de ne pas réciter le chapelet: le laisser pour la dernière minute.
Au moment de se coucher on le récite, pour le moins, de travers et sans méditer les mystères. Alors, on évite difficilement la routine qui étouffe la véritable, la seule piété.

477 Le chapelet ne se prononce pas seulement du bout des lèvres, en mâchonnant les "Je vous salue" les uns après les autres. C'est ainsi que marmonnent les bigotes et les bigots. Pour un chrétien, la prière vocale doit s'enraciner dans le cœur, de sorte que, durant la récitation du chapelet, l'esprit puisse s'engager dans la contemplation de chacun des mystères.

478 Tu remets toujours ton chapelet à plus tard, et tu finis par l'omettre car tu as sommeil. – Si tu n'as pas d'autres moments, récite-le dans la rue et sans que personne ne s'en rende compte. En outre, cela entretiendra mieux la présence de Dieu en toi.

479 "Prie pour moi", lui ai-je demandé comme je le fais toujours. Et il m'a répondu étonné: "mais vous arrive-t-il quelque chose?"
J'ai dû lui préciser que quelque chose nous arrive ou nous survient toujours à tous, à chaque instant; et j'ai ajouté que, lorsque la prière vient à manquer, il y a davantage de choses "qui se passent et qui lassent".

480 Renouvelle pendant la journée tes actes de contrition: tu vois, on offense continuellement Jésus et, malheureusement, les actes de réparation ne vont pas au même rythme.
C'est pourquoi je n'ai jamais cessé de le redire: les actes de contrition, plus on en fait, mieux cela vaut! Fais écho à mes paroles, par ta vie et par tes conseils.

481 Que de grâce dans cette scène de l'Annonciation. Marie se recueille en prière... – combien de fois n'avons-nous pas médité cela! Elle utilise ses cinq sens et toutes ses facultés pour parler avec Dieu. Et c'est dans la prière qu'elle apprend la Volonté divine; et par la prière elle en fait la vie de sa vie: n'oublie pas l'exemple de la Sainte Vierge!

 «    TRAVAIL    » 

482 Le travail est la vocation initiale de l'homme; c'est une bénédiction de Dieu, et ceux qui le considèrent comme un châtiment se trompent lamentablement.
Le Seigneur, qui est le meilleur des pères, a placé le premier homme au Paradis, "ut operaretur" – pour qu'il travaille.

483 Étude, travail: devoirs inéluctables pour tout chrétien; moyens de nous défendre contre les ennemis de l'Église et, grâce à notre ascendant professionnel, d'attirer beaucoup d'autres âmes qui, tout en étant bonnes, luttent dans la solitude. Ils constituent une arme fondamentale pour qui veut être apôtre au milieu du monde.

484 Je prie Dieu pour que l'adolescence et la jeunesse de Jésus te servent également de modèle: aussi bien quand il discutait avec les docteurs du Temple, que lorsqu'il travaillait dans l'atelier de Joseph.

485 Les trente-trois années de Jésus!...: dont trente années de silence et d'obscurité; de soumission et de travail..

486 Ce gaillard m'écrivait: "mon idéal est si grand que seule la mer peut le contenir". – Je lui ai répondu: et le Tabernacle est donc si "petit"? Et l'atelier de Nazareth, si "commun"? – C'est dans la grandeur de ce qui est ordinaire qu'Il nous attend!

487 Devant Dieu, aucune occupation n'est par elle-même grande ou petite. Tout acquiert la valeur de l'Amour que l'on met à le réaliser.

488 L'héroïsme du travail consiste à "achever" chaque tâche que l'on entreprend.

489 J'y insiste: c'est dans la simplicité de ton travail ordinaire, dans les détails monotones de chaque jour que tu dois découvrir ce qui est caché aux yeux de beaucoup, le secret qui donne grandeur et nouveauté: l'Amour.

490 Tu me dis que cette idée t'aide beaucoup à présent: depuis l'époque des premiers chrétiens, combien de commerçants ont dû devenir saints!
Et tu veux prouver que, même aujourd'hui, cela est possible... – Le Seigneur ne t'abandonnera pas dans ta résolution.

491 Tu as, toi aussi, une vocation professionnelle qui "t'aiguillonne". – Eh bien, cet "aiguillon" est un hameçon pour pêcher des hommes.
Rectifie, par conséquent, ton intention et ne manque pas d'acquérir la meilleure réputation professionnelle possible, pour le service de Dieu et des âmes. Notre Seigneur compte aussi "là-dessus".

492 Pour terminer une chose, il faut commencer par la faire.
– Cela te semble une lapalissade, mais cette simple décision te manque si souvent! Et... comme satan se réjouit de ton inefficacité!

493 On ne peut sanctifier un travail qui, humainement parlant, serait bâclé, parce que nous ne devons pas offrir à Dieu des choses mal faites.

494 A force de ne pas soigner les détails, on peut rendre compatibles le fait de travailler sans relâche et de vivre en parfait pantouflard.

495 Tu m'as demandé ce que tu peux offrir au Seigneur. – Je n'ai pas besoin de réfléchir à ma réponse: les mêmes choses que d'habitude, mais mieux achevées, avec une ultime finition d'amour qui te fera penser davantage à Lui et moins à toi.

496 Une mission toujours actuelle et héroïque pour un chrétien courant: réaliser saintement les tâches les plus variées, y compris celles qui paraissent les plus indifférentes.

497 Travaillons, et travaillons beaucoup et bien, sans oublier que notre meilleure arme est la prière. C'est pourquoi, je ne me lasse pas de répéter que nous devons être des âmes contemplatives au milieu du monde, qui s'efforcent de transformer leur travail en prière.

498 Tu m'écris depuis ta cuisine, près du fourneau. L'après-midi commence. Il fait froid. A côté de toi, ta petite sœur (elle est la dernière qui a découvert cette folie divine de vivre à fond sa vocation chrétienne) épluche des pommes de terre. Apparemment, penses-tu, son travail est le même qu'avant. Néanmoins il y a une si grande différence! – C'est vrai: avant elle ne faisait "qu'" éplucher des pommes de terre; maintenant, elle se sanctifie en épluchant des pommes de terre.

499 Tu affirmes que tu comprends peu à peu ce qu'est l'"âme sacerdotale"... Ne te fâche pas si je te réponds que les faits démontrent que tu ne le comprends qu'en théorie. – Il t'arrive chaque jour la même chose: à la tombée de la nuit, lors de ton examen de conscience, il n'y a que désirs et résolutions; le matin et l'après-midi, pendant ton travail, il n'y a qu'obstacles et excuses.
Est-ce donc ainsi que tu vis le "sacerdoce saint, pour offrir des victimes spirituelles, agréables à Dieu par Jésus-Christ"?

500 En te remettant à ton travail ordinaire, un cri de protestation t'a comme échappé: c'est toujours pareil! Et moi, je t'ai dit: – oui, c'est toujours pareil. Mais cette tâche banale, semblable à celle qu'effectuent tes collègues de travail, doit être pour toi une prière continuelle, avec les mêmes paroles intimes et familières, mais chaque jour sur une mélodie différente.
C'est justement notre mission que de transformer la prose de cette vie en alexandrins, en un poème héroïque.

501 "Stultorum infinitus est numerus" – le nombre des sots est infini – lit-on dans l'Ecriture. Et il semble croître de jour en jour. – Dans les postes les plus divers, dans les situations les plus inattendues, combien d'étourderies et quels manques de jugement tu devras supporter, drapés sous la cape du prestige que confèrent les charges – et même les "vertus"! Mais je ne m'explique pas que tu perdes le sens surnaturel de ta vie et que tu demeures indifférent: ta condition intérieure est bien basse si tu supportes ce genre de situations – et tu n'as d'autre solution que de les supporter! – pour des raisons humaines...
Si tu n'aides pas ceux-là à découvrir le chemin, grâce à ton travail responsable, achevé – sanctifié! – tu deviens sot comme eux. Ou alors, tu es leur complice.

502 Il est bon que tu trimes, que tu travailles dur... De toute façon, mets tes activités professionnelles à leur place: elles ne constituent que des moyens pour parvenir à ta fin; on ne peut jamais les considérer, tant s'en faut, comme l'essentiel.
Combien de "professionnalites" empêchent l'union à Dieu!

503 Pardonne-moi mon insistance: l'instrument, le moyen, ne doit pas devenir une fin. – Si la houe pesait cent kilos, au lieu de son poids normal, le laboureur ne pourrait biner avec cet outil; il dépenserait toute son énergie à la transporter, et les semences ne pourraient prendre racine, parce qu'elles resteraient inutilisées.

504 Il s'est toujours produit la même chose: aussi droite et noble que soit son action, celui qui travaille éveille facilement des jalousies, des suspicions, des envies. – Si tu occupes un poste de direction, rappelle-toi que ces défiances de certains à l'égard d'un collègue précis ne constituent pas un motif suffisant pour te passer de celui qui est "fiché"; elles montrent plutôt qu'il peut être utile dans des entreprises de plus grande envergure.

505 Des obstacles?... – Parfois il y en a. – Mais, dans certains cas, c'est toi qui les inventes par facilité ou par lâcheté. – Quelle habileté que celle du diable qui fait paraître tel ou tel prétexte pour qu'on ne travaille pas...! Il sait bien que l'oisiveté est la mère de tous les vices.

506 Tu déploies une activité infatigable. Mais tu te démènes dans le désordre et, par conséquent, tu manques d'efficacité. – Tu me rappelles ce qu'une fois j'ai entendu, de la bouche même de quelqu'un de très autorisé. J'ai voulu faire l'éloge d'un subordonné devant son supérieur, et j'ai commenté: comme il travaille! – J'ai obtenu la réponse suivante: dites plutôt: comme il bouge! – Tu déploies une activité infatigable et stérile... Oh! comme tu peux bouger!

507 Pour diminuer l'importance du travail d'un autre, tu as insinué: il n'a fait que son devoir.
Et moi d'ajouter: cela te semble-t-il peu? Si nous accomplissons notre devoir, le Seigneur nous donne le bonheur du Ciel: "euge serve bone et fidelis... intra in gaudium Domini tui" – très bien, serviteur bon et fidèle, entre dans la joie éternelle!

508 Le Seigneur a le droit "qu'à tout instant" nous lui rendions gloire – et chacun de nous en a l'obligation. Par conséquent, si nous gaspillons de notre temps, nous dérobons de la gloire à Dieu.

509 Tu sais bien que le travail est urgent, et qu'une seule minute accordée au laisser-aller suppose que du temps est soustrait à la gloire de Dieu. – Qu'attends-tu alors pour profiter consciencieusement de tous les instants? En outre je te conseille de considérer si ces minutes que tu as en trop, tout au long de ta journée – additionnées, elles font des heures! – ne relèvent pas du désordre ou de la fainéantise.

510 La tristesse et l'inquiétude sont proportionnelles au temps perdu. – Lorsque tu éprouveras une sainte impatience à tirer profit de toutes les minutes, tu seras comblé de joie et de paix, car tu ne penseras pas à toi.

511 Des préoccupations?... Moi, t'ai-je dit, je n'ai pas de préoccupations, car j'ai beaucoup d'occupations.

512 Tu passes par une étape critique: une certaine crainte diffuse; des difficultés pour adapter ton plan de vie; un travail accablant: les vingt-quatre heures de la journée ne te suffisent pas pour accomplir toutes tes obligations...
– As-tu essayé de suivre le conseil de l'Apôtre: "que tout se fasse dans l'harmonie et avec ordre"? Autrement dit, en la présence de Dieu, avec Lui, par Lui et seulement pour Lui.

513 Lorsque tu établis ton emploi du temps, tu dois aussi te demander comment tu profiteras des moments libres qui peuvent se présenter à l'improviste.

514 J'ai toujours compris le repos comme un éloignement des contingences quotidiennes, jamais comme des journées d'oisiveté.
Se reposer c'est faire le plein: amasser des forces, faire provision d'idéaux, de projets... En peu de mots: changer d'occupation, pour revenir ensuite, avec un nouvel entrain, aux occupations habituelles.

515 Maintenant que tu as beaucoup de choses à faire, tous tes "problèmes" ont disparu... – Sois sincère: comme tu as décidé de travailler pour Lui, tu n'as plus de temps pour penser à tes égoïsmes.

516 Les oraisons jaculatoires ne gênent pas plus le travail que le battement du cœur n'embarrasse le mouvement du corps.

517 Sanctifier son propre travail n'est pas une chimère; c'est la mission de tout chrétien...: la tienne et la mienne.
– C'est ce qu'a découvert cet ajusteur, qui faisait ce commentaire: "elle me rend fou de joie cette certitude que moi, en maniant le tour et en chantant, en chantant beaucoup – intérieurement et extérieurement – je peux devenir saint...: quelle bonté que celle de notre Dieu!"

518 La tâche te paraît ingrate, notamment lorsque tu constates combien tes camarades aiment peu Dieu, en même temps qu'ils fuient la grâce et le bien que tu désires leur procurer.
Tu dois chercher à compenser toutes leurs omissions, en te donnant à Dieu également dans ton travail – comme tu ne l'avais encore jamais fait jusqu'à présent – en le transformant en une prière qui monte vers le Ciel pour l'humanité.

519 Travailler avec joie n'équivaut pas à travailler "en s'amusant", sans profondeur, comme pour se débarrasser d'un poids gênant.
– Cherche à éviter que, par étourderie ou par légèreté, tes efforts ne perdent leur valeur et, qu'au bout du compte, tu t'exposes à te présenter devant Dieu les mains vides.

520 Certains agissent avec des préjugés dans l'exercice de leur travail: par principe, ils ne se fient à personne et, bien sûr, ils ne comprennent pas le besoin de chercher à sanctifier leur activité. Si tu leur en parles, ils te répondent qu'il n'est pas question d'ajouter une charge supplémentaire à celle de leur propre travail, qu'ils supportent de mauvais gré, comme un poids.
– Voilà l'une de ces batailles de paix qu'il faut gagner: trouver Dieu dans ses occupations professionnelles et – avec Lui et comme Lui – se mettre au service des autres.

521 Tu prends peur face aux difficultés, et tu recules. Sais-tu en quels termes on peut résumer ton comportement?: facilité, facilité, et facilité! Tu avais dit que tu étais prêt à te dépenser, et à te dépenser sans compter, et tu en restes au stade de l'apprenti héros. Réagis avec maturité!

522 Toi qui es étudiant, penche-toi sur tes livres, plein d'un esprit apostolique, avec l'intime conviction que ces heures, si nombreuses, sont déjà – et maintenant même – un sacrifice spirituel offert à Dieu, bénéfique pour l'humanité, pour ton pays, pour ton âme.

523 Ton cheval de bataille a pour nom l'étude: tu te proposes mille fois de mettre ton temps à profit et, cependant, n'importe quoi te distrait. Parfois, tu es fatigué de toi-même, à cause du peu de volonté dont tu fais preuve; bien que tu recommences de nouveau tous les jours.
As-tu essayé d'offrir ton étude pour des intentions apostoliques précises?

524 Il est plus facile de s'agiter que d'étudier, et c'est moins efficace.

525 Si tu sais que l'étude c'est de l'apostolat et que tu te contentes d'étudier pour te tirer d'affaire, il est évident que ta vie intérieure va mal.
Par ce laisser-aller, tu perds le bon esprit, et à l'image de ce qui est arrivé au travailleur de la parabole qui, par fourberie, avait caché le talent reçu, si tu ne changes pas, tu peux t'exclure toi-même de l'amitié de Notre Seigneur pour t'embourber dans tes calculs de convenances personnelles.

526 Il faut étudier... Mais cela ne suffit pas.
Que peut-on obtenir de quelqu'un qui se tue pour alimenter son égoïsme, ou de celui qui ne poursuit d'autre objectif que de s'assurer une vie tranquille, pour dans quelques années? Il faut étudier..., pour gagner le monde et le conquérir pour Dieu. Alors, nous rehausserons le niveau de notre effort, et nous veillerons à ce que tout travail accompli devienne une rencontre avec Notre Seigneur, et à ce qu'il serve d'appui aux autres, à ceux qui suivront notre chemin...
– De cette façon, l'étude deviendra prière.

527 Après avoir connu tant de vies héroïques, vécues pour Dieu, et sans qu'elles aient quitté leur place, je suis parvenu à cette conclusion: pour un catholique, travailler, ce n'est pas simplement accomplir sa tâche, c'est aimer! Se dépasser joyeusement, et toujours, dans le devoir et dans le sacrifice.

528 Lorsque tu auras compris cet idéal de travail fraternel pour le Christ, tu te sentiras plus grand, plus ferme, et aussi heureux qu'on peut l'être dans ce monde, que tant d'autres s'évertuent à disloquer et à rendre amer, parce qu'ils suivent exclusivement leur moi.

529 La sainteté est faite d'héroïsme. – Par conséquent, dans le travail on nous demande l'héroïsme de bien "achever" les tâches qui nous reviennent, jour après jour, y compris lorsque ce sont les mêmes occupations qui se répètent. Sinon, c'est que nous ne voulons pas être saints!

530 Ce prêtre de nos amis m'a convaincu. Il me parlait de son travail apostolique, et m'assurait qu'il n'y a pas d'occupations peu importantes. Sous ce champ couvert de roses, disait-il, se cache l'effort silencieux de tant d'âmes qui, par leur travail et leur prière, par leur prière et leur travail, ont obtenu du ciel une pluie de grâces, torrentielle, et qui fertilise tout.

531 Mets sur ta table de travail, dans ta chambre, dans ton portefeuille..., une image de Notre Dame et dirige ton regard vers elle quand tu commences ton travail, pendant que tu le réalises et lorsque tu le termines. Elle t'obtiendra (je te l'assure!) la force pour faire de ton occupation un dialogue amoureux avec Dieu.

 «    FRIVOLITÉ    » 

532 Lorsqu'on réfléchit, à tête reposée, aux misères de la terre, et que l'on compare ce panorama aux richesses de la vie vécue avec le Christ, à mon avis, on ne trouve qu'un mot pour qualifier, et d'une formule bien frappée, le chemin que choisissent les gens: sottise, sottise, sottise! Ce n'est pas seulement que la plupart des hommes se trompent. Ce qui nous arrive est bien pire: nous sommes de parfaits idiots.

533 Triste chose que tu ne veuilles pas te cacher comme une pierre dans les fondations, pour soutenir l'édifice. Mais que tu deviennes une pierre d'achoppement pour les autres..., cela me paraît criminel!

534 Ne te scandalise pas qu'il y ait de mauvais chrétiens qui s'agitent et qui ne pratiquent pas. Le Seigneur – écrit l'Apôtre – "rendra à chacun selon ses œuvres": à toi, pour les tiennes, et à moi, pour les miennes.
– Si toi et moi nous nous décidons à bien nous conduire, il y aura pour le moment deux coquins de moins dans le monde.

535 Tant que tu ne lutteras pas contre la frivolité, ta tête ressemblera à l'échoppe d'un brocanteur: elle ne conservera que des utopies, des illusions et... des vieilleries.

536 Tu as une bonne dose d'insolence: si tu l'utilisais avec du sens surnaturel, elle te permettrait d'être un chrétien formidable... – Mais, vu l'usage que tu en fais, tu n'es qu'un formidable insolent.

537 Par ta façon de tout prendre à la légère, tu me rappelles cette vieille histoire: Au lion! lui disaient-ils. Et le naïf naturaliste de répondre: – Qu'est-ce que cela peut me faire? Moi, je chasse les papillons!

538 Redoutable est l'ignorant qui est en même temps un travailleur infatigable.
Entretiens le désir de te former davantage, même si tu croules de vieillesse.

539 Une excuse propre à l'homme frivole et égoïste: "je n'aime m'engager en rien".

540 Tu ne veux ni l'un, le mal, ni l'autre, le bien,... Et ainsi, boîtant des deux jambes, tu te trompes de chemin et, de plus, ta vie est pleine de vide.

541 "In medio virtus..." – La vertu se situe dans le juste milieu, dit la sage maxime, pour nous écarter des extrémismes. – Mais ne va pas tomber dans l'erreur de changer ce conseil en euphémisme, pour cacher ton laisser-aller, ta ruse, ta tiédeur, ta désinvolture, ton manque d'idéal, ton conformisme.
Médite ces paroles de la Sainte Ecriture: "Ah si tu étais froid ou chaud! Mais puisque tu n'es ni froid ni chaud, mais tiède, je te vomirai de ma bouche".

542 Tu n'arrives jamais à l'essentiel. Tu en restes toujours à l'accessoire! Permets-moi de te redire, avec la Sainte Ecriture: tu ne fais que "parler en l'air"!

543 Ne te comporte pas comme ces gens qui, à un sermon, au lieu de s'en appliquer la leçon, pensent: comme cela va bien à untel!

544 Parfois, certains pensent que la calomnie est faite sans mauvaise intention: on peut supposer, disent-ils, que l'ignorance explique ce qu'elle ne connaît pas ou ne comprend pas, pour se donner l'air d'être au courant.
Mais cette ignorance est doublement mauvaise: parce qu'ignorante et mensongère.

545 Ne parle pas avec tant d'irresponsabilité... Ne comprends-tu pas que dès que tu jettes la première pierre, d'autres, dans l'anonymat, organisent une lapidation?

546 Est-ce toi-même qui crée cette atmosphère de mécontentement parmi ceux qui t'entourent? – Pardonne-moi alors si je te dis qu'en plus d'être misérable, tu es... stupide.

547 Devant le malheur ou l'erreur, c'est une triste satisfaction que de pouvoir dire: "je l'avais prévu".
Cela signifierait que le malheur d'autrui te laissait indifférent; si c'était en ton pouvoir, tu devais y porter remède.

548 Il y a bien des façons de semer la confusion... – Il suffit, par exemple, de prendre une exception pour une règle générale.

549 Tu dis que tu es catholique... – C'est pourquoi tu me fais bien de la peine, lorsque je constate que tes convictions n'ont pas la solidité qu'il faudrait pour que tu vives un catholicisme actif, sans solutions de continuité et sans exceptions.

550 Si elle n'était pas aussi pénible, elle serait drôle, cette naïveté qui te fait accepter (par légèreté, ignorance, complexe d'infériorité...) les plaisanteries les plus grossières.

551 Les sots, les sans-gêne, les hypocrites, imaginent que les autres sont comme eux... Et le plus pénible, c'est qu'ils les traitent comme s'ils l'étaient vraiment.

552 Mauvaise chose si tu perdais ton temps qui appartient non pas à toi mais à Dieu, et à sa gloire. Mais si, en plus, tu fais perdre leur temps aux autres, d'une part, ton ascendant s'affaiblit, d'autre part, tu réduis frauduleusement la gloire que tu dois à Dieu.

553 Il te manque la maturité et le recueillement propres à celui qui avance dans la vie, sûr d'avoir un idéal, un but. – Prie la Sainte Vierge, pour apprendre à exalter Dieu de toute ton âme, et sans te disperser de quelque façon.

 «    NATUREL    » 

554 Le Christ ressuscité: le plus grand des miracles n'a été vu que par quelques-uns..., ceux qui devaient le voir. Le naturel est la griffe des entreprises divines.

555 Quand on travaille en tout et pour tout pour la gloire de Dieu on ne fait rien qu'avec naturel, et simplement, comme quelqu'un de pressé, qui ne peut s'arrêter à "plus d'ostentations", pour ne pas perdre l'unique, l'incomparable fréquentation de Notre Seigneur.

556 Indigné, tu demandais: pourquoi le cadre et les moyens d'une entreprise apostolique doivent-ils être laids, sales... et compliqués? – Et tu ajoutais: alors que cela coûte le même prix! – Pour moi, ton indignation m'a paru très raisonnable. Et j'ai pensé que Jésus s'adressait à tous et les attirait tous: les pauvres et les riches, les savants et les ignorants, les joyeux et les tristes, les jeunes et les vieux... Que sa figure est aimable et naturelle – surnaturelle!

557 Pour être efficace, être naturel! Même entre les mains d'un grand peintre, que peut-on attendre d'un pinceau si on le recouvre d'un capuchon en soie?

558 Pour les autres, les saints se révèlent toujours comme des gens "peu faciles".

559 Les saints, des anormaux?... L'heure est venue d'en finir avec ce préjugé.
Grâce à l'ascétique chrétienne, si naturelle et surnaturelle à la fois, nous devons enseigner que même les phénomènes mystiques n'impliquent pas le moindre signe d'anormalité: tel est bien le naturel de ces phénomènes... Comme d'autres processus physiques ou physiologiques ont le leur.

560 Je te parlais de l'horizon qui s'ouvre devant nos yeux, et du chemin que nous devons parcourir. – Je n'y vois pas d'objections, déclares-tu, comme étonné de "ne pas en trouver"...
– Grave-le bien dans ta tête: il ne doit pas y en avoir!

561 Evite la flatterie ridicule que tu adresses parfois, peut-être de façon inconsciente, à celui qui est à la tête, en te faisant systématiquement le porte-parole de ses goûts ou de ses opinions, sur des points peu importants.
– Mais veille encore plus à ne pas vouloir montrer ses défauts comme des traits divertissants, en tombant dans une familiarité qui lui ôterait son autorité; quel triste service tu lui rendrais, si tu le chargeais en faisant paraître amusant ce qui est mauvais!

562 Tu crées autour de toi un climat artificiel, tout de méfiance et de suspicion: quand tu parles, tu donnes l'impression de jouer aux échecs, posant chaque mot en pensant au quatrième mouvement qui va suivre.
Observe bien que lorsque l'Evangile décrit la triste image, cauteleuse et hypocrite des scribes et des pharisiens, il rapporte que ces gens posaient des questions à Jésus, qu'ils lui exposaient des problèmes, "ut caperent eum in sermone" (pour déformer ses paroles!) Fuis un tel comportement.

563 Le naturel n'a rien à voir avec la grossièreté, ni avec la saleté, la lésinerie ou la mauvaise éducation.
Certains s'obstinent à réduire le service de Dieu au seul travail avec le monde de la misère et – pardonnez-moi – des poux. Cette tâche est et sera toujours nécessaire et admirable; mais, si nous en restions là, d'une part nous délaisserions l'immense majorité des âmes; ensuite, lorsque nous aurons tiré les nécessiteux de cette situation, allons-nous les ignorer?

564 Tu es indigne? – Eh bien... tâche de devenir digne. Et n'en parlons plus.

565 Ce désir d'être extraordinaire!... – Voilà qui est bien banal!

566 Bienheureuse es-tu parce que tu as cru, dit Elisabeth à notre Mère. – L'union à Dieu, la vie surnaturelle, comporte toujours l'exercice attrayant des vertus humaines: parce qu'Elle "porte" le Christ, Marie apporte la joie chez sa cousine.

 «    VÉRACITÉ    » 

567 Tu faisais ta prière devant un Crucifix, et tu as pris cette décision: mieux vaut souffrir pour la vérité, plutôt que la vérité ait à souffrir de moi.

568 Très souvent la vérité est si invraisemblable!... n'est-ce parce qu'elle implique toujours une vie cohérente?

569 Si cela te gêne qu'on te dise la vérité, alors... pourquoi poses-tu des questions? – Aurais-tu la prétention qu'on te réponde avec ta vérité, pour justifier tes égarements?

570 Tu as beaucoup de respect pour la vérité, assures-tu... Est-ce pour cela que tu la considères toujours depuis une aussi "respectueuse" distance?

571 Ne te comporte pas comme un benêt: ce n'est jamais du fanatisme que de vouloir chaque jour mieux connaître, mieux aimer et défendre avec une plus grande assurance la vérité que tu dois connaître, aimer et défendre.
Par contre (et je le dis sans crainte) ceux qui, au nom d'une fausse liberté, s'opposent à cette conduite cohérente tombent dans le sectarisme.

572 Cela arrivait aussi à l'époque de Jésus-Christ: il est facile de dire non; de jeter l'interdit sur une vérité de foi ou de la mettre entre parenthèses. – Toi, qui te déclares catholique, tu dois partir du "oui".
– Ensuite, grâce à l'étude, tu seras à même d'exposer les raisons de ta certitude: l'absence de contradictions (car il ne peut y en avoir) entre la Vérité et la science, entre la Vérité et la vie.

573 N'abandonne pas la tâche, ne t'écarte pas du chemin, même si tu dois vivre à côté de personnes pleines de préjugés, comme si la base des raisonnements ou le sens des termes était défini par leur comportement ou par leurs affirmations à eux.
– Efforce-toi de te faire comprendre..., mais, si tu n'y parviens pas, poursuis ton chemin.

574 Tu trouveras des gens que tu pourras difficilement convaincre: ils sont entêtés et bornés... Hormis ces cas, prends la peine de tirer au clair les divergences, et de les tirer au clair avec toute la patience qu'il faudra.

575 Certains n'entendent – ne désirent entendre – que les mots qu'ils ont en tête.

576 Pour bien des gens, la compréhension qu'ils exigent des autres est que tous passent dans leur camp.

577 Je ne peux croire à ta véracité, si tu n'éprouves un malaise, et un malaise gênant! face au mensonge le plus petit, le plus inoffensif, car il n'a rien de petit ni d'inoffensif: c'est une offense à Dieu!

578 Pourquoi cette bassesse d'intention quand tu regardes, quand tu écoutes, lis et parles? pourquoi cherches-tu à recueillir le "mal" qui se trouve seulement dans ton âme, et non dans l'intention des autres?

579 Quand celui qui lit n'a pas de droiture d'intention, il lui est difficile de découvrir la droiture de celui qui écrit.

580 Le sectaire ne voit que sectarisme dans toutes les activités des autres. Il mesure le prochain à la mesure mesquine de son cœur.

581 Cet homme de gouvernement m'a fait de la peine. Il pressentait l'existence de certains problèmes, des problèmes normaux, d'ailleurs, dans la vie... Mais il a pris peur, il a été contrarié quand il en a été informé. Il préférait les ignorer, vivre dans le demi-jour ou dans la pénombre de sa vision, pour rester tranquille.
Je lui ai conseillé de "prendre le taureau par les cornes", pour que justement ces problèmes disparaissent; et je l'ai assuré qu'alors, que vraiment alors, il connaîtrait la vraie paix.
Toi, ne résous pas tes propres problèmes, ni ceux d'autrui, en les ignorant: ce serait de la facilité, de la paresse, ce serait ouvrir la porte à l'action du diable.

582 As-tu accompli ton devoir?... Ton intention a-t-elle été droite?... Oui? – Alors ne t'inquiète pas s'il y a des gens anormaux, qui voient le mal qui n'existe que dans leur regard.

583 D'un ton inquisiteur ils t'ont demandé si tu jugeais ta décision bonne ou mauvaise, une décision qu'eux-mêmes considéraient comme indifférente.
Et, la conscience sûre, tu leur as répondu: "je sais seulement deux choses: que mon intention est pure et que... je sais bien ce qu'elle me coûte". Et tu as ajouté: Dieu est la raison et la fin de ma vie, c'est pourquoi je suis certain qu'il n'y a rien d'indifférent.

584 Tu lui as expliqué tes idéaux et ta conduite de catholique, sûre et ferme, et il semblait qu'il en acceptait, qu'il en comprenait le chemin. – Mais ensuite un doute t'a pris: et si sa compréhension était étouffée par les mœurs peu ordonnées qui sont les siennes...
– Cherche-le de nouveau, et explique-lui que la vérité, on l'accepte pour la vivre ou pour essayer de la vivre.

585 Qui sont-ils pour me mettre à l'épreuve?... Pourquoi doivent-ils se méfier? me dis-tu. – Ecoute: de ma part, réponds-leur qu'ils se méfient de leur propre misère,... et poursuis tranquillement ta route.

586 Ils te font pitié... – Sans le moindre courage, ils jettent la pierre puis ils cachent leur main.
Ecoute ce que le Saint-Esprit dit d'eux: "confus et honteux demeureront tous les fauteurs d'erreurs; ils seront tous couverts d'opprobre". Ce jugement s'accomplira, inexorable.

587 Beaucoup de gens décrient cette entreprise apostolique; ils n'en disent que du mal?... – Eh bien, dans la mesure où tu proclameras la vérité, au moins s'en trouvera-il un pour ne pas critiquer.

588 Au milieu du champ de blé le plus beau et le plus prometteur, il est facile de ramasser des tombereaux de sisymbre, de coquelicots et de chiendent...
– Sur la personne la plus intègre et la plus responsable – et ce, tout au long de l'histoire – il y a de quoi remplir des pages noires... Songe également à tout ce que l'on a dit et écrit à l'encontre de Notre Seigneur Jésus-Christ.
– Comme pour le champ de blé, je te conseille de ramasser les épis blancs et grenus de la véritable vérité.

589 Pour toi, qui m'as assuré que tu voulais avoir une conscience droite: n'oublie pas qu'admettre une calomnie, et ne pas la combattre, c'est devenir un collecteur d'ordures.

590 Ce que tu appelles ouverture, cette propension qui te fait admettre n'importe quelle assertion contre quelqu'un que tu n'as pas écouté, ce ne peut être de la justice..., et moins encore de la charité.

591 La calomnie fait parfois du tort à ceux qui en sont l'objet... Mais en vérité elle déshonore ceux qui la lancent et la diffusent..., et qui traînent ensuite un tel poids au fond de leur âme.

592 Tu te demandes, plein de peine: pourquoi tant de médisants...? – Les uns le sont par erreur, par fanatisme ou par malice. – Mais le plus grand nombre répètent un bobard par inertie, par superficialité, par ignorance.
Aussi j'insiste de nouveau: quand tu ne pourras pas faire des louanges, et qu'il ne sera pas nécessaire de parler, tais-toi!

593 Calomniée, leur victime souffre en silence: et "ses bourreaux" de s'acharner sur elle, forts de leur courageuse lâcheté! Méfie-toi des affirmations catégoriques quand ceux qui les défendent n'ont pas essayé, ou n'ont pas voulu parler avec l'intéressé.

594 Il existe bien des façons de mener une enquête. Avec un peu de malice, en écoutant les médisances, on recueille dix volumes in-quarto contre n'importe quelle personne honorable ou n'importe quelle institution digne d'intérêt. – Surtout si cette personne ou cette institution travaillent avec efficacité. – Et plus encore, quand il s'agit d'une efficacité apostolique...
Triste tâche que de monter une telle opération! mais il y a plus triste encore: servir de haut-parleurs à ces affirmations, iniques et superficielles.

595 Il disait, plein de peine: ces gens-là n'ont pas l'intelligence du Christ, mais le masque du Christ... C'est pourquoi, dépourvus de tout sens chrétien, ils n'atteignent pas la vérité, et ils ne donnent pas de fruit.
Nous les enfants de Dieu, nous ne pouvons pas oublier que notre Maître a proclamé: "Celui qui vous écoute, M'écoute..." – C'est pourquoi... nous devons essayer d'être le Christ; mais jamais sa caricature.

596 Dans ce cas comme dans beaucoup d'autres, les hommes s'agitent: ils croient tous avoir raison..., mais c'est Dieu qui les guide: au-delà de leurs raisons particulières, insondable et amoureuse, la Providence de Dieu finira par triompher.
Laisse donc le Seigneur te "guider"! ne contrecarre pas ses plans, même s'ils s'opposent aux plus "fondamentaux de tes principes".

597 Un pénible constat: négligeant de connaître les acquis précieux de la science, et de prendre possession de tels trésors, certaines gens se consacrent à bâtir une science conforme à leurs goûts, suivant des méthodes plus ou moins arbitraires.
Mais cette constatation te conduira, toi, à redoubler d'efforts pour approfondir la vérité.

598 Ecrire contre ceux qui font des recherches ou contre ceux qui apportent de nouvelles découvertes à la science et à la technique c'est toujours plus facile que faire soi-même des recherches. – Mais il est intolérable que ces "critiques" prétendent, pardessus le marché, s'ériger en maîtres absolus du savoir et de l'opinion des ignorants.

599 "Ce n'est pas clair, ce n'est pas clair", opposait-il à l'affirmation confiante des autres... Ce qui était clair, c'était son ignorance.

600 Blesser les autres, créer des divisions, faire montre d'intolérance, voilà qui te gêne... mais tu transiges sur des attitudes et des cas (sans importance, m'assures-tu!) dont les conséquences sont néfastes pour beaucoup de gens.
Pardonne-moi d'être sincère: toi que l'intolérance gêne tellement, en agissant ainsi, tu tombes dans l'intolérance la plus stupide et la plus préjudiciable: celle d'empêcher que la vérité soit proclamée.

601 Dans sa justice et sa miséricorde, infinies et parfaites, Dieu manifeste son même amour, mais d'une manière inégale pour des enfants inégaux.
C'est pourquoi l'égalité ne signifie pas mettre tout le monde sur le même pied.

602 Cette vérité que tu ne dis qu'à moitié! elle a tant d'interprétations possibles, qu'on peut même la qualifier de... mensonge.

603 Dans les domaines de la science et de la réputation d'autrui, le doute est une plante facile à semer, mais qu'il en coûte beaucoup d'arracher.

604 Tu me rappelles Pilate après qu'il eut permis le crime le plus horrible: "quod scripsi, scripsi!" (ce que j'ai écrit, on ne le change pas...) Tu es inébranlable! mais cette attitude, c'est "avant" que tu devrais l'adopter... et non pas après!

605 C'est une vertu que de rester cohérent avec les résolutions que l'on a prises. Mais avec le temps les données peuvent changer, alors cohérence oblige: il faut savoir comment se pose un problème, et quelle en est la solution.

606 Ne confonds pas la sainte intransigeance avec un entêtement borné.
"Je romps, mais ne plie pas", affirmes-tu, fier, quelque peu hautain.
– Ecoute-moi bien: un instrument brisé ne sert plus à rien; il laisse le champ ouvert à ceux dont les compromis apparents veulent imposer ensuite leur néfaste intransigeance.

607 "Sancta Maria, Sedes Sapientiae" – Sainte Marie, Siège de la Sagesse. Invoque souvent Notre Dame sous ce vocable; qu'Elle comble ses enfants, dans leurs études, dans leur travail, dans leur vie avec les autres, de la Vérité que le Christ nous a apportée.

 «    AMBITION    » 

608 Face à ceux qui réduisent la religion à une somme de négations, ou qui se contentent d'un catholicisme en demi-teinte; face à ceux qui veulent tourner le Seigneur contre le mur, ou le reléguer dans un coin de leur âme..., par nos paroles et par nos actes nous devons affirmer que nous aspirons à faire du Christ un Roi authentique de tous les cœurs... même du cœur de ces gens-là.

609 Quand tu travailles à des entreprises apostoliques, ne construis pas que pour maintenant... Adonne-toi à ces tâches avec l'espoir que d'autres de tes frères, ayant le même esprit recueillent plus tard ce que tu sèmes à la volée, et achèvent les bâtiments dont tu es en train de poser les fondations.

610 Lorsque tu seras vraiment animé d'un esprit chrétien, tu corrigeras tes désirs. – Tu n'éprouveras plus l'envie d'acquérir la célébrité, mais celle de perpétuer ton idéal.

611 Si ce n'est pas pour construire une œuvre très grande, entièrement divine – la sainteté – ce n'est pas la peine de se donner.
Aussi, lorsqu'elle canonise les saints, l'Église proclame-t-elle l'héroïcité de leur vie.

612 Lorsque tu travailleras sérieusement pour Dieu, tu te réjouiras tellement de voir que beaucoup de gens te font concurrence.

613 En cette heure de Dieu, l'heure de ton passage dans ce monde, décide-toi vraiment à réaliser quelque chose qui en vaille la peine: le temps presse et qu'elle est noble, héroïque, glorieuse la mission de l'homme – de la femme – sur la terre lorsqu'elle embrase du feu du Christ les cœurs flétris et pourris! – Il vaut la peine d'apporter aux autres la paix et le bonheur d'une croisade forte et joyeuse.

614 Tu joues ta vie pour l'honneur... Joue ton honneur pour ton âme.

615 Par la Communion des saints tu dois te sentir très uni à tes frères. Défends sans peur cette merveilleuse unité! – Si tu venais à te trouver seul, tes nobles ambitions seraient vouées à l'échec: une brebis isolée est presque toujours une brebis perdue.

616 Ton impétuosité m'a fait sourire. Considérant l'absence de moyens matériels et d'aide extérieure pour travailler, tu faisais ce commentaire: "moi, je n'ai que deux bras, mais parfois, impatient, j'ai envie d'être un monstre à cinquante bras, pour semer et pour récolter la moisson".
– Demande cette efficacité à l'Esprit Saint... Il te l'accordera!

617 Deux livres écrits en russe sont tombés entre tes mains et tu as ressenti une intense envie d'étudier cette langue. Tu imaginais la beauté de mourir comme un grain de blé dans cette nation, si aride aujourd'hui, et qui, avec le temps, produira d'immenses champs de blé.
– Tes ambitions me paraissent bonnes. Mais, pour l'instant, consacre-toi à ton petit devoir, ta grande mission de chaque jour – à ton étude, à ton travail, à ton apostolat, et surtout à ta formation – qui constitue une tâche ni moins héroïque, ni moins belle: il y a encore en toi tant de choses à élaguer!

618 A quoi sert un étudiant qui n'étudie pas?

619 Lorsqu'il t'est pénible d'étudier, offre cet effort à Jésus. Dis-Lui que tu ne lâches pas tes livres afin que ta science soit ton arme pour combattre ses ennemis à Lui, et pour Lui gagner beaucoup d'âmes... Alors, sois sûr que ton étude est en voie de devenir une prière.

620 Si tu perds tes heures et tes jours, si tu tues le temps, tu ouvres les portes de ton âme au démon. Comme si tu lui suggérais: "voici ta demeure".

621 Il est difficile de ne pas perdre son temps? – Je te l'accorde... Mais songe que l'ennemi de Dieu, les "autres", eux, ils ne prennent pas de repos.
De plus, rappelle-toi cette vérité que Paul proclame, en champion de l'amour de Dieu: "tempus breve est!" – cette vie nous échappe des mains, et il n'y a aucun moyen de la rattraper.

622 Te rends-tu compte de l'enjeu? de tout ce qui dépend de la qualité, bonne ou mauvaise, de ta formation personnelle? – Oh combien d'âmes!...
– Alors, vas-tu maintenant cesser d'étudier, de travailler, d'être soucieux de perfection?

623 Il existe deux manières de s'élever dans le monde: l'une, qui est chrétienne, fournir un effort noble et vaillant pour monter et servir les autres; et l'autre, païenne, qui est un effort aussi vil qu'ignoble d'écraser son prochain.

624 N'essaie pas de me faire croire que tu vis en la présence de Dieu, si, toujours et en tout, tu ne t'efforces de vivre fraternel, clair et sincère en la présence des hommes, de n'importe quel homme.

625 Les "ambitieux", gens aux petites, aux misérables ambitions personnelles, ils ne comprennent pas que les amis de Dieu, quand ils cherchent "quelque chose", ils le font par esprit de service et non par "ambition".

626 Un inquiétude t'envahit: la hâte de prendre forme, de te modeler, de te forger et te polir, pour devenir la pièce parfaite qui accomplit efficacement le travail prévu, la mission assignée..., dans l'immense champ du Christ.
Je prie beaucoup pour que ce désir soit un stimulant à l'heure de la fatigue, de l'échec, de l'obscurité..., parce que "la mission assignée dans l'immense champ du Christ" ne saurait changer.

627 Lutte résolument contre cette fausse humilité (tu devrais l'appeler facilité) qui t'empêche de te conduire en bon enfant de Dieu plein de maturité: tu dois grandir! – N'as-tu pas honte de voir que tes frères aînés travaillent généreusement depuis des années, et que toi tu n'es pas capable – tu ne veux pas être capable – de lever le petit doigt pour les aider?

628 Que ton âme se laisse consumer de désirs!... Désirs d'amour, d'oubli, de sainteté, désir du Ciel... En verras-tu un jour la réalisation? Ne t'attarde pas à de telles questions, peut-être suggérées par quelque prudent bailleur de conseils. Ravi
Saint dit que les "hommes de désir" Lui sont agréables.
Mais des désirs opérants, que tu dois mettre en pratique dans ta tâche quotidienne.

629 Si le Seigneur t'a appelé "mon ami", tu dois répondre à cet appel, tu dois marcher d'un pas rapide, avec la hâte nécessaire, au pas de Dieu! Autrement, tu cours le risque de demeurer un simple spectateur.

630 Oublie-toi toi-même... Que ton ambition soit de ne vivre que pour tes frères, pour les âmes, pour l'Église; en un mot, pour Dieu.

631 A Cana, tout est à la joie de la fête; Marie, seule, remarque que le vin manque... L'âme pousse son esprit de service jusqu'aux plus petites attentions si, comme Marie et pour l'amour de Dieu, elle reste passionnément attentive au prochain.

 «    HYPOCRISIE    » 

632 A ceux qui la cultivent, l'hypocrisie fait toujours mener une vie de mortification amère et pleine de rancune.

633 Vois ce que propose Hérode: "Allez, enquérez-vous exactement de l'enfant et, quand vous l'aurez trouvé, faites-le moi savoir, afin que, moi aussi, j'aille l'adorer". Demandons l'aide du Saint-Esprit, pour qu'Il nous préserve des "protections ou des bonnes promesses" de personnes apparemment bien intentionnées.
– Comme pour les Rois Mages, la lumière du Paraclet ne nous manquera pas si nous cherchons la vérité, et si notre parole est sincère.

634 Il y en a qui se vexent quand tu parles clairement? – Peut-être agissent-ils ainsi parce qu'ils ont la conscience trouble, et qu'ils éprouvent le besoin de le dissimuler.
– Pour les aider à réagir, persévère dans ta conduite!

635 Tant que c'est de mauvaise foi que tu interprètes les intentions des autres, tu n'as pas le droit d'exiger de la compréhension pour toi-même.

636 Tu dis sans cesse qu'il faut tout amender, qu'il est nécessaire de changer. Bien...: change-toi toi-même! – tu en as bien besoin – et ainsi tu auras commencé le changement.
Entre-temps je n'accorderai aucun crédit à tes proclamations de renouveau.

637 Il y a de ces pharisiens qui se scandalisent, même quand d'autres gens leur répètent juste ce qu'ils ont entendu dire!

638 Indiscret! Apparemment tu n'as pas d'autre occupation que de fureter dans la vie de ton prochain. Et lorsqu'enfin tu t'es heurté à un homme honnête, volontaire, énergique et qui t'a remis à ta place, tu te plains en public comme s'il t'avait offensé.
– Voilà jusqu'où te mènent ton impudence, ta conscience déformée... et tant d'autres comme toi.

639 D'un seul coup, tu prétends t'approprier "l'honorabilité" de l'opinion vraie et les "avantages" ignobles de l'opinion opposée...
– Dans n'importe quelle langue, ceci a pour nom "duplicité".

640 Quelle bonté que la leur!... – Tout prêts à "excuser" ce qui ne mérite que louanges.

641 Vieil artifice que celui du persécuteur qui se prétend persécuté... – Depuis longtemps la sagesse populaire l'a dénoncé, haut et clair: on lance la pierre et on se bande les yeux.

642 Sont-ils si nombreux, hélas! ceux dont les calomnies enfreignent la justice et qui allèguent ensuite la charité, l'honneur pour que leur victime ne puisse se défendre?

643 Triste œcuménisme que celui des catholiques dont la langue malmène d'autres catholiques!

644 L'objectivité vue de travers: observer les personnes, les activités avec des lentilles déformantes, celles de ses propres défauts; avoir ensuite l'effronterie acide pour apporter des critiques ou se permettre de vendre des conseils.
– Alors, une résolution: au moment de corriger ou de conseiller, le faire en présence de Dieu, en appliquant ces paroles à sa propre conduite.

645 N'aie jamais recours à ces pratiques, toujours déplorables, qui consistent à organiser des agressions calomnieuses contre quelqu'un... Et moins encore si c'est au nom de raisons moralisatrices, qui ne justifient jamais une action immorale.

646 Quelle objectivité, quelle droiture d'intention peut-il y avoir dans les conseils que tu donnes, s'il te gêne que l'on écoute aussi d'autres personnes (dont la doctrine est sûre et la formation éprouvée); ou si tu y vois un signe de méfiance.
– Si, comme tu l'assures, c'est vraiment le bien des âmes ou la manifestation de la vérité qui t'intéresse, pourquoi te vexes-tu?

647 Marie ne fait même pas savoir à Joseph le mystère que Dieu a réalisé en Elle. – Pour que nous apprenions à fuir toute légèreté, à donner le cours que Dieu veut à nos joies et à nos tristesses; à ne chercher ni les louanges, ni les apitoiements. "Deo omnis gloria!" – Tout pour Dieu!

 «    VIE INTÉRIEURE    » 

648 Celui-là obtient davantage qui insiste de plus près... Alors, tiens-toi plus près de Dieu: efforce-toi d'être saint.

649 J'aime comparer la vie intérieure à un vêtement, à l'habit de noce dont parle l'Evangile. Le tissu se compose de chaque habitude ou pratique de piété qui, telles des fibres, font la solidité de la toile. Et tout comme un accroc enlève de la valeur à un costume, même si le reste est en bon état, de même si tu pratiques la prière mentale, si tu travailles..., mais qu'il te manque la pénitence (ou l'inverse) ta vie intérieure pour ainsi dire n'est pas accomplie.

650 Quand te rendras-tu compte que le seul chemin possible pour toi est de chercher sérieusement la sainteté? Ne te vexe pas: décide-toi à prendre Dieu au sérieux. Car la légèreté dont tu fais preuve, si tu ne la combats pas, peut aboutir à une parodie triste et blasphématoire.

651 Tu laisses parfois éclater ton mauvais caractère: en plus d'une occasion il affleure, avec une dureté extravagante. D'autres fois, tu ne cherches pas à amender ton cœur et ta tête, pour que la Très Sainte Trinité y trouve sa douce demeure... Et toujours, tu finis par te retrouver un peu loin de Jésus, Lui que tu connais si mal...
– De la sorte, tu n'auras jamais de vie intérieure.

652 "Iesus Cristus, perfectus Deus, perfectus Homo." – Jésus-Christ, Dieu parfait, et Homme parfait.
Ils sont nombreux les chrétiens qui suivent le Christ, tout éblouis par sa divinité; mais ils L'oublient, Lui, en tant qu'Homme... Et ils échouent dans la pratique des vertus surnaturelles (malgré tout un attirail extérieur de piété) car ils ne font rien pour acquérir les vertus humaines.

653 Un remède à tout: la sainteté personnelle! – C'est pourquoi les saints furent si pleins de paix, de force, de joie, d'assurance...

654 Jusqu'à présent tu n'avais pas compris le message que nous, les chrétiens, nous apportons aux autres hommes: une merveille cachée, la vie intérieure.
– Un monde nouveau: voilà maintenant ce que tu leur présentes!

655 Que de choses nouvelles tu as découvertes! Malgré tout parfois tu es un naïf, et tu penses que tu as tout vu, que tu es déjà au courant de tout... Puis, tu touches de tes propres mains la richesse unique et insondable des trésors du Seigneur, qui te montrera toujours "des choses nouvelles", si tu réponds avec amour et délicatesse: tu comprends alors que tu te trouves au début de ton chemin, car la sainteté consiste à s'identifier à Dieu, à notre Dieu, qui est infini, inépuisable.

656 C'est par l'Amour, plus que par l'étude, que l'on arrive à comprendre les "choses de Dieu".
C'est pourquoi tu dois travailler, tu dois étudier, tu dois accepter la maladie, tu dois être sobre... par amour!

657 Questions pour ton examen quotidien: ai-je laissé passer une heure sans parler avec Dieu mon Père?... Me suis-je entretenu avec Lui, plein d'amour filial?... Car cela, tu le peux!

658 Ne nous leurrons pas... – Dieu n'est pas une ombre, un être lointain, qui nous crée puis nous abandonne; ce n'est pas un maître qui s'en va et ne revient plus. Bien que nous ne le percevions pas avec nos sens, son existence est beaucoup plus vraie que celle de toutes les réalités que nous touchons et voyons. Dieu est ici, avec nous, présent, vivant: Il nous voit, Il nous entend, Il nous dirige et Il contemple nos moindres actions, nos intentions les plus cachées.
Nous croyons bien sûr..., mais nous vivons comme si Dieu n'existait pas! Parce que nous n'avons pour Lui ni une pensée, ni un mot; parce que nous ne Lui obéissons pas, et que nous n'essayons pas de dominer nos passions; parce que nous ne Lui exprimons pas notre amour, et que nous ne Lui offrons pas réparation pour nos fautes...
– Allons-nous toujours vivre d'une foi morte?

659 Si tu étais en présence de Dieu, à combien de comportements "irrémédiables" tu porterais remède.

660 Comment vas-tu pratiquer la présence de Dieu, si tu ne fais que regarder partout?... – Tu es comme ivre de futilités.

661 Il est possible que ce mot de méditation t'effraie. – Il te rappelle des livres aux couvertures noires et vieillies, un bruit fait de soupirs ou de prières semblables à des rengaines monotones... Mais cela, ce n'est pas la méditation! Méditer c'est considérer, c'est contempler que Dieu est ton Père, et que toi, son enfant, tu as besoin de son aide; c'est ensuite Le remercier pour ce qu'Il t'a déjà accordé et pour tout ce qu'Il te donnera.

662 Pour connaître Jésus, un seul moyen: le fréquenter! En Lui, tu trouveras toujours un Père, un Ami, un Conseiller et un Collaborateur pour toutes les activités nobles de ta vie quotidienne...
– Et de cette fréquentation naîtra l'Amour.

663 Tu es assez tenace pour assister chaque jour à des cours, et ce uniquement parce que tu y acquiers quelques connaissances... très limitées; alors, pourquoi ne montres-tu pas de la constance pour fréquenter Notre Maître? Il est, Lui, toujours désireux de t'enseigner cette science de la vie intérieure, si savoureuse et si substantielle dans son éternité?

664 Que vaut un homme; que vaut la récompense la plus grande de la terre, comparés à Jésus-Christ, Lui qui ne cesse jamais de t'attendre?

665 Un moment de prière quotidienne: union, amitié avec Dieu; voilà ce qui caractérise les personnes qui savent mettre droitement à profit leur vie; une vie de chrétiens conscients, qui agissent de façon conséquente.

666 Les amoureux ne savent pas se dire adieu: ils se tiennent toujours compagnie.
– Est-ce ainsi que nous aimons Notre Seigneur, toi et moi?

667 Comme ils sont coquets, ceux qui s'aiment, pour se plaire l'un à l'autre, pour avoir belle allure! Ne l'as-tu pas remarqué?... – Eh bien c'est ainsi que tu dois soigner et parer ton âme.

668 D'ordinaire, la grâce agit comme la nature: par degrés. – A proprement parler, nous ne pouvons pas devancer l'action de la grâce: mais, en ce qui nous concerne, nous devons préparer le terrain et coopérer, lorsque Dieu nous en donne l'occasion.
Il faut obtenir des âmes qu'elles visent très haut: les pousser vers l'idéal du Christ; les conduire jusqu'aux ultimes conséquences, sans chercher de circonstances atténuantes ni de palliatifs d'aucun genre, mais sans oublier non plus que la sainteté n'est pas d'abord une affaire de gros bras. Normalement, la grâce agit à ses heures, elle n'aime pas être brusquée.
Cultive donc en toi une sainte impatience..., mais sans perdre patience.

669 Répondre à la grâce divine, est-ce une affaire de justice...? de générosité...? me demandes-tu.
– C'est une affaire d'Amour!

670 "C'est aux moments les moins opportuns que les affaires bouillonnent dans ma tête...", me dis-tu.
C'est pour cela que je t'ai recommandé d'essayer d'obtenir des moments de silence intérieur,... et la maîtrise de tes sens externes et internes.

671 "Reste avec nous, puisque la nuit tombe..." Elle a été efficace la prière de Cléophas et de son compagnon.
– Quel dommage, si toi et moi nous ne savions "retenir" Jésus, à son passage! Quelle douleur, si nous ne Lui demandons pas de rester!

672 Ces minutes que tu consacres chaque jour à la lecture du Nouveau Testament, selon le conseil que je t'ai donné (essayer de bien entrer dans chaque scène, et d'y participer, comme un personnage de plus) elles sont là pour que tu incarnes, pour que "tu accomplisses" l'Evangile dans ta vie..., et pour "le faire accomplir".

673 Avant, tu "t'amusais" beaucoup... – Mais maintenant que tu portes le Christ en toi, ta vie tout entière s'est remplie d'une joie sincère et communicative. C'est pourquoi tu en attires d'autres à ta suite.
– Fréquente-Le davantage, pour arriver à tous.

674 Attention: Reste en alerte! – Lorsque tu élèves la température de ton milieu, veille à ce que la tienne ne baisse pas.

675 Habitue-toi à tout rapporter à Dieu.

676 Ne remarques-tu pas que nombre de tes camarades savent montrer tant de délicatesse et de sensibilité dans leurs rapports avec les personnes qu'ils aiment: leur fiancée, leur femme, leurs enfants, leur famille...? – Sois exigeant à l'égard de toi-même! et dis-leur que Notre Seigneur ne mérite pas moins: qu'ils s'appliquent à Le soigner de la même manière! Et conseille-leur, en plus, de garder cette délicatesse, cette sensibilité, mais qu'ils les manifestent avec Lui et par Lui: ils parviendront alors, sur cette terre aussi, à un bonheur dont ils n'ont jamais rêvé.

677 Le Seigneur a semé de la bonne graine dans ton âme. Et pour ces semailles de vie éternelle, il s'est servi du puissant moyen de la prière: tu ne peux nier, n'est-ce pas, que bien souvent, en tête à tête, face au Tabernacle, Il t'a fait entendre, au fond de ton âme, qu'Il voulait que tu sois à Lui, que tu devais tout quitter... Et si maintenant tu le nies, tu es un misérable traître; si tu l'as oublié, tu n'es qu'un ingrat.
Doutes-en moins que jamais, Il s'est également servi des conseils ou des allusions surnaturels de ton Directeur, qui t'a redit avec insistance des mots que tu ne dois pas passer sous silence; et en plus, toujours pour déposer la bonne graine dans ton âme, il s'est servi au début de cet ami noble, sincère, qui t'a dit des vérités fortes, pleines d'amour de Dieu.
– Mais, surpris et naïf, tu as découvert que l'ennemi a semé l'ivraie dans ton âme. Et qu'il continue de la semer, tandis que tu dors, négligent, et que tu faiblis dans ta vie intérieure. – Il n'y a pas d'autre raison: voilà pourquoi tu trouves dans ton âme ces plantes visqueuses, mondaines qui sembleraient presque parfois étouffer le bon grain de blé que tu as reçu...
– Arrache-les d'un coup! La grâce de Dieu te suffit. Ne crains pas qu'elles laissent un vide, une blessure... Le Seigneur mettra à leur place une nouvelle semence bien à Lui: l'amour de Dieu, la charité fraternelle, les désirs d'apostolat... Et, une fois le temps passé, il ne restera pas la moindre trace d'ivraie: à condition que, maintenant qu'il en est temps encore, tu l'extirpes résolument; et bien plus, à condition que tu ne t'endormes pas et que tu veilles la nuit sur ton champ.

678 Heureuses, bienheureuses ces âmes qui, lorsqu'elles entendent parler de Jésus, Lui qui nous parle constamment, Le reconnaissent aussitôt comme le Chemin, la Vérité, la Vie! – Lorsque nous ne participons pas à ce bonheur, tu sais fort bien que c'est parce que nous n'avons pas eu la détermination de le suivre.

679 Une fois de plus, tu as senti que le Christ était très près de toi. – Et une fois de plus tu as compris que tu dois tout faire pour Lui.

680 Viens plus près de Notre Seigneur..., plus près encore! – Jusqu'à ce qu'Il devienne ton Ami, ton Confident, ton Guide.

681 Chaque jour tu te trouves toi-même plus absorbé en Dieu..., me dis-tu. – Chaque jour alors, tu seras plus proche de tes frères.

682 Jusqu'à présent, avant de L'avoir trouvé, tu voulais courir dans ta vie les yeux grand ouverts pour te rendre compte de tout; désormais, le regard limpide, c'est avec Lui que tu dois courir pour voir ensemble ce qui t'intéresse véritablement.

683 Lorsqu'il y a de la vie intérieure, face à n'importe quelle contrariété on recourt à Dieu avec la même spontanéité que le sang jaillit à la blessure.

684 "Ceci est mon Corps...", et Jésus s'est immolé, se cachant sous les espèces du pain. Maintenant Il est là, avec sa Chair et avec son Sang, avec son Ame et avec sa Divinité: de la même manière que le jour où Thomas mit ses doigts dans les Plaies glorieuses.
Néanmoins, en bien des occasions, tu passes au loin sans esquisser ne fût-ce qu'une brève salutation de simple politesse, alors que tu le fais envers n'importe quelle connaissance que tu croises dans la rue.
– Par rapport à Thomas, comme tu as peu de foi!

685 Si, pour te libérer, l'on avait emprisonné l'un de tes amis intimes, ne chercherais-tu pas à lui rendre visite, à bavarder un moment avec lui, à lui apporter de petits cadeaux, la chaleur de ton amitié, une consolation?... Et si cette conversation avec le prisonnier avait lieu pour te délivrer, toi, d'un mal et te procurer un bien..., y renoncerais-tu? Et, si au lieu d'un ami, il s'agissait de ton propre père ou de ton frère? – Alors!

686 C'est pour nous que Jésus est resté dans la Sainte Hostie! Pour demeurer à notre côté, pour nous soutenir, pour nous guider. L'amour ne se paye que par l'amour.
– Alors, comment ne pas nous rendre auprès du Tabernacle, chaque jour, ne serait-ce que pour quelques minutes, pour Le saluer et Lui témoigner notre amour d'enfants et de frères?

687 As-tu observé cette scène? – Voilà qu'en face d'un sergent quelconque, d'un petit gradé sans guère de responsabilités, vient à s'approcher une recrue de belle prestance; et ses qualités sont sans comparaison supérieures à celles de bien des officiers; et l'un ne manque pas de faire le salut, ni l'autre de répondre.
Médite bien sur ce contraste. – Depuis le Tabernacle de cette église, le Christ, Dieu parfait, Homme parfait, Lui qui est mort pour toi sur la Croix, et qui te donne tous les biens dont tu as besoin... eh bien! Il s'approche de toi. Et toi, tu passes sans Lui prêter attention.

688 Tu as commencé par Lui rendre une visite, chaque jour... aussi je ne m'étonne pas que tu me dises: je commence à aimer à la folie la lampe du Tabernacle.

689 Que pas un jour ne passe sans que tu dises, au moins, un "Jésus, je t'aime" et une communion spirituelle, pour réparer tous les sacrilèges et profanations qu'Il subit du simple fait d'être parmi nous.

690 Ne salue-t-on pas, ne traite-t-on pas cordialement tous ceux que l'on aime? – Eh bien, très souvent au long de la journée, nous irons, toi et moi, saluer Jésus, Marie et Joseph, et notre Ange gardien.

691 Qu'elle soit intense, ta dévotion pour notre Mère. Elle qui sait répondre avec tant de délicatesse aux présents que nous lui offrons.
– En plus, si tu récites tous les jours le Saint Rosaire dans un esprit de foi et d'amour, Notre Dame se chargera de te conduire très loin sur le chemin qui mène à son Fils.

692 Sans l'aide de Notre Dame, quel soutien aurions-nous pour notre lutte quotidienne? – Cette aide, est-ce que tu la cherches constamment?

693 Notre Ange Gardien nous accompagne toujours comme un témoin privilégié. Ce sera lui qui, à l'heure de ton jugement particulier, rappellera les attentions que tu auras eues pour Notre Seigneur, tout au long de ta vie. Plus encore: lorsque tu te sentiras perdu devant les terribles accusations de l'ennemi, ton Ange présentera les élans intimes de ton cœur (peut-être les as-tu toi-même oubliés) ces manifestations d'amour que tu as adressées à Dieu le Père, à Dieu le Fils, à Dieu le Saint-Esprit.
N'oublie donc jamais la présence de ton Ange Gardien, et ce Prince du Ciel ne t'abandonnera ni maintenant, ni au moment décisif.

694 Tes communions étaient très froides, tu prêtais peu d'attention à Notre Seigneur: tu te distrayais pour n'importe quelle bagatelle. – Mais depuis que tu penses, dans ton dialogue intime avec Dieu, que les Anges sont présents, ton attitude a changé...: "qu'ils ne me voient pas ainsi!", te dis-tu...
– Et vois comment la force du "qu'en dira-t-on" (mais pour le bien, cette fois-ci) t'a fait un petit peu avancer vers l'Amour.

695 Lorsque tu verras que ton cœur est sec, et que tu ne sais que dire, aie recours avec confiance à la Sainte Vierge. Dis-Lui: ma Mère Immaculée, intercède pour moi.
Si tu l'invoques avec foi, en plein dans cette sécheresse, Elle te fera goûter la proximité de Dieu.

 «    ORGUEIL    » 

696 Extirper notre amour propre pour mettre à sa place l'amour de Jésus-Christ: voilà le secret de l'efficacité et du bonheur.

697 Bien que tu affirmes que tu Le suis, d'une manière ou d'une autre tu prétends toujours agir "toi", selon "tes" plans, et avec "tes" seules forces. – Mais Notre Seigneur a dit: "sine me nihil!" – sans Moi, tu ne peux rien faire.

698 On a méconnu ce que tu appelles ton "droit", ce que je t'ai retraduit par ton "droit à l'orgueil"... Pauvre nigaud! L'agresseur était puissant: tu ne pouvais te défendre et tu as éprouvé la douleur de cent soufflets. – Et, malgré tout, tu n'apprends pas à t'humilier.
Maintenant c'est ta conscience qui t'accuse d'être orgueilleux... et lâche. – Rends grâce à Dieu, parce que tu commences à entrevoir ton "devoir d'humilité".

699 Tu es plein de toi-même, de toi, de toi... – Et tu ne seras pas efficace tant que tu ne te rempliras pas de Lui, de Lui, de Lui, agissant "in nomine Domini" – au nom et avec la force de Dieu.

700 Comment veux-tu suivre le Christ, si tu ne tournes qu'autour de toi-même?

701 La préoccupation, l'impatience désordonnée pour monter dans sa profession peuvent masquer l'amour-propre sous couvert de "servir les âmes". Hypocrites, je dis bien hypocrites, quand nous nous forgeons des excuses en disant que nous ne devons pas laisser passer certaines conjonctures, certaines circonstances favorables...
Tourne tes yeux vers Jésus: c'est Lui "le Chemin". Des conjonctures et des circonstances "très favorables" se sont également présentées pendant ses années cachées pour anticiper sur sa vie publique. A douze ans, par exemple, quand ses questions et ses réponses faisaient l'admiration des docteurs de la loi... Mais Jésus-Christ accomplit la volonté de son Père, et Il attend: Il obéit! – Sans rien perdre de ta sainte ambition de conduire le monde entier à Dieu, lorsque tu éprouveras le besoin de prendre ces initiatives personnelles (et qui sait? le désir de déserter), rappelle-toi que, toi aussi, tu dois obéir et t'occuper de cette tâche obscure, peu brillante, tant que le Seigneur ne te demandera pas autre chose: Il a ses moments à Lui, et ses voies.

702 Comme ils révèlent leur sottise et leur orgueil tous ceux qui abusent du privilège de leur situation (argent, naissance, rang, fonctions, intelligence...) pour humilier les moins avantagés.

703 Tôt ou tard, l'orgueil finit par humilier, devant les autres, l'homme le "plus homme", qui agit comme un pantin vaniteux et sans cervelle, fût-il tiré par les ficelles que satan manipule.

704 Présomption ou simple vanité: beaucoup de gens entretiennent un "marché noir" pour rehausser artificiellement leurs propres valeurs.

705 Des charges... haut, bas placées? – Que t'importe!... Et c'est bien ce que tu assures: toi, tu es venu pour être utile, pour servir, pleinement disponible; agis en conséquence.

706 Tu parles, tu critiques... Il semble que rien de bien ne se fait sans toi.
– Je te dirais, mais ne te vexe pas, que ta conduite est celle d'un despote.

707 Si un bon ami, loyal et charitable, te signale, seul à seul, ce qui salit ta conduite, dans ton for intérieur monte une certitude: il se trompe, il ne te comprend pas. Avec cette fausse conviction, fruit de ton orgueil, tu resteras toujours incorrigible.
– Tu me fais de la peine: tu manques de volonté pour rechercher la sainteté.

708 Sournois, soupçonneux, compliqué, méfiant, suspicieux,... ces adjectifs, tu les mérites tous, même s'ils te gênent.
– Corrige-toi! pourquoi les autres seraient-ils toujours méchants... et toi toujours bon?

709 Tu es seul..., tu te plains..., tout t'ennuie. – C'est parce que ton égoïsme t'isole de tes frères, et que tu ne te rapproches pas de Dieu.

710 Tu veux toujours que l'on fasse cas de toi, et de façon bien ostensible!... Mais, surtout, que l'on fasse plus grand cas de toi que des autres!

711 Pourquoi t'imagines-tu qu'on te parle toujours avec une arrière-pensée?... Avec ta susceptibilité, tu ne cesses de poser des limites à l'action de la grâce; cette grâce qui vient à toi, n'aie aucun doute, par la parole de ceux qui luttent pour rendre leurs œuvres conformes à l'idéal du Christ.

712 Tant que tu resteras convaincu que les autres doivent toujours vivre en fonction de toi, tant que tu ne te décideras pas à servir – à te cacher et à disparaître – la fréquentation de tes frères, de tes collègues, de tes amis, sera pour toi une source continuelle de contrariétés, de mauvaise humeur...: d'orgueil.

713 Déteste la vantardise. – Répudie la vanité. – Combats l'orgueil, chaque jour, à tout instant.

714 Les pauvres petits orgueilleux souffrent de mille petites bêtises, que leur amour-propre grossit démesurément, mais que les autres ne remarquent même pas.

715 Crois-tu que les autres n'ont jamais eu vingt ans? Crois-tu qu'ils n'ont jamais été sous la coupe de leur famille, comme s'ils étaient des mineurs? Crois-tu que les problèmes, petits, ou pas si petits, qui te font trébucher leur ont été épargnés?... Eh bien, non! Ils sont passés par les mêmes situations que tu traverses, toi, maintenant; ce qui les a fait mûrir: la grâce aidant, persévérants et généreux, ils ont piétiné leur moi, cédant là où l'on pouvait céder, et demeurant loyaux, sans arrogance, sans blesser personne, humbles et sereins, quand on ne pouvait pas céder.

716 Par ton idéologie tu es très catholique. L'atmosphère de la Résidence te plaît... mais dommage que la Messe ne soit pas à midi, et tes cours l'après-midi: tu pourrais étudier après le dîner, en savourant un ou deux verres de cognac! – Ton "catholicisme" ne répond pas à la vérité, il n'est qu'embourgeoisement.
– Ne comprends-tu pas qu'à ton âge, tu ne dois plus raisonner ainsi? Sors de ta paresse, de ton égolâtrie..., et accommode-toi aux besoins des autres, à la réalité qui t'entoure; alors tu prendras le catholicisme au sérieux.

717 "Ce saint – disait quelqu'un, qui avait offert la statue dédiée à son culte –...il me doit tout ce qu'il est."
Ne crois pas qu'il s'agit d'une caricature: toi aussi tu estimes (ou du moins on le dirait vu ton comportement) que tu remplis ton devoir envers Dieu, grâce aux médailles que tu portes ou grâce à quelques pratiques de piété plus ou moins routinières.

718 Que l'on voie mes bonnes œuvres!... Mais, ne te rends-tu pas compte que tu sembles les porter dans un panier de pacotille, pour que l'on contemple tes qualités?
Et puis, n'oublie pas la seconde partie du commandement de Jésus: "et qu'ils glorifient votre Père qui est dans les cieux".

719 "A moi-même, avec l'admiration que je me dois." – Ecrit sur la première page d'un livre. Et c'est cela même que beaucoup d'autres malheureux pourraient apposer sur la dernière page du livre de leur vie.
Quel dommage, si toi et moi nous vivions ou finissions de cette manière! – Alors faisons un sérieux examen de conscience!

720 Ne te montre jamais suffisant devant les affaires de l'Église, ni devant les hommes, tes frères... En revanche, cette attitude peut être nécessaire dans la vie sociale, lorsqu'il faut défendre les intérêts de Dieu et des âmes; alors il ne s'agit plus de suffisance, mais de foi et de force où nous ferons preuve d'une assurance humble et sereine.

721 Il est indiscret, puéril et bête d'avoir des paroles aimables pour des gens, ou de louer leurs qualités, en leur présence.
– C'est ainsi qu'on favorise la vanité, et que l'on court le risque de "dérober" de sa gloire à Dieu, Lui à qui toute chose est due.

722 Veille à ce qu'en toi la bonne intention aille toujours de pair avec l'humilité. Souvent, en effet, les bonnes intentions s'accompagnent de dureté dans le jugement, d'une incapacité presque totale à céder, et d'un certain orgueil personnel, national ou collectif.

723 Que tes erreurs ne te découragent pas: réagis. – La stérilité n'est pas tant la conséquence des fautes (surtout, si l'on se repent) que de l'orgueil.

724 Si tu es tombé, relève-toi avec davantage d'espérance... Seul l'amour-propre ne comprend pas que l'erreur, lorsqu'on la corrige, permet de mieux se connaître et de s'humilier.

725 "Nous ne servons à rien": pessimisme, fausseté de cette affirmation! – Si on le veut, et avec la grâce de Dieu pour condition préalable, fondamentale, on peut, comme un bon instrument, arriver à servir dans beaucoup d'entreprises.

726 Il m'a fait réfléchir ce mot dur, mais vrai, de cet homme de Dieu qui contemplait l'attitude hautaine de telle créature: "il s'habille de la même peau que le diable: d'orgueil".
Et, par contraste, un désir sincère a surgi dans mon cœur, celui de me revêtir de la vertu que Jésus a prêchée, "quia mitis sum et humilis corde" – je suis doux et humble de cœur –; celle qui a attiré le regard de la Très Sainte Trinité sur la Mère de Jésus et notre Mère: l'humilité, savoir, être convaincus que nous ne sommes rien.

 «    AMITIÉ    » 

727 Quand il t'en coûte de faire une faveur, de rendre un service à quelqu'un, dis-toi qu'il est enfant de Dieu, rappelle-toi que le Seigneur nous a commandé de nous aimer les uns les autres.
– Plus encore: approfondis chaque jour ce précepte évangélique; ne reste pas à la surface. Tires-en les conséquences (c'est si facile) et adapte ta conduite de chaque instant à ces exigences.

728 On vit de manière tellement précipitée que la charité chrétienne est devenue un phénomène bizarre dans notre monde; bien que l'on prêche le Christ – du moins en théorie...
– Je te l'accorde. Mais, que fais-tu, toi: en tant que catholique, tu dois t'identifier à Lui et suivre ses pas. Ne nous a-t-il pas prescrit d'aller enseigner sa doctrine à toutes les nations – sans exception – et pour tous les temps?

729 Comme il en a toujours été dans l'histoire, les hommes unissent leurs vies pour accomplir une mission et un destin collectifs. – Pour les hommes et les femmes d'aujourd'hui, "l'unique destin" du bonheur éternel aurait-il moins de valeur?

730 Pour comprendre le sens de l'amitié, il a fallu que tu te sentes comme le berger d'un petit troupeau: tu l'avais abandonné, mais à présent tu cherches à le rassembler de nouveau, en t'appliquant à les servir tous et chacun.

731 Tu ne peux pas te résigner à n'être qu'un élément passif. Tu dois devenir un véritable ami de tes amis: "les aider". D'abord, par l'exemple de ta conduite. Et ensuite, par tes conseils et par cet ascendant que donne l'intimité.

732 Il t'a enthousiasmé cet esprit de fraternité et de camaraderie que tu as découvert sans t'y attendre. – Quoi de plus normal: c'est quelque chose dont tu avais tant rêvé, mais que tu n'avais jamais vu. Tu ne l'avais pas vu, parce que les hommes oublient qu'ils sont frères du Christ, frères de cet aimable Frère qui a donné sa vie pour les autres, pour tous et pour chacun d'entre nous, sans conditions.

733 Tu as eu la grande chance de rencontrer de véritables maîtres, des amis authentiques, qui t'ont enseigné sans réserve tout ce que tu as voulu savoir, tu n'as pas eu besoin de ruses pour "leur voler" leur science, car ils t'ont indiqué le chemin le plus facile, celui qu'ils ont eux-mêmes découvert au prix d'un dur travail, et de souffrances... Maintenant, c'est à toi d'en faire autant, avec celui-ci, et celui-là, avec tous!

734 Médite bien ceci, et agis en conséquence: ces personnes, pour qui tu es antipathique, cesseront d'avoir cette impression lorsqu'elles se rendront compte que tu les aimes "vraiment". Il n'en tient qu'à toi.

735 Il ne suffit pas d'être bon: tu dois le paraître. Que dirais-tu d'un rosier qui ne donnerait que des épines?

736 Pour réchauffer les tièdes, il faut les entourer d'un feu d'enthousiasme.
Beaucoup de gens pourraient crier: ne vous lamentez pas sur mon état! Montrez-moi le chemin pour sortir de cette situation qui vous attriste tant!

737 Ton devoir de fraternité à l'égard de toutes les âmes te fera exercer, sans qu'elles le remarquent, "l'apostolat des petites choses": aie le désir de les servir, pour leur rendre ce chemin plus aimable.

738 Qu'ils ont l'esprit étroit ceux qui tiennent jalousement la "liste des torts qu'ils ont subis"...! Ces malheureux sont impossibles à vivre.
La véritable charité, de même qu'elle ne tient pas la comptabilité des services "constants et nécessaires" qu'elle prête, n'enregistre pas ("omnia suffert": elle supporte tout) les brimades qu'elle endure.

739 Tu suis un plan de vie exigeant: tu te lèves tôt, tu fais ta méditation, tu fréquentes les Sacrements, tu travailles ou étudies beaucoup, tu es sobre, tu te mortifies..., mais tu remarques qu'il te manque quelque chose! Considère donc cela pendant ton dialogue avec Dieu: puisque la sainteté – la lutte pour y parvenir – est la plénitude de la charité, tu dois reconsidérer ton amour de Dieu et à travers Lui, ton amour des autres. Peut-être découvriras-tu alors, cachés dans ton âme, de grands défauts contre lesquels tu ne luttais même pas: tu n'es pas un bon fils, ni un bon frère, ni un bon camarade, un bon ami, un bon collègue: et, comme tu aimes "ta sainteté" d'un amour désordonné, tu es jaloux.
Tu "te sacrifies" sur beaucoup de "petits points personnels"; c'est pourquoi tu es attaché à ton moi, à ta personne, et au fond, tu ne vis ni pour Dieu ni pour les autres: mais seulement pour toi.

740 Tu te considères comme un ami parce que tu ne dis rien de mal. – C'est vrai; mais je ne vois pas non plus chez toi une bonne action qui soit un exemple, un service...
– Ces amis-là sont les pires de tous!

741 D'abord tu maltraites les autres... Et ensuite, avant que personne n'ait le temps de réagir, tu t'écries: "et maintenant, la charité entre nous tous!"
Si tu commençais par ce "maintenant", tu n'arriverais jamais au "d'abord".

742 Ne sois pas un semeur de zizanie, comme cet homme dont la propre mère disait: "Présentez-lui vos amis, et lui il se chargera de les brouiller avec vous.".

743 Elle ne me paraît pas chrétienne la fraternité qu'affiche cet ami quand il te met en garde: "on m'a dit telle ou telle horrible calomnie à ton sujet: méfie-toi de certaine personne qui doit être de tes intimes"...
Elle ne me paraît pas chrétienne cette fraternité, parce qu'il manque à ce "frère" le noble réflexe de faire d'abord taire le calomniateur et, ensuite, en toute loyauté de te communiquer son nom.
– S'il n'a pas suffisamment de caractère pour s'obliger à cette attitude, ce "frère" t'expose au risque de rester seul dans la vie, car il te pousse à te méfier de tous et à manquer à la charité envers tous.

744 En toi, il n'y a pas le moindre soupçon de vision surnaturelle, et dans les autres, tu vois seulement des personnes dont la situation sociale est plus ou moins bonne. Des âmes, tu n'en as que faire, et tu ne te mets pas à leur service. C'est pourquoi tu n'es pas généreux..., et tu vis très loin de Dieu avec ta fausse piété; bien que tu pries beaucoup.
Le Maître a parlé de façon bien claire: "éloignez-vous de moi, et allez au feu éternel parce que j'ai eu faim..., j'ai eu soif..., j'étais en prison..., et vous ne vous êtes pas préoccupés de moi".

745 Il n'est pas compatible d'aimer Dieu à la perfection et de nous laisser dominer par l'égoïsme, ou par l'apathie, dans nos rapports avec notre prochain.

746 L'amitié véritable requiert aussi un effort cordial pour comprendre les convictions de nos amis, même si nous ne parvenons ni à les partager, ni à les accepter.

747 Ne permets jamais que la mauvaise herbe pousse sur le chemin de l'amitié: sois loyal.

748 Une résolution ferme pour notre amitié: que dans mes pensées, dans mes paroles, dans mes actions à l'égard de mon prochain, quel qu'il soit, je ne me conduise plus comme jusqu'à présent. Que jamais je ne cesse de pratiquer la charité, que jamais je ne laisse entrer l'indifférence dans mon âme.

749 Ta charité doit être adaptée, ajustée aux besoins des autres...; et non pas aux tiens.

750 Etre enfants de Dieu!: cette condition fait de nous quelque chose de bien plus élevé que des personnes qui se supportent mutuellement. Ecoute Notre Seigneur: "vos autem dixi amicos!" – nous sommes de ses amis qui donnent, comme Lui, joyeusement leur vie les uns pour les autres aux heures héroïques et dans la vie courante.

751 Comment peut-on prétendre que ceux qui ne possèdent pas notre foi viennent vers l'Église Sainte, s'ils sont témoins de la brusquerie dont font preuve entre eux ceux qui se disent disciples du Christ?

752 Tu es d'un commerce agréable; mais l'attrait que tu exerces ainsi doit gagner en quantité et en qualité. Sinon, ton apostolat s'éteindra dans des cénacles inertes et fermés.

753 Grâce à ton amitié et à ta doctrine – je corrige: grâce à la charité et au message du Christ – tu pousseras beaucoup de gens qui ne sont pas catholiques à collaborer sérieusement avec toi, pour faire du bien à tous les hommes.

754 J'ai pris note de ce que disait cet ouvrier, après avoir participé à la réunion que tu avais organisée, il faisait ce commentaire enthousiaste: "je n'avais jamais entendu parler, comme on le fait ici, de noblesse, d'honnêteté, d'amabilité, de générosité..." – Et de conclure étonné: "face au matérialisme de gauche ou de droite, c'est çà la véritable révolution!"
– N'importe quelle âme comprend la fraternité que Jésus-Christ a instaurée: appliquons-nous à ne pas dénaturer cette doctrine!

755 Parfois tu veux te justifier, en assurant que tu es distrait, dans les nuages; ou que, de caractère, tu es sec, très réservé. Et tu ajoutes que cela t'empêche même de connaître à fond les personnes avec lesquelles tu habites.
– Ecoute-moi: cette excuse ne te satisfait guère, n'est-ce pas?

756 Aborde avec beaucoup de vision surnaturelle toutes les petites choses de la vie ordinaire, t'ai-je conseillé. Et j'ai aussitôt ajouté: la vie avec les autres doit t'offrir tant de bonnes occasions, tout au long de la journée.

757 Comment vivre la charité sans respecter la mentalité des autres? sans te réjouir qu'ils suivent leur chemin vers Dieu?... et n'exige pas qu'ils pensent comme toi, ni qu'ils te rejoignent! – Pour toi, cette considération me vient à l'esprit: ces chemins, ils sont différents, mais parallèles; chacun parviendra à Dieu en suivant le sien...; ne te perds pas en comparaisons, ne cherche pas à savoir quel est le plus élevé; c'est sans importance. Ce qui compte c'est que tous nous atteignions le but.

758 Il est plein de défauts, celui-là! Ah bon!... Mais, d'une part les gens parfaits on ne les trouve qu'au Ciel; d'autre part, toi aussi tu traînes tes défauts et, malgré tout, on te supporte: plus encore, on t'estime parce qu'on t'aime de l'amour que Jésus-Christ donnait aux siens, qui étaient d'ailleurs bien chargés de misères! – Retiens cette leçon!

759 Tu te plains: il n'est pas compréhensif!... – Moi j'ai la certitude qu'il fait de son mieux pour te comprendre. Mais toi, quand feras-tu donc un petit effort pour le comprendre?

760 D'accord! je l'admets: cette personne s'est mal comportée; sa conduite est répréhensible et indigne; on voit qu'elle manque de toute distinction.
– Humainement parlant elle ne mérite que mépris! as-tu ajouté.
– Oui, j'insiste: je te comprends, mais je ne soutiendrai pas ta dernière affirmation. Cette pauvre vie est sacrée; le Christ est mort pour la racheter! Si Lui Il ne l'a pas méprisée, comment peux-tu oser le faire, toi?

761 Si ton amitié s'abaisse jusqu'à te rendre complice des misères d'autrui, elle se réduit à une triste connivence qui ne mérite pas la moindre estime.

762 La vie, en soi si étriquée et incertaine, devient parfois vraiment difficile. – Tu n'en seras que plus surnaturel, tu y verras la main de Dieu: et ainsi tu deviendras plus humain, plus compréhensif à l'égard de ceux qui t'entourent.

763 L'indulgence est proportionnelle à l'autorité. Un simple juge doit condamner – en accordant peut-être les circonstances atténuantes – si l'accusé plaide coupable. Le pouvoir souverain d'un pays octroie parfois une amnistie ou une remise de peine. A l'âme contrite, Dieu pardonne toujours.

764 "A travers vous j'ai vu Dieu qui oubliait mes folies, mes offenses et m'accueillait avec toute l'affection d'un Père." Voilà ce qu'avait écrit aux siens, contrit, un enfant prodigue du vingtième siècle, de retour à la maison paternelle.

765 Comme il t'en a coûté d'écarter et d'oublier, pas à pas, tes petits soucis, tes projets personnels: pauvres et peu nombreux, mais bien enracinés. – En échange, maintenant tu as la pleine certitude que tes projets, ton occupation, ce sont tes frères, et eux seuls, car tu as appris à découvrir Jésus-Christ dans ton prochain.

766 "Le centuple!"... Comme tu te l'es rappelée, il y a quelques jours, cette promesse de Notre Seigneur! – Ce centuple, je t'assure que tu le trouveras dans la fraternité vécue parmi tes compagnons d'apostolat.

767 Que de craintes et que de dangers peut dissiper l'amour véritable qui unit des frères, l'amour qu'on ne nomme pas (n'aurait-on pas, sinon, l'impression de le profaner?) mais qui resplendit dans chaque détail!

768 Chaque jour, aie recours à la Très Sainte Vierge, et confie-toi pleinement à elle. Ton âme et ta vie en seront réconfortées. – C'est par elle que tu accèderas aux trésors qu'elle garde en son cœur, car "on n'a jamais entendu dire qu'aucun de ceux qui ont eu recours à sa protection ait été abandonné".

 «    VOLONTÉ    » 

769 Pour aller de l'avant, dans la vie intérieure et dans l'apostolat, ce n'est pas la dévotion sensible qui est nécessaire, mais bien plutôt une disponibilité décidée, généreuse, de la volonté aux exigences divines.

770 Sans le Seigneur tu ne pourras faire un seul pas en toute sécurité. – Si tu es convaincu d'avoir besoin de son aide, tu pourras mieux t'unir davantage à Lui, confiant, solide, persévérant, imprégné de joie et de paix, même si le chemin devient rude et raide.

771 La grande différence entre un comportement naturel et un comportement surnaturel? La voici: le premier débute bien, mais il en vient bientôt à faiblir. Le second lui aussi commence bien..., mais par la suite il s'efforce de faire toujours mieux.

772 Pourquoi serait-il mauvais de bien se comporter pour de nobles raisons humaines? – Mais... quelle différence quand ce sont les raisons surnaturelles qui "commandent"!

773 En les voyant joyeux de faire un travail aussi dur, cet ami a demandé: mais toutes ces tâches, les accomplissez-vous par enthousiasme? – Il lui a été répondu avec joie et sérénité: "par enthousiasme?..." Nous serions dans de beaux draps! non! mais "Per Dominum Nostrum Iesum Christum!" – par Notre Seigneur Jésus-Christ! qui sans cesse nous y attend.

774 Ce monde a tant besoin que nous réveillions les somnolents, que nous encouragions les timides, que nous guidions les désorientés; en un mot, que nous les enrôlions dans les troupes du Christ, pour que tant d'énergies ne soient pas gaspillées.

775 "Il est grand temps que tu te décides, pour de bon, à faire quelque chose qui en vaille la peine", se disait, face à diverses exigences, cette âme qui aimait beaucoup Dieu. Peut-être te sera-t-elle profitable, à toi aussi, cette astuce surnaturelle, qui est le fruit plein de délicatesse d'un amour résolu.

776 Quelle perfection chrétienne veux-tu atteindre, si tu suis toujours ton caprice, "ce qui te plaît"...? Si tu ne les combats pas, tous tes défauts ne pourront jamais porter que le fruit des mauvaises actions. Et, lorsque se présentera une occasion difficile, ta volonté ne te servira de rien: dans quelle lutte, dans quelle persévérance aura-t-elle été trempée?

777 La façade n'est qu'énergie et solidité. – Mais quelle faiblesse et quel manque de volonté à l'intérieur! – Décide-toi plus fortement à faire de tes vertus non pas des faux-semblant, mais des habitudes qui dessinent ton caractère.

778 "J'en connais quelques-unes et quelques-uns qui n'ont même pas la force de demander du secours", me dis-tu, plein d'écœurement et de chagrin. – Ne passe pas ton chemin; ta volonté de te sauver et de les sauver peut servir de point de départ à leur conversion. En plus, si tu réfléchis bien, tu t'apercevras qu'on a tendu la main, à toi aussi.

779 Les mollassons, ceux qui se plaignent de mille et une petitesses, sont ceux qui, dans ces vétilles ridicules de la vie quotidienne, ne savent pas se sacrifier pour Jésus... et moins encore pour les autres.
Ton comportement – si dur, si exigeant envers les autres – quelle honte s'il souffrait d'une telle mollesse dans ton travail quotidien!

780 Tu souffres beaucoup, parce que tu vois que tu n'es pas à la hauteur. Tu voudrais faire plus et avec plus d'efficacité; mais souvent tu n'agis que comme un étourdi, ou tu n'oses pas.
"Contra spem, in spem!" – Que ton espérance soit sûre et vivante contre toute espérance! Appuie-toi sur ce rocher ferme qui te sauvera et te poussera. C'est une vertu théologale, magnifique, qui t'encouragera dans ta marche: ne crains pas d'aller trop loin; et en plus elle t'empêchera de t'arrêter.
– Ne me regarde pas comme cela! Mais oui! Cultiver l'espérance c'est rendre sa volonté toujours plus forte.

781 Lorsque ta volonté faiblit devant le travail ordinaire, reviens une fois de plus à cette considération: "l'étude ou le travail est une partie essentielle de mon chemin. Le discrédit professionnel – conséquence de la paresse – anéantirait ou rendrait impossible mon travail de chrétien. Pour attirer les autres et les aider, j'ai besoin (car c'est Dieu qui le veut) de l'ascendant que donne le prestige professionnel".
– N'en doute pas: si tu abandonnes ta tâche, tu t'écartes des plans divins – et tu en écartes d'autres avec toi!

782 Il te faisait peur ce chemin des enfants de Dieu: au nom de Notre Seigneur, ils te pressaient d'accomplir ton devoir, de renoncer à toi-même, de sortir de ta tour d'ivoire. Tu t'es dérobé..., et j'avoue ne pas m'étonner s'il te pèse tant, ce poids: un ensemble de complexes et de complications, d'affectations et de scrupules, qui font de toi un inutile.
Ne te vexe pas si je te dis que tu t'es comporté avec moins d'intégrité que les gens dépravés, ces audacieux hérauts du mal, comme si tu leur étais pire, ou inférieur.
"Surge et ambula!" – lève-toi et marche! décide-toi! tu peux encore te délivrer de ce fardeau néfaste: la grâce de Dieu aidant, tu peux encore écouter ce qu'Il te demande et, surtout, Le seconder pleinement et de bon gré!

783 Il est bon qu'une telle impatience dévore ton âme. – Mais ne t'emballe pas! Dieu veut que tu te décides à te préparer, sérieusement pendant les mois ou les années qui seront nécessaires: et Il compte bien là-dessus. – Il n'avait pas tort l'empereur qui disait: "contre mes ennemis le temps est mon allié".

784 La jalousie ou l'envie, un homme droit les résumait en ces termes: "ils doivent avoir une bien mauvaise volonté pour troubler une eau aussi claire".

785 Faut-il que tu restes silencieux et inactif?... – En présence d'une agression injuste perpétrée contre un loi juste, eh bien! non!

786 Chaque jour ta "folie" empire... – On le remarque à l'assurance et à l'aplomb formidable que te donne la conscience de savoir que tu travailles pour le Christ.
– L'Ecriture Sainte l'a déjà proclamé: "vir fidelis, multum laudabitur" – l'homme fidèle mérite les louanges de tout le monde.

787 Jamais tu n'as éprouvé une liberté plus absolue que maintenant, alors que ta liberté est tissée d'amour et de détachement, de sécurité et d'incertitude: c'est que tu ne te fies plus à toi pour rien, mais pour tout à Dieu.

788 As-tu vu comment l'on retient l'eau dans les barrages, en prévision des temps de sécheresse?... De même, pour acquérir cette égalité d'humeur qui t'est nécessaire dans les temps difficiles, il te faut retenir la joie, les raisons claires et les lumières que le Seigneur t'envoie.

789 Quand les flambées du premier enthousiasme s'éteignent, il devient pénible d'avancer dans l'obscurité. – Mais ce progrès, qui coûte tant, est le plus solide. Et plus tard, au moment où tu t'y attendras le moins, l'obscurité cessera et reviendront le feu, l'enthousiasme. Alors, persévère!

790 Dieu veut que nous, ses enfants, nous soyons comme des troupes d'assaut. – Nous ne pouvons rester dans l'expectative: nous, nous devons lutter, là où nous nous trouvons, comme une armée en ligne de bataille.

791 Il ne s'agit pas d'accomplir tes obligations à la hâte, mais de les mener à bien sans t'arrêter, au pas de Dieu.

792 Tu es d'un abord agréable, ta conversation est intelligente... Mais tu es si apathique aussi! – "Puisqu'ils ne viennent pas me chercher...", c'est ton prétexte. – Si tu ne changes pas, et je précise, si tu ne vas pas au-devant de ceux qui t'attendent, jamais tu ne pourras devenir un apôtre efficace.

793 Trois repères très importants pour entraîner les âmes vers le Seigneur: t'oublier toi-même et ne penser qu'à la gloire de Dieu ton Père; soumettre filialement ta volonté à la Volonté du Ciel, comme Jésus-Christ te l'a appris; seconder avec docilité les lumières de l'Esprit Saint.

794 Durant trois jours et trois nuits, Marie va à la recherche de son Fils qui s'est perdu. Ah! si nous pouvions dire, toi et moi, que notre volonté de trouver Jésus ne connaît pas non plus de repos.

 «    CŒUR    » 

795 Ce qui est nécessaire pour atteindre le bonheur, ce n'est pas une vie facile, mais un cœur plein d'amour.

796 Après vingt siècles, nous devons proclamer avec une totale assurance que l'esprit du Christ n'a rien perdu de sa force rédemptrice, la seule qui comble les aspirations du cœur humain. – Commence par graver cette vérité dans ton cœur à toi, car il sera sans cesse dans l'inquiétude – comme l'a écrit saint Augustin – tant que tu ne le mettras pas entièrement en Dieu.

797 Aimer, c'est... ne nourrir qu'une seule pensée, vivre pour la personne aimée, ne plus s'appartenir, être soumis heureux et libre, d'âme et de cœur, à une volonté qui est autre... et nôtre en même temps.

798 Tu n'aimes pas encore le Seigneur comme l'avare aime ses richesses, comme une mère aime son enfant..., tu te préoccupes encore trop de toi-même et de tes petitesses! Cependant, tu remarques que désormais Jésus est devenu indispensable à ta vie... – Eh bien, dès que tu répondras tout entier à son appel, Il te sera aussi indispensable à chacun de tes actes.

799 Crie-le lui bien fort, car ce cri est une folie d'amoureux!: Seigneur, bien que je t'aime..., ne te fie pas à moi! Attache-moi à Toi, et chaque jour davantage!

800 N'en doute pas: le cœur a été créé pour aimer. Mettons donc Notre Seigneur Jésus-Christ dans toutes nos amours. Sinon le cœur vide se venge, et se remplit des bassesses les plus méprisables.

801 Y a-t-il un cœur plus humain que celui d'une créature qui déborde de sens surnaturel? Pense à Sainte Marie, la pleine de grâce, Fille de Dieu le Père, Mère de Dieu le Fils, Epouse de Dieu le Saint-Esprit: il y a place dans son Cœur pour l'humanité tout entière sans différences ni discriminations. – Chacun est pour Elle un fils, une fille.

802 Lorsque leur cœur est tout petit, les gens semblent garder leurs projets de côté dans une pauvre boîte.

803 A l'égard de ceux qui t'entourent, tu dois te montrer chaque jour très compréhensif, très affectueux et en même temps, bien entendu, énergique autant qu'il le faut: sinon la compréhension et l'affection deviennent complicité et égoïsme.

804 Ce bon ami disait (et son humilité n'était pas feinte): "je n'ai pas eu besoin d'apprendre à pardonner, car le Seigneur m'a appris à aimer".

805 Pardonner! Pardonner de toute son âme et sans la moindre trace de rancune! Attitude toujours magnanime et féconde. – Tel fut le geste du Christ quand Il allait être cloué sur la croix: "Père, pardonne-leur parce qu'ils ne savent pas ce qu'ils font"; c'est de là qu'est venu ton salut, et le mien.

806 Il t'a fait beaucoup de peine, ce commentaire, fort peu chrétien, d'une certaine personne: "pardonne à tes ennemis, te disait-elle; tu n'imagines pas combien cela les fait enrager!" – Tu n'as pu te retenir, et tu as répliqué, serein: "je ne veux pas troquer l'amour contre l'humiliation du prochain. Je pardonne, parce que j'aime, et que j'ai soif d'imiter le Maître".

807 Evite avec soin tout ce qui pourrait blesser le cœur des autres.

808 Entre dix manières de dire "non", pourquoi faut-il que tu choisisses toujours la plus antipathique? – La vertu ne cherche pas à blesser.

809 Ecoute: nous devons aimer Dieu non seulement avec notre cœur, mais aussi avec le "Sien", et avec celui de toute l'humanité de tous les temps...: sinon, comme nous serons démunis pour répondre à son Amour!

810 Je souffre quand ceux qui se sont donnés à Dieu offrent l'image de vieux célibataires ou s'exposent à se faire prendre pour tels; alors qu'ils ont l'Amour par excellence! – Ils seront de vieux célibataires s'ils ne savent pas aimer Celui qui aime tant.

811 Quelqu'un a comparé notre cœur à un moulin, actionné par les vents de l'amour, de la passion... Et en effet, ce "moulin" peut moudre du blé, de l'orge, du fumier... Tout dépend de nous!

812 Le démon – le père du mensonge, victime de son orgueil – comme il essaie de contrefaire Notre Seigneur jusque dans la manière de faire des prosélytes. L'as-tu remarqué? De même que Dieu se sert des hommes pour sauver des âmes et les conduire à la sainteté, de même satan se sert d'autres personnes pour entraver ce travail et même pour perdre ces âmes. Et (ne t'en effraie pas) tout comme Jésus cherche pour instruments les plus proches – les parents, amis, collègues, etc. –, le démon lui aussi essaie fréquemment de faire agir ces êtres les plus chers, pour nous induire au mal. C'est pourquoi, si les liens du sang deviennent des attaches qui t'empêchent de suivre les chemins de Dieu, tranche-les avec décision. Et qui sait si ta détermination ne délivrera pas aussi ceux qui étaient pris dans les filets de Lucifer.

813 Merci, ô Jésus, d'avoir voulu devenir un Homme parfait, au Cœur aimant et très aimable, et qui aime jusqu'à la mort et qui souffre; qui se remplit de joie et de douleur; qui s'enthousiasme pour les chemins des hommes, et nous montre celui qui mène au Ciel; qui se soumet, héroïque, à son devoir, et agit avec miséricorde; qui veille sur les pauvres et sur les riches; qui prend soin des pécheurs et des justes... – Merci! Merci! mon Jésus, et donne-nous un cœur à la mesure du Tien!

814 Prie Jésus pour qu'Il te donne un brasier d'Amour, pour que ta pauvre chair – ton pauvre cœur – s'y consument, s'y purifient de toutes les misères de la terre... Alors vidée de toi-même, que ce soit Lui qui la remplisse! Demande-Lui de t'accorder une aversion radicale pour ce qui est mondain: que seul l'Amour te soutienne.

815 Ta vocation, tu l'as vue très claire: vouloir aimer Dieu! – mais cela, seulement dans ta tête. Tu m'assures que tu as bien fait entrer ton cœur dans ce chemin..., mais parfois tu as une distraction; ou même tu tentes de regarder en arrière: voilà un signe que ton cœur n'y est pas vraiment. – Allons! sois plus délicat!

816 Voilà comment s'exprime notre Maître: "Je suis venu dresser le fils contre son père, la fille contre sa mère et la belle-fille contre sa belle-mère..." Tu prouveras que tu les aimes vraiment en accomplissant ce qu'Il te demande. C'est pourquoi au moment du sacrifice personnel, ne te retranche pas derrière l'affection que tu leur portes (et qui doit rester intacte). Sinon, crois-moi, tu fais passer l'amour de tes parents avant l'amour de Dieu; et ton amour-propre avant l'amour de tes parents. – Maintenant, as-tu compris plus en profondeur la cohérence de ces paroles évangéliques?

817 Ah! ce cœur! De temps en temps, sans que tu puisses l'éviter, tu vois s'y projeter une ombre de vision humaine, un souvenir bas, triste, "étriqué"... – Par le cœur ou l'esprit, dépêche-toi d'aller près du Tabernacle: et tu reviendras à la lumière, à la joie, à la Vie.

818 La fréquence des visites que nous rendons à Notre Seigneur dépend de deux facteurs: de notre foi et de notre cœur; de voir et d'aimer la vérité.

819 Se nier soi-même et se mortifier: voilà qui rend l'Amour plus robuste.

820 Avec un cœur plus grand et un peu plus de sincérité, tu ne t'arrêterais pas à mortifier les autres ni à te sentir mortifié..., pour des broutilles.

821 Si tu te fâches (dans certains cas, c'est un devoir, mais dans d'autres, une faiblesse) que cela ne dure que quelques minutes. Et puis, mets-y toujours la charité: de l'affection!

822 Reprendre quelqu'un?... Très souvent c'est nécessaire. Mais fais-le en montrant comment corriger le défaut en question. Jamais pour donner libre cours à ton mauvais caractère.

823 Faut-il corriger quelqu'un? Montre-toi bien clair et aimable et, si cela convient, ne chasse pas un sourire de tes lèvres! Mais ne prends jamais (ou très rarement) les choses au tragique.

824 Est-ce que tu te sentirais le dépositaire du bien et de la vérité absolue et, par voie de conséquence, investi d'un titre personnel ou d'un droit à déraciner le mal à tout prix? – Tu n'arrangeras rien de la sorte: non, tu ne réussiras que par Amour et en y mettant de l'Amour! en te rappelant que l'Amour t'a pardonné et qu'Il te pardonne beaucoup de choses.

825 Les bons, aime-les parce qu'ils aiment le Christ... – Et aime aussi ceux qui ne L'aiment pas, parce qu'ils ont ce malheur..., et surtout parce que Lui, Il aime et les uns et les autres.

826 "Ils sont comme des brebis sans pasteur" – ils t'ont rappelé ces mots de notre Maître: les gens de ce pays éloigné – si éloigné de Dieu, si désorienté. – Et tu as senti comme ton cœur se remplissait aussi de compassion... De la place que tu occupes, décide-toi à donner ta vie en holocauste pour tous.

827 Les pauvres, disait notre ami, sont mon meilleur livre de spiritualité et le motif principal de mes prières. J'"ai mal aux pauvres" et j'"ai mal au Christ" avec eux. Et, à cause de ce mal, je comprends que je L'aime et que je les aime.

828 Si l'on place l'amour de Dieu au centre de l'amitié, cette affection s'épure, elle grandit, se spiritualise; en effet, l'on brûle les scories, les points de vue égoïstes, les considérations excessivement charnelles. Ne l'oublie pas: l'amour de Dieu ordonne mieux nos affections, il les rend plus pures, sans pour autant les diminuer.

829 Tu es dans un état qui te brûle le cœur: le Christ s'est approché de toi quand tu n'étais qu'un misérable lépreux! Jusqu'alors, tu cultivais une seule bonne qualité: un intérêt généreux pour les autres. Après cette rencontre, tu as obtenu la grâce de voir Jésus en eux, tu t'es épris de Lui et maintenant tu L'aimes à travers eux..., et l'altruisme qui te poussait auparavant à rendre quelques services au prochain te paraît désormais bien peu de chose: comme tu as raison!

830 Ton pauvre cœur, prends l'habitude de le mettre dans le Doux Cœur Immaculé de Marie pour qu'Elle le purifie de toutes ses scories, et pour qu'Elle te conduise au Cœur très Sacré et Miséricordieux de Jésus.

 «    PURETÉ    » 

831 La chasteté – celle que chacun vit selon son état: célibataire, marié, veuf, prêtre – est une affirmation triomphante de l'amour.

832 Le "miracle" de la pureté a pour points d'appui la prière et la mortification.

833 Elle s'avère d'autant plus dangereuse, la tentation contre la chasteté, qu'elle arrive plus dissimulée; comme elle trompe mieux quand elle se présente ainsi insidieuse.
– Ne transige pas avec elle, pas même sous le prétexte de ne pas avoir l'air "bizarre"!

834 La sainte pureté: il lui faut l'humilité de la chair! Tu lui demandais: Seigneur, donne-moi sept verrous pour mon cœur. Et je t'ai conseillé de lui demander avec sept verrous pour ton cœur quatre-vingts ans de gravité pour ta jeunesse...
Et puis, sois vigilant..., car on éteint plus vite une étincelle qu'un incendie– choisis la fuite car dans ce domaine c'est une vile lâcheté que de se vouloir "valeureux"; ne marche pas les yeux grands ouverts..., car ce n'est pas le signe d'un esprit éveillé, mais plutôt un piège de satan.
Mais tout ce zèle humain, et la mortification, le cilice, la discipline, le jeûne, qu'ils valent peu de chose sans Ton aide, mon Dieu!

835 Voilà comment tel confesseur a tué la concupiscence d'une âme délicate qui s'était accusée de certaines curiosités: – "Bah!: des instincts de mâles et de femelles.".

836 Dès que l'on admet volontairement un tel dialogue, la tentation prive l'âme de sa paix, de même que, consentie, l'impureté détruit la grâce.

837 Il a suivi le chemin de l'impureté, de tout son corps..., et de toute son âme. – Peu à peu sa foi s'est estompée..., bien qu'il reste tout à fait conscient qu'il ne s'agit pas d'un problème de foi.

838 "Vous m'avez dit que je peux devenir un "autre" saint Augustin, après tout mon passé. Pourquoi en douter? et aujourd'hui plus qu'hier je veux tenter cette expérience."
Mais c'est avec courage que tu dois couper à la racine, comme le fit le saint évêque d'Hippone.

839 Bien sûr, demande pardon, tout contrit, et qu'elle soit abondante, ta pénitence pour les actes impurs de ta vie passée, mais ne cherche pas à t'en souvenir.

840 Cette conversation... si sale, si ordurière! – Il ne suffit pas de ne pas la favoriser: manifeste avec vigueur ta répugnance!

841 C'est comme si "l'esprit" se réduisait peu à peu, comme s'il rapetissait, jusqu'à ne plus être qu'un petit point de rien du tout... Tandis que le corps grandit, croît démesurément, jusqu'à tout dominer. – C'est pour toi que saint Paul a écrit: "je châtie mon corps et je le réduis en esclavage, de peur qu'ayant prêché les autres, je ne sois moi-même réprouvé".

842 Qu'ils font de la peine ceux qui affirment – au nom de leur triste expérience personnelle – qu'on ne peut être chaste, en vivant et travaillant au milieu du monde! – Avec des raisonnements aussi peu cohérents, ils ne devraient pas se sentir blessés si d'autres offensent la mémoire de leurs parents, de leurs frères et sœurs, de leur femme, de leur mari.

843 Tel confesseur un peu rude mais expérimenté, mit un terme aux égarements d'une âme: il la fit rentrer dans l'ordre en lui assénant cette affirmation: "tu marches maintenant sur le chemin des vaches; tu te contenteras ensuite d'emprunter celui des chèvres; et ensuite... tu resteras toujours comme un animal qui ne sait pas regarder vers le ciel".

844 Tu peux bien être... ça, ce que tu es: un petit animal. – Mais tu dois reconnaître que d'autres sont intègres et chastes. Ah! et ne t'irrite pas après, s'ils ne comptent pas sur toi ou s'ils t'ignorent: c'est qu'ils forment, eux ou elles, leurs projets humains avec des personnes qui ont une âme et un corps..., et non avec des animaux.

845 Il y en a qui mettent des enfants au monde pour leurs affaires, pour leur service, pour leur égoïsme... Et ils ne se souviennent pas que les enfants sont un don merveilleux du Seigneur, et ils devront tout spécialement en rendre compte.
Mettre des enfants au monde, uniquement pour perpétuer l'espèce (oh! ne te vexe pas!) les animaux savent le faire aussi.

846 Un couple chrétien ne peut pas désirer tarir les sources de la vie. En effet, son amour se fonde sur l'Amour du Christ, qui est don de soi et sacrifice... En plus, comme le rappelait Tobie à Sara, les époux savent que "nous, nous sommes des enfants de saints, et nous ne pouvons nous unir comme des païens qui ne connaissent pas Dieu".

847 Quand nous étions petits, nous nous serrions aux jupes de notre mère, quand il fallait passer par des chemins obscurs, ou quand il y avait des chiens.
Maintenant, lorsque nous ressentons les tentations de la chair, nous devons serrer de très près notre Mère du Ciel, grâce à sa présence toute proche, et grâce aux oraisons jaculatoires.
– Alors, Elle nous défendra et nous conduira vers la lumière.

848 Ce n'est pas en menant cette vie de désordre qu'ils en sont pour autant plus hommes ou plus femmes.
Pour qui raisonne de la sorte, on voit bien que les personnes idéales, ce sont les prostituées, les invertis, les dégénérés..., ceux dont le cœur reste pourri et qui ne pourront entrer dans le Royaume des Cieux.

849 Laisse-moi te donner ce conseil, pour que tu le mettes en pratique chaque jour. Quand tu sentiras de plus basses tendances en ton cœur, dis lentement cette prière à la Vierge Immaculée: Regarde-moi avec compassion, ne m'abandonne pas, ô ma Mère! – Et donne ce conseil à d'autres.

 «    PAIX    » 

850 Favorise dans ton âme et dans ton cœur – dans ton intelligence et dans ta volonté – l'esprit de confiance et d'abandon à l'amoureuse Volonté du Père céleste... – C'est de là que naît la paix intérieure que tu recherches ardemment.

851 Comment pourras-tu avoir la paix si, négligeant les "impulsions" de la grâce, tu te laisses entraîner par ces passions, que tu n'essaies même pas de maîtriser? Le ciel pousse vers le haut; toi (uniquement toi: ne cherche pas d'excuses!) tu tires vers le bas... – Et c'est pourquoi tu es écartelé.

852 A l'intérieur de nous-mêmes nous trouvons aussi bien la paix que la guerre.
On ne peut parvenir au triomphe et à la paix, si la loyauté et la décision de vaincre au combat font défaut.

853 Un remède pour tes inquiétudes: patience, droiture d'intention, considérer les choses dans une perspective surnaturelle.

854 puisque Dieu est avec toi, éloigne immédiatement de toi la crainte et le trouble de l'esprit...: évite ces réactions dès qu'elles apparaissent, car elles ne servent qu'à multiplier les tentations et à accroître le danger.

855 Même si tout s'écroule et disparaît, même si les événements se passent à l'inverse de ce qui était prévu, dans une terrible adversité, que gagne-t-on à se troubler? Et puis, souviens-toi de cette prière confiante du prophète: "le Seigneur est notre Juge, le Seigneur est notre Législateur, le Seigneur est notre Roi; c'est Lui qui nous sauvera".
– Récite-la avec piété, chaque jour, pour conformer ta conduite aux desseins de la Providence, qui nous gouverne pour notre bien.

856 Le regard fixé sur Dieu, si tu sais rester serein devant les préoccupations, si tu apprends à oublier les petitesses, les rancunes et les jalousies, tu t'épargneras de perdre tant de ces énergies dont tu as besoin pour travailler avec efficacité au service des hommes.

857 Cet ami nous confiait sincèrement qu'il ne s'était jamais ennuyé, parce qu'il ne s'était jamais senti seul, jamais sans notre Ami.
– Le jour tombait, dans un silence épais... Tu as senti comme elle était vivante, la présence de Dieu... Et quelle paix l'on trouve, dans une telle réalité!

858 La salutation, vibrante, d'un de tes frères t'a rappelé, avec tous ces voyages, que les chemins honnêtes du monde sont ouverts au Christ: la seule chose qui manque c'est que nous nous mettions à les parcourir dans un esprit de conquête.
Oui, Dieu a créé le monde pour ses enfants, pour qu'ils y habitent et qu'ils le sanctifient: qu'attends-tu?

859 Ton bonheur est extraordinaire. Parfois, quand tu vois qu'un enfant de Dieu abandonne son Père, au cœur de ta paix et de ta joie, tu ressens une douleur, une amertume qui naissent de l'affection mais qui ne troublent ni n'inquiètent.
– Soit, mais... ayons recours à tous les moyens humains et surnaturels pour qu'il réagisse celui-là..., et mettons toute notre confiance en Jésus-Christ! C'est ainsi que les eaux regagnent toujours leur lit.

860 Quand tu t'abandonneras vraiment entre les mains du Seigneur, tu apprendras à te contenter de ce qui arrive, et à ne pas perdre ta sérénité si tes activités ne prennent pas la tournure que tu souhaites malgré ton acharnement et les bons moyens que tu as employés... C'est qu'elles auront pris la "tournure" que Dieu voulait qu'elles prennent.

861 Tu commets encore des étourderies et des fautes, et comme elles te font souffrir! En même temps tu poursuis ton chemin avec une joie à en exploser, dirait-on.
C'est justement parce qu'ils te font souffrir, souffrir d'une douleur d'amour, que tes échecs ne t'enlèvent plus la paix.

862 Quand on se trouve dans les ténèbres, quand on a l'âme aveugle et inquiète, il faut aller, comme Bartimée, vers la Lumière. Répète, crie, insiste avec plus de force, "Domine, ut videam!" – Seigneur, que je voie!... Et sur tes yeux se lèvera le jour, et tu pourras te réjouir des lumières qu'Il t'accordera.

863 Lutte pour effacer les aspérités de ton caractère, et contre tes égoïsmes, contre ton laisser-aller, contre tes antipathies... Nous devons être des corédempteurs. Et penses-y bien: le prix que tu recevras aura un rapport très direct avec les semailles que tu auras faites.

864 La tâche du chrétien: noyer le mal dans l'abondance du bien. Il ne s'agit pas de faire des campagnes négatives, ni d'être anti quoi que ce soit. Bien au contraire: il s'agit de vivre d'affirmations, d'être pleins d'optimisme, de jeunesse, de joie et de paix; de se montrer compréhensif envers tous qu'ils suivent le Christ ou qu'ils l'abandonnent ou qu'ils ne le connaissent pas.
– Mais la compréhension n'est pas de l'abstentionnisme, ni de l'indifférence, c'est une attitude active.

865 Tant par charité chrétienne que par élégance humaine, tu dois t'efforcer de ne pas créer d'abîme entre quelqu'un d'autre et toi..., de laisser toujours une porte de sortie au prochain, pour qu'il ne s'éloigne pas davantage de la Vérité.

866 La violence n'est pas un bon système pour convaincre..., et pour l'apostolat, moins encore.

867 Le violent perd toujours, même s'il gagne la première bataille..., parce qu'il finit prisonnier de la solitude que son incompréhension a créée.

868 La tactique du tyran, c'est qu'ils se disputent entre eux, ceux dont l'union pourrait le faire tomber. – Voilà un vieux stratagème utilisé par l'ennemi, par le diable et ses coryphées, pour déjouer nombre de plans apostoliques.

869 Ceux qui voient des rivaux là où il n'y a que des frères, ceux-là démentent par leurs actes leur profession de foi chrétienne.

870 Une polémique agressive, humiliante pour autrui, résout rarement une affaire. Et puis, bien sûr, on ne clarifie jamais rien lorsque, parmi ceux qui discutent, il y a un fanatique.

871 Je ne m'explique pas ta colère, ni ton désenchantement. Ils t'ont rendu la monnaie de ta pièce: une délectation dans l'injure, par la parole et par les œuvres.
Tire profit de cette leçon et, désormais, n'oublie pas qu'ils ont eux aussi un cœur, ceux qui vivent avec toi.

872 Pour que tu ne perdes pas la paix, en ces temps d'une adversité aussi dure qu'injuste, voilà ce que je t'ai rappelé: "si on nous ouvre la tête, nous n'y accorderons guère d'importance: c'est qu'alors nous devons l'avoir comme cela, ouverte".

873 Un paradoxe: depuis que je me suis décidé à suivre le conseil du Psaume: "abandonne tes préoccupations au Seigneur, et Lui, Il te soutiendra", j'ai de moins en moins de préoccupations dans la tête... Et en même temps, en travaillant comme il faut, tout se résout, et avec plus de clarté!

874 Sainte Marie est la Reine de la paix: l'Église la prie sous ce vocable. C'est pourquoi, lorsque le trouble agite ton âme, ton milieu familial ou professionnel, ou encore la vie en société, les relations entre les peuples, ne cesse pas de l'acclamer sous ce titre: "Regina pacis, ora pro nobis!" – Reine de la paix, priez pour nous! As-tu au moins essayé, quand la tranquillité vient à te manquer?... – Tu seras surpris de son efficacité immédiate.

 «    L'AU-DELA    » 

875 Le vrai chrétien est toujours prêt à comparaître devait Dieu. En effet, s'il lutte pour vivre comme un homme du Christ, il est à chaque instant prêt à accomplir son devoir.

876 Serein face à la mort! voilà comment je te veux! – Ce n'est pas le stoïcisme froid d'un païen; mais la ferveur d'un enfant de Dieu, qui sait que la vie vient à changer et non à disparaître. – Alors, mourir?... c'est Vivre!

877 Docteur en droit et en philosophie, il préparait un concours pour devenir professeur à l'Université de Madrid. Deux brillants cursus universitaires, menés à bien avec brio.
J'ai reçu un message de lui: il était malade, et il désirait que j'aille le voir. Je suis arrivé à la pension où il logeait. – "Père, je meurs", c'est ainsi qu'il m'a salué. Je l'ai réconforté avec affection. Il a voulu faire une confession générale. Et il est mort cette nuit-là.
Un architecte et un médecin m'ont aidé à l'envelopper dans un linceul. – Et, à la vue de ce corps jeune, qui commençait à se décomposer rapidement..., nous sommes tombés tous les trois bien d'accord: les deux cursus universitaires ne valaient rien, comparés au cursus définitif qu'il venait de couronner en bon chrétien.

878 Tout s'arrange, sauf la mort... Et la mort arrange tout.

879 La mort arrivera, inexorable. Par conséquent, comme il est vain, comme il est creux de centrer l'existence sur cette vie! Regarde comme ils souffrent, tous ces gens, hommes ou femmes. Pour les uns, leur vie se termine: ils souffrent tant de la quitter, pour les autres, elle dure, et elle les ennuie... En aucun cas nous ne pouvons justifier cette idée fausse que notre passage sur la terre est comme une fin en soi.
Il faut sortir de cette logique, et bien s'ancrer dans l'autre: la logique éternelle. Il faut faire un changement total: se vider de soi-même, de ses raisons égocentriques, qui sont caduques, pour renaître dans le Christ, qui est éternel.

880 Quand tu penses à la mort, n'en aie pas peur, malgré tes péchés... En effet il sait bien, Lui, que tu L'aimes..., et Il sait bien de quelle argile tu es fait.
– Si tu Le cherches, Il t'accueillera comme le père accueille son enfant prodigue: mais tu dois vraiment Le chercher!

881 "Non habemus hic manentem civitatem" – notre demeure définitive ne se trouve pas sur cette terre. – Et, pour que nous ne l'oubliions pas, cette vérité apparaît parfois crûment à l'heure de la mort: incompréhension, persécution, mépris... – Et toujours la solitude, parce que, même si nous sommes entourés d'affection, chacun est seul, tout seul à mourir.
– Larguons donc toutes les amarres! Préparons-nous constamment à ce passage, qui nous conduira à la présence éternelle de la Très Sainte Trinité.

882 Le temps est notre trésor: c'est "l'argent" qui achète l'éternité.

883 Comment t'es-tu consolé? Grâce à cette idée: la vie c'est se dépenser, la vie, il la faut brûler au service de Dieu. – Alors, si nous nous dépensons complètement pour Lui, la mort viendra nous délivrer et nous apporter la possession de la Vie.

884 Cet ami prêtre travaillait en pensant à Dieu, accroché à sa main paternelle, il aidait les autres à assimiler ces idées maîtresses. Aussi se disait-il: quand tu mourras, tout ira pour le mieux, parce que c'est Lui qui continuera à s'occuper de tout.

885 Ne fais pas de la mort une tragédie! car elle n'en est pas une. Seuls des enfants indifférents ne se réjouissent pas à l'idée de rencontrer leurs parents.

886 Ici-bas tout n'est qu'une poignée de cendres. Songe aux millions de personnes, déjà décédées, si "importantes" il y a peu, et dont nul ne se souvient.

887 Voici la grande révolution chrétienne: convertir la douleur en une souffrance féconde; faire d'un mal, un bien. Nous avons dépouillé le diable de cette arme...: et, avec elle, nous conquérons l'éternité.

888 Il sera terrible le jugement pour ceux qui, connaissant parfaitement le chemin, l'ayant enseigné aux autres, l'ayant exigé des autres, ne l'auront pas eux-mêmes parcouru.
– Dieu les jugera et les condamnera avec leurs propres paroles.

889 Le purgatoire, cette miséricorde de Dieu, destinée à purifier les défauts de ceux qui désirent s'identifier à Lui.

890 L'enfer seul est le châtiment du péché. La mort et le jugement n'en sont que des conséquences, que ne craignent pas ceux qui vivent en état de grâce.

891 Si parfois la pensée de notre sœur la mort t'inquiète, parce que tu te sens si peu de chose, prends courage et pense en toi-même: que sera ce Ciel qui nous attend, lorsque toute la beauté et la grandeur, toute la félicité et l'Amour infinis de Dieu se déverseront dans ce pauvre vase d'argile qu'est la créature humaine, et l'assouviront éternellement, avec la constante nouveauté d'un nouveau bonheur?

892 Une âme droite! comme elle se réjouit quand elle se heurte à l'amère injustice de cette vie, en pensant à la Justice éternelle de son Dieu éternel! – Et, tout en connaissant ses propres misères, elle laisse échapper cette exclamation paulinienne, soutenue par des désirs efficaces: "non vivo ego" – ce n'est plus moi qui vis maintenant, c'est le Christ qui vit en moi! Et Il vivra éternellement.

893 Comme l'on doit mourir content, lorsqu'on a vécu avec héroïsme toutes les minutes de sa vie! – Oui, je puis te l'assurer, pour avoir reconnu cette joie chez ceux qui, avec une sereine impatience, des années durant, se sont préparés à cette rencontre.

894 Prie le Seigneur pour qu'aucun de nous ne lui soit infidèle. – Cela ne nous sera pas difficile, si nous ne faisons pas les nigauds. Notre Père, en effet, nous aide en tout: même quand Il va jusqu'à rendre temporaire notre exil dans le monde.

895 Penser à la mort: voilà qui t'aidera à cultiver la vertu de la charité; peut-être cet instant précis est-il le dernier que tu vis auprès d'un tel ou d'un tel!... que ce soit eux, ou toi, ou moi, nous pouvons disparaître à n'importe quel moment.

896 Propos d'une âme qui désirait Dieu avec ardeur: heureusement, nous les hommes, nous ne sommes pas éternels!

897 Une nouvelle qui m'a fait réfléchir: cinquante-et-un millions de personnes meurent chaque année; quatre-vingt-dix-sept par minute. Notre Maître l'a bien dit: le pêcheur jette ses filets à la mer, le Royaume des Cieux est semblable à un grand filet..., et de là, l'on choisira les bons, tandis que les mauvais, ceux qui ne réunissent pas les conditions, ils seront rejetés pour toujours! Cinquante-et-un millions de gens meurent chaque année, quatre-vingt-dix-sept par minute: dis-le toi aussi à d'autres.

898 Notre Mère est montée aux Cieux avec son corps et son âme. Redis-lui que, comme des enfants, nous ne voulons pas nous séparer d'Elle... Et Elle t'écoutera!

 «    LA LANGUE    » 

899 Le don des langues, savoir transmettre la science de Dieu: une qualité indispensable à celui qui doit être apôtre. – C'est pourquoi je demande tous les jours à Dieu Notre Seigneur de l'accorder à chacune et à chacun de ses enfants.

900 Apprends à dire non, sans blesser inutilement ton interlocuteur, sans recourir au refus cassant, qui brise la charité.
– Souviens-toi bien que tu es toujours devant Dieu!

901 Cela te dérange que j'insiste, toujours de la même manière, sur les mêmes choses essentielles? Que je ne tienne pas compte des courants en vogue? – Ecoute donc: au cours des siècles, on a toujours défini la ligne droite de la même manière; n'est-ce pas la façon la plus brève et la plus claire? Une autre définition serait plus obscure, plus compliquée.

902 Exerce-toi à la cordialité pour parler de tout et de tous; et en particulier de tous ceux qui travaillent au service de Dieu.
Et quand ce ne sera pas possible, tais-toi!: même des commentaires à brûle-pourpoint ou désinvoltes peuvent frôler la médisance ou la diffamation.

903 Un jeune homme qui venait de se donner plus intimement à Dieu disait: "maintenant, ce qu'il me faut c'est parler moins, rendre visite à des malades et dormir par terre".
– Autant pour toi!

904 Ne parler des prêtres du Christ que pour les louer! – Je désire de toute mon âme que mes frères et moi-même tenions bien compte de ce précepte, dans notre conduite de tous les jours.

905 Le mensonge a plusieurs facettes: réticences, intrigues, médisance... – Mais il est toujours l'arme des lâches.

906 Pourquoi te laisser impressionner par la première ou par la dernière conversation entendue? Ecoute avec respect, avec intérêt; fais confiance aux personnes..., mais fais passer ton jugement au tamis de la présence de Dieu!

907 Ils médisent. Et ensuite ils veillent eux-mêmes à ce que quelqu'un vienne te rapporter immédiatement cet "on dit" – C'est infâme? – Sans doute. Mais ne perds pas la paix puisque leur langue ne pourra te faire aucun mal si tu travailles avec droiture... Pense plutôt: qu'ils sont niais, qu'ils sont dépourvus de délicatesse humaine, quel manque de loyauté envers leurs frères..., et particulièrement envers Dieu! Et toi, ne tombe pas à ton tour dans la médisance, au nom d'un droit de réponse mal compris. Si tu dois parler, aie recours à la correction fraternelle, comme le conseille l'Evangile.

908 Que ces contradictions, que ces racontars ne te préoccupent pas: bien sûr nous travaillons à une entreprise divine, mais nous sommes des hommes... Et il est normal qu'en marchant nous soulevions la poussière du chemin.
De cela-même qui te gêne, qui te blesse..., tire profit pour purifier ton âme et, si c'est nécessaire, pour te corriger.

909 Il est si humain de médire, à ce qu'ils disent! – J'ai répondu: nous, nous devons vivre d'une façon divine.
Les propos, malveillants ou légers d'un seul homme peuvent finir par créer un courant d'opinion, voire de lancer la mode de dire du mal de quelqu'un... Ensuite, cette médisance monte d'en bas, gagne de l'altitude, et peut se condenser en de sombres nuages.
– Mais si celui que l'on harcèle est une âme de Dieu, quoi qu'il arrive les nuages se résorbent en une pluie féconde; et le Seigneur se charge de l'exalter, là même où l'on voulait l'humilier ou le diffamer.

910 Tu ne voulais pas le croire, mais il t'a fallu te rendre à l'évidence, à tes dépens: ces affirmations que tu as prononcées en toute simplicité et suivant un sentiment vraiment catholique, les ennemis de la foi les ont retournées avec malice.
C'est vrai, "nous devons être candides comme des colombes..., et prudents comme des serpents". Ne parle ni à la légère ni n'importe où.

911 Parce que tu ne sais pas, ou que tu ne veux pas imiter la conduite noble de cet homme, ton envie cachée te pousse à le ridiculiser.

912 La médisance est fille de l'envie; et l'envie, le refuge des gens stériles.
C'est pourquoi, en cas de stérilité, examine tes intentions: si tu travailles et si tu n'es pas contrarié que d'autres travaillent aussi et obtiennent des fruits, cette stérilité n'est qu'apparente; tu engrangeras la récolte le temps venu.

913 On dirait que certains se croient désœuvrés quand ils ne font pas du tort aux autres ou qu'ils ne les mortifient pas.

914 Parfois je pense que les médisants sont comme de petits possédés... – En effet, le démon s'insinue là, avec son esprit mauvais toujours critique à l'égard de Dieu ou de ceux qui suivent Dieu.

915 "Des âneries", commentes-tu méprisant.
– Sais-tu de quoi il s'agit? Non? – Alors, pourquoi parles-tu de ce que tu ne connais pas?

916 Réponds à ce médisant: cela, je le raconterai ou j'en parlerai à l'intéressé.

917 D'un auteur contemporain: "le commérage est toujours inhumain; il révèle une valeur personnelle médiocre; c'est un signe d'impolitesse; il dénote l'absence de sentiments distingués; il est indigne d'un chrétien".

918 Plaintes, critiques, médisances: à éviter toujours... Evite soigneusement tout ce qui peut introduire la discorde entre des frères.

919 Toi qui es investi d'une très haute autorité, quelle imprudence si tu interprétais le silence de ceux qui t'écoutent comme un signe d'acquiescement: pense plutôt que tu ne les laisses pas exposer leurs suggestions, et que tu te sens offensé s'ils parviennent à te les communiquer. – Tu dois te corriger.

920 Voilà comment tu dois te comporter devant la diffamation: tout d'abord, pardonner, à tous, dès le premier moment et du fond du cœur. – Ensuite, aimer: qu'il ne t'échappe pas un seul mot dépourvu de charité; réponds toujours avec amour! – Mais, si l'on attaque l'Église ta Mère, défends-la vaillamment. Calme, mais ferme et plein d'une vigoureuse détermination, empêche-les de salir ou d'encombrer le chemin que doivent parcourir les âmes qui veulent pardonner et répondre avec charité, alors qu'elles subissent des injures personnelles.

921 Le plus petit village devrait être comme la capitale: commentaire de quelqu'un que fatiguaient les médisances.
– Il ne savait pas, le pauvre, que c'est la même chose.
– Toi, pour l'amour de Dieu et du prochain, ne tombe pas dans un défaut aussi "provincial"..., et aussi peu chrétien. – Des premières personnes qui allèrent à la suite du Christ on affirmait: voyez comme ils s'aiment! Peut-on dire la même chose de toi, de moi, à tout moment?

922 Les critiques contre les œuvres d'apostolat sont habituellement de deux sortes: les unes présentent ce travail comme quelque chose de très compliqué...; d'autres le qualifient de commode et facile.
Au bout du compte une telle "objectivité" n'est qu'étroitesse de vue, assortie d'une bonne dose de fainéantise et de bavardage. – Demande-leur sans te fâcher: et vous, que faites-vous?

923 De la sympathie pour les commandements de ta foi? c'est peut-être trop leur demander mais tu dois au moins exiger du respect.

924 Ceux qui t'ont dit du mal de cet ami si loyal envers Dieu, ce sont les mêmes qui médiront de toi lorsque tu te seras décidé à mieux te conduire.

925 Certains commentaires ne peuvent blesser que ceux qui se sentent visés. C'est pourquoi, quand on marche, de tout son esprit et de tout son cœur, à la suite de Notre Seigneur, on reçoit les critiques comme une purification, et elles servent de stimulant pour presser le pas.

926 La Très Sainte Trinité a couronné notre Mère.
– Dieu le Père, Dieu le Fils, Dieu le Saint-Esprit, nous demandera de rendre compte de toute parole vaine. Raison de plus pour dire à Sainte Marie de nous apprendre à parler toujours en la présence du Seigneur.

 «    RAYONNEMENT    » 

927 Il faut t'en convaincre: ton apostolat consiste à répandre la bonté, la lumière, l'enthousiasme, la générosité, l'esprit de sacrifice, la constance dans le travail, la profondeur dans l'étude, l'envergure dans le don de soi; et à te tenir à jour, à obéir absolument, joyeusement à l'Église, à vivre une charité parfaite...
– Nul ne donne ce qu'il n'a pas.

928 Pour toi, qui es encore jeune et qui viens de t'engager sur ce chemin, un conseil: comme Dieu mérite tout, cherche à te distinguer dans ta profession, pour pouvoir ensuite propager tes idées avec plus d'efficacité.

929 Ne l'oublie pas: nous pouvons convaincre avec d'autant plus d'aisance que nous sommes nous-mêmes plus convaincus.

930 "On n'allume pas une lampe pour la mettre sous le boisseau, mais sur le lampadaire, pour qu'elle éclaire tous ceux de la maison; que votre lumière brille ainsi devant les hommes, afin qu'ils voient vos bonnes œuvres et glorifient votre Père qui est dans les cieux."
Et, quand s'achève son séjour sur la terre, Il donne cet ordre: "euntes docete" – allez et enseignez. Il veut que sa lumière brille dans la conduite et dans les paroles de ses disciples, et dans les tiennes aussi.

931 Comme il est choquant de voir si souvent que beaucoup de gens, au nom de la liberté, redoutent que les catholiques soient simplement de bons catholiques, et qu'ils s'y opposent!

932 Garde-toi de ceux qui propagent des calomnies et des insinuations; les uns les accueillent par légèreté et les autres par mauvaise foi; ils détruisent ainsi la sérénité ambiante et ils empoisonnent l'opinion publique.
Parfois, la véritable charité requiert que l'on dénonce ces outrages et leurs instigateurs. Sinon, avec leur conscience fourvoyée ou peu formée, ceux-là et ceux qui les écoutent peuvent raisonner ainsi: ils ne disent mot, donc ils consentent.

933 Les sectaires vocifèrent contre ce qu'ils appellent "notre fanatisme", parce que les siècles passent et la Foi catholique demeure immuable.
En revanche, parce qu'il n'a aucun rapport avec la vérité, le fanatisme des sectaires change à chaque époque de costume; il dresse contre la Sainte Église l'épouvantail de simples mots, que leurs actes ont vidés de leur sens: la "liberté", qu'ils enchaînent; le "progrès", qui ramène à la forêt vierge; la "science", qui dissimule l'ignorance... Toujours un pavillon qui cache une vieille marchandise avariée.
Ah, si ton "fanatisme" pour la Foi, l'unique défense de l'unique Vérité, pouvait se renforcer chaque jour davantage!

934 Ne t'effraie pas, ne t'étonne pas de l'étroitesse d'esprit de certains. Il y aura toujours des sots qui, sous des dehors de culture, brandiront l'arme de leur ignorance.

935 Quelle douleur que de constater comme ils marchent bien unis, unis par des passions différentes – mais unis contre les chrétiens, contre les enfants de Dieu – ceux qui haïssent le Seigneur et quelques autres qui affirment être à son service!

936 Dans certains milieux, surtout dans le monde intellectuel, on perçoit, on touche du doigt comme une consigne émanant de sectes, et parfois même reprise par des catholiques, avec une persévérance cynique; elle entretient et propage la calomnie, pour jeter des ombres sur l'Église, ou sur des personnes et des institutions, contre toute vérité et toute vraisemblance.
Récite chaque jour, avec foi: "ut inimicos Sanctae Ecclesiae – des ennemis, parce qu'ils se proclament tels – humiliare digneris, te rogamus, audi nos!" Confonds, Seigneur, ceux qui te persécutent, par la clarté de ta lumière que nous sommes décidés à propager.

937 Cette conception du catholicisme serait vieillotte, et par conséquent inacceptable?... – Le soleil est plus ancien encore et il n'a rien perdu de sa lumière; l'eau est plus archaïque, et elle étanche encore la soif, elle rafraîchit.

938 On ne peut tolérer que quelqu'un falsifie l'histoire ou la vie, même pour une bonne cause. – Mais dresser un piédestal aux ennemis de l'Église, qui ont passé leur vie à la persécuter, quelle erreur monumentale! Sois-en convaincu: si un chrétien ne contribue pas à la construction d'un piédestal qui
historique: depuis quand la haine a-t-elle été érigée en modèle?

939 La propagande chrétienne n'a pas besoin de provoquer d'antagonismes, ni de maltraiter ceux qui ne connaissent pas notre doctrine. Si l'on agit avec charité ("caritas omnia suffert!" – l'amour supporte tout) celui qui l'avait combattue, déçu de son erreur, peut finir par s'engager, sincère et plein de délicatesse. – Néanmoins, il ne faut pas céder sur le dogme, au nom d'une naïve "largeur de vues", parce que celui qui agirait ainsi s'exposerait à rester hors de l'Église: et, au lieu d'obtenir le bien pour les autres, il se ferait du tort à lui-même.

940 Le christianisme est "insolite", il ne se conforme pas aux choses de ce monde. Et c'est peut-être là son "plus grand inconvénient", et le signe de ralliement des mondains.

941 Certains ignorent tout de Dieu..., parce qu'on ne leur en a pas parlé en termes compréhensibles.

942 Quand tu constateras les limites de ton intelligence, demande à être saintement malin, pour servir tout le monde, davantage et mieux.

943 Crois-moi, d'ordinaire, l'apostolat, la catéchèse, doivent être capillaires; un par un: chaque croyant entraînant son plus proche compagnon.
Nous, les enfants de Dieu, toutes les âmes nous intéressent, parce que chaque âme, en elle-même nous intéresse.

944 Cherche un refuge auprès de la Sainte Vierge, Mère du Bon Conseil, pour qu'il n'y ait jamais d'offenses à Dieu qui sortent de ta bouche.

 «    RESPONSABILITÉ    » 

945 Si nous les chrétiens, nous vivions vraiment selon notre foi, il se produirait la plus grande révolution de tous les temps... L'efficacité de la corédemption dépend aussi de chacun de nous! – Médite-cela.

946 Tu sentiras toute ta responsabilité quand tu auras compris que, devant Dieu, tu n'as que des devoirs. Les droits, c'est Lui qui se charge de te les accorder!

947 Puisses-tu prendre l'habitude de t'occuper chaque jour des autres, avec une générosité telle que tu en oublies d'exister!

948 Une pensée qui t'aidera dans les moments difficiles: plus grande sera ma fidélité, plus je contribuerai à en faire grandir d'autres dans cette vertu. – Il est si attrayant de se sentir soutenus les uns par les autres!

949 Ne sois pas un "théoricien": ce sont nos vies, chaque jour, qui doivent transformer ces idéaux grandioses en une réalité quotidienne, héroïque et féconde.

950 Il est vrai que ce qui est ancien mérite respect et reconnaissance. Apprendre, oui. Tenir compte de ces expériences, aussi. Mais n'exagérons pas: chaque chose en son temps. Est-ce que nous prendrions pour habits des chausses et un justaucorps, pour couvre-chef une perruque poudrée?

951 Ne te vexe pas: très souvent un comportement irresponsable dénote un manque d'intelligence ou de formation, plus encore que l'absence de bon esprit.
Il faudra exiger des maîtres, des directeurs, qu'ils comblent de telles lacunes par un accomplissement responsable de leur devoir.
– Et il faudra que tu fasses ton examen de conscience..., si c'est toi qui occupes l'un de ces postes.

952 Tu cours le grand danger de te contenter de vivre, ou de penser que tu dois vivre, comme un "enfant sage", qui habite dans une maison bien ordonnée, sans problèmes, et qui ne connaît que le bonheur.
Quelle caricature du foyer de Nazareth! C'est bien parce qu'il apportait le bonheur et l'ordre, que le Christ s'en est allé répandre ces trésors parmi les hommes et les femmes de tous les temps.

953 Ils me semblent très cohérents tes désirs que l'humanité tout entière connaisse le Christ. Mais commence par penser à ta propre responsabilité de sauver l'âme de ceux qui vivent à tes côtés, de sanctifier chacun de tes compagnons de travail ou d'étude... – Voilà la principale mission que Notre Seigneur t'a confiée.

954 Comporte-toi comme si l'ambiance de l'endroit où tu travailles dépendait de toi, et uniquement de toi: une ambiance laborieuse, de joie, de présence de Dieu et de vision surnaturelle.
– Je ne comprends pas ton aboulie. Si tu te heurtes à un groupe de camarades un peu difficile – peut-être est-il devenu difficile à cause de ton laisser-aller – tu t'en désintéresses, tu te dérobes, et tu penses qu'ils sont un poids mort, du lest qui freine tes projets apostoliques, qu'ils ne te comprendront pas...
– Comment veux-tu qu'ils t'écoutent si, te contentant de les aimer et de les servir par ta prière et ta mortification, tu ne leur parles pas?...
– Combien de surprises auras-tu le jour où tu te décideras à en fréquenter un, puis un autre, puis un autre encore! Qui plus est, si tu ne changes pas, ils pourront s'écrier avec raison, en te désignant du doigt: "hominem non habeo!" – je n'ai personne qui m'aide!

955 Ecoute-moi bien: les choses saintes, lorsqu'on les voit saintement, lorsqu'on les vit saintement tous les jours..., elles ne sont plus des choses "de tous les jours". Toute l'activité de Jésus-Christ sur cette terre a été humaine, et divine!

956 A ce que tu dis, tu ne peux pas te contenter de vivre comme les autres, avec la foi du tout venant. – En effet, tu dois avoir une foi personnelle: et bien sentir tes responsabilités.

957 La Très Sainte Trinité t'accorde sa grâce, et Elle attend que tu en profites d'une façon responsable: devant tant de bienfaits, il ne convient pas d'adopter des manières tranquilles, lentes, paresseuses..., parce qu'il y a, de plus, les âmes qui t'attendent.

958 Pour toi, qui te trouves aux prises avec cette grande difficulté: si le problème est posé comme il faut, c'est-à-dire avec vision surnaturelle, sereine et responsable, on trouve toujours une solution.

959 Lorsqu'elles prennent leurs enfants dans leurs bras, les mères – les bonnes mères – veillent à ne pas porter d'épingles qui blesseraient ces petits... Dans nos rapports avec les âmes, nous devons mettre toute la douceur... et toute l'énergie nécessaire.

960 "Custos, quid de nocte!" – Sentinelle alerte! Ah si toi aussi, pendant la semaine, tu prenais l'habitude d'avoir ton jour de garde: pour te donner plus à fond, pour veiller sur chaque détail avec un plus grand amour, pour prier et te mortifier un peu plus.
Tu vois: la Sainte Église est comme une grande armée rangée en ordre de bataille. Et, toi, dans cette armée, tu défends un "front", où il y a des attaques et des combats et des contre-attaques. Est-ce que tu comprends? Si tu te rapproches davantage de Dieu, un tel état d'esprit t'incitera à transformer tes journées, l'une après l'autre, en autant de jours de garde.

961 Sur le revers d'une vocation "perdue" ou d'une réponse négative aux appels constants de la grâce, il faut voir la permission de la volonté de Dieu. – Certes; mais, si nous sommes sincères, nous savons bien que cela ne constitue pas une circonstance absolutoire ou atténuante, parce que, sur l'avers, nous distinguons qu'un tel, personnellement, n'a pas accompli la Volonté de Dieu; Dieu qui nous a cherché pour Lui, et qui s'est trouvé sans réponse.

962 Si tu aimes vraiment ta patrie (et je suis sûr que tu l'aimes) tu n'hésiterais pas à t'engager si l'on recrutait des volontaires pour la défendre contre un péril imminent. Je te l'ai écrit, en cas d'urgence tout le monde est utile: les hommes et les femmes; les vieux, les hommes mûrs, les jeunes gens et même les adolescents. Seuls les inaptes et les enfants restent de côté!
Chaque jour, non pas un recrutement de volontaires – ce qui serait peu – mais une mobilisation générale des âmes est décrétée pour défendre le Royaume du Christ. Et le Roi en personne, Jésus, t'a appelé expressément par ton nom. Il te demande de prendre part aux batailles de Dieu, de mettre à son service ce qu'il y a de plus élevé dans ton âme: ton cœur, ta volonté, ton entendement, tout ton être.
– Ecoute-moi: grâce à la pureté de vie, grâce surtout à la protection de la Sainte Vierge, la chair n'est pas un problème. – Seras-tu assez lâche pour essayer de te dérober à l'appel, sous prétexte que ton cœur est malade, ou ta volonté ou ton entendement?... Veux-tu te justifier et rester dans le service auxiliaire? – Le Seigneur veut faire de toi un instrument d'avant-garde (ce que tu es déjà) et, si tu tournes le dos, tu es bien à plaindre, traître que tu es!

963 Si le temps n'était que de l'or..., peut-être tu pourrais le perdre. -- Mais le temps c'est la vie, et tu ne sais pas ce qu'il t'en reste.

964 Le Seigneur –a converti Pierre, qui l'avait renié trois fois, sans lui adresser ne serait-ce qu'un reproche: mais rien qu'un regard d'Amour.
– Après nos chutes Jésus nous regarde avec ces mêmes yeux. Puissions-nous Lui dire comme Pierre: "Seigneur, Tu sais tout; Tu sais que je T'aime!" et changer notre vie.

965 Ils justifient par la charité la délicatesse et la compréhension dont ils font preuve à l'égard de ceux qui attaquent.
– Je prie Dieu que cette délicatesse et cette compréhension ne soient pas le camouflage de... leurs respects humains, de leur commodité qui permet aux autres de commettre le mal. Car dans ce cas... leur délicatesse et leur compréhension ne seraient que complicité dans l'offense faite à Dieu.

966 On ne peut aider à la conversion d'une âme, au risque de la perversion de beaucoup d'autres.

967 Si quelqu'un acceptait d'élever des loups parmi les agneaux..., il peut aisément imaginer le risque que courraient ses agneaux.

968 Les hommes médiocres, médiocres tant par leur intelligence que par la médiocrité de leur esprit chrétien, quand ils sont investis d'une autorité, ils s'entourent de sots: leur vanité les persuade, à tort, que de la sorte ils ne perdront jamais leur pouvoir.
Les sages, en revanche, s'entourent de personnes compétentes, qui allient le savoir et une vie droite, et ils en font des hommes de gouvernement. Leur humilité ne les trompe pas, car, faisant grandir les autres, ils se grandissent eux-mêmes.

969 Il n'est pas prudent de faire accéder des inconnus à un important poste de direction, pour voir ce que cela donne. – Comme si le bien commun pouvait dépendre d'une pochette surprise!

970 Toi qui es investi d'une autorité, tu agis en fonction du qu'en dira-t-on? Pauvre vieillard! C'est tout d'abord le qu'en dira Dieu qui doit te tenir à cœur; après – bien après, et parfois jamais – tu devras peser ce que peuvent en penser les autres. "Celui qui me reconnaîtra devant les hommes, dit Notre Seigneur, moi aussi je le reconnaîtrai devant mon Père, qui est dans les cieux. Mais celui qui m'aura renié devant les hommes, moi aussi je le renierai devant mon Père, qui est dans les cieux.".

971 Toi, qui occupes un poste de responsabilité, souviens-toi de ceci, quand tu exerces ta charge: ce qui est personnel disparaît avec la personne qui s'est rendue indispensable.

972 Une règle fondamentale pour bien gouverner: partager les responsabilités, sans que cela signifie rechercher la facilité ou l'anonymat. J'y insiste: partager les responsabilités; en demandant à chacun de rendre compte de sa charge, pour pouvoir en "rendre compte" à Dieu, et aux âmes s'il est nécessaire.

973 Quand tu résous des affaires, veille à ne jamais faire prévaloir la justice au point d'en oublier la charité.

974 La résistance d'une chaîne se mesure à son maillon lc plus faible.

975 Ne dis jamais de l'un de tes subordonnés qu'il est un incapable.
– L'incapable, c'est toi; parce que tu ne sais pas le placer là où il peut être utile.

976 Repousse l'ambition d'atteindre les honneurs; en revanche, aie de la considération pour les instruments, les devoirs, l'efficacité. – Ainsi, tu ne brigueras pas les charges; et si elles t'arrivent, tu les estimeras à leur juste mesure: des charges au service des âmes.

977 Quand vient le mépris de la Croix, la Sainte Vierge se trouve là, auprès de son Fils, décidée à partager son sort. – Perdons la peur de nous conduire comme des chrétiens responsables, lorsque cela ne s'avère pas facile dans le milieu où nous évoluons: Elle nous y aidera.

 «    PÉNITENCE    » 

978 C'est Notre Seigneur Jésus-Christ qui le veut: il faut Le suivre de près. Il n'y a pas d'autre chemin. Telle est l'œuvre du Saint-Esprit dans chaque âme et dans la tienne: sois docile, n'oppose pas d'obstacles à Dieu, jusqu'à ce qu'Il fasse un Crucifix de ta pauvre chair.

979 Si le mot amour sort très souvent de la bouche de quelqu'un, sans l'appui de petits sacrifices, il finit par lasser.

980 La mortification est d'une importance extraordinaire, de tous les points de vue.
– Pour des motifs humains, car celui qui ne sait pas se maîtriser n'aura jamais une influence positive sur les autres, et son milieu aura raison de lui, dès qu'il flattera ses goûts personnels: ce sera un homme sans énergie, incapable, le cas échéant, d'un gros effort.
– Pour des motifs divins: ne te semble-t-il pas juste que, par ces petits actes, nous prouvions notre amour et notre soumission à celui qui a tout donné pour nous?

981 L'esprit de mortification, il ne jaillit pas tant comme une manifestation de l'Amour mais plutôt comme l'une de ses conséquences. Reconnais-le: si tu échoues dans ces petites épreuves, c'est ton amour de l'Amour qui faiblit.

982 N'as-tu pas remarqué que, grâce à leur simplicité, les âmes mortifiées savourent mieux les bonnes choses, même en ce monde?

983 Sans mortification, il n'y a pas de bonheur sur la terre.

984 Lorsque tu te décideras à la mortification, ta vie intérieure s'améliorera et tu deviendras tellement plus fécond.

985 A ne pas oublier: il faut qu'il y ait dans toutes les activités humaines, des hommes et des femmes qui, dans leur vie et dans leurs œuvres, portent la Croix du Christ, dressée haute, visible, réparatrice; symbole de la paix, de la joie; symbole de la Rédemption, de l'unité du genre humain, et de l'amour dont Dieu le Père, Dieu le Fils et Dieu le Saint-Esprit, la Trinité Bienheureuse a aimé et aime toujours l'humanité!

986 Vous n'allez pas rire, Père, si je vous dis que, voici quelques jours, je me suis surpris à offrir au Seigneur, spontanément, ce sacrifice de mon temps: il me fallait arranger, pour un de mes enfants, un jouet détraqué.
– Je n'en souris pas, je m'en réjouis!: car c'est avec le même Amour que Dieu s'occupe de redresser nos défauts.

987 Sois mortifié, mais non grossier ni amer. – Sois recueilli, mais non timoré.

988 Un jour sans mortification est un jour perdu, parce que nous n'avons pas renoncé à nous-mêmes, parce que nous n'avons pas vécu l'holocauste.

989 N'as-tu jamais contrarié tes goûts ou tes caprices en quelque chose? – Considère que Celui qui te demande de le faire est cloué sur une Croix, qu'Il souffre dans tous ses sens et dans toutes ses puissances, et qu'une couronne d'épines couvre sa tête... et tout cela pour toi.

990 Tu te présentes comme un théoricien remarquable... – Mais tu ne cèdes pas, même sur de menus détails! – Je ne crois pas à ton esprit de mortification!

991 Le soin des petites choses requiert une mortification constante: voilà comment rendre la vie plus agréable aux autres.

992 Je préfère les vertus aux austérités, dit à peu près en ces termes Yahvé au peuple élu qui se laisse prendre à certaines formalités extérieures.
– C'est pourquoi, nous devons cultiver la pénitence et la mortification, comme de véritables preuves de notre amour de Dieu et du prochain.

993 Quand nous faisons notre méditation, la Passion du Christ sort du cadre froid de l'histoire ou d'une pieuse considération, pour se présenter à nos yeux, terrible, accablante, cruelle, sanglante..., pleine d'Amour.
– Et l'on sent bien alors que le péché ne se réduit pas à une petite "faute d'orthographe": mais que c'est crucifier, déchirer à coups de marteau les mains et les pieds du Fils de Dieu, et lui faire éclater le cœur.

994 Souhaites-tu vraiment devenir une âme pénitente (pénitente et joyeuse)? Alors défends, pardessus tout, les moments que tu réserves chaque jour à la prière: une prière intime, généreuse, prolongée; veille à ce que ces moments n'arrivent pas à l'improviste, mais qu'ils aient une heure fixe, autant que faire se peut. Et ne cède pas là-dessus.
Fais-toi l'esclave de ce culte quotidien à Dieu et, je te l'assure, tu te sentiras toujours plein de joie.

995 Le chrétien triomphe toujours à partir de la Croix, à partir de son propre renoncement, parce qu'il laisse agir la Toute-Puissance divine.

996 Quand tu te souviens de ta vie passée, passée sans peine ni gloire, considère tout le temps tu as perdu et comment tu peux le recouvrer: par la pénitence et par un plus grand don de toi-même.

997 Pense à tout ce qui, dans ta vie, sera dépourvu de valeur, parce que tu ne l'auras pas offert à Dieu, et tu devras te sentir avide, impatient de tout recueillir, avide aussi de ne négliger aucune douleur. – En effet, si la douleur est la compagne de la créature, pourquoi la laisser passer, sinon par sottise?

998 Tu as l'esprit de contradiction, d'opposition systématique?... Très bien: alors exerce-le en t'opposant à toi-même, en te contredisant toi-même!

999 Tandis que la sainte Famille se repose, l'Ange apparaît à Joseph: ils doivent fuir en Egypte. Marie et Joseph prennent l'Enfant et se mettent en route sans attendre. Ils ne se révoltent pas, ils ne se dérobent pas, ils n'attendent pas que la nuit s'achève...: dis à Notre Mère Sainte Marie et à saint Joseph, Notre Père et Seigneur, que nous avons le désir d'aimer spontanément toute pénitence passive.

1000 J'écris ce point pour que nous souriions, toi et moi, à la fin de ce livre, et pour rassurer ces braves lecteurs qui, par ingénuité ou par malice, avaient cru voir la Cabale derrière les 999 points de Chemin.